Multiplication des animaux performants: la station de Loumbila, un cas d’école

Les races de bovins de la station de Loumbila…

Face à la faible productivité des races animales locales, le gouvernement du Burkina Faso a multiplié les solutions pour améliorer les productions animales et leur compétitivité. Dans cette dynamique, la station de multiplication des animaux performants de Loumbila, localité située à une quinzaine de kilomètres de Ouagadougou, s’attelle à la production de races performantes d’animaux, pour une consommation humaine de qualité. Cette initiative entre en droite ligne avec la vision de l’Offensive agropastorale et halieutique du ministère en charge de l’agriculture, visant à assurer l’autosuffisance alimentaire à chaque Burkinabè.

Structure peu connue, la station de multiplication des animaux performants est située à une quinzaine de Kilomètres au nord-ouest de Ouagadougou, plus précisément à Loumbila, sur la nationale 3 (Ouaga-Kaya). Sur place, le Directeur des ressources génétiques animales et de la multiplication des animaux performants (DRGMAP), Dr Arnaud Stéphane Tapsoba et son équipe sont volontiers accueillants.

Dans cette station de Loumbila, la multiplication des animaux performants est l’activité-phare et concerne essentiellement deux types d’animaux, les porcins et les bovins. On y trouve également des animaux de pâturage dont des petits ruminants.
A la porcherie de la station, il est donné à voir un échantillon de la trentaine de porcs dont dispose le site. Ils sont tous des verrats (mâles). Ils impressionnent par leur taille et leur poids qui tourne autour de 200 Kg. Selon Dr Tapsoba, ils appartiennent à quatre races différentes : la Landrace, la Large white, le Duroc et le Piétrain.

De façon concrète, il s’agit de collecter la semence de ces races à l’effet de procéder à une insémination artificielle sur des truies (femelles de porcs), qui elles, sont de races locales. La semence de porc étant très concentrée, il est procédé à sa dilution, une fois recueillie. Et pour la conservation de cette semence en attente d’être inséminée, on a recours à l’utilisation de l’azote liquide (gaz refroidi). Cet élément chimique permet de maintenir la semence sous grand froid, à -196°C, ce qui correspond à la température de l’azote. En effet, il a pour avantage d’inhiber les spermatozoïdes de l’animal. Cette technique est surtout utile, lorsqu’il s’agit de se déplacer sur le terrain avec la semence et procéder à l’insémination artificielle auprès des producteurs et éleveurs.

Ces derniers sont également formés par les techniciens de la station à la pratique de l’insémination artificielle, pour ceux qui font la demande. De l’avis du responsable de la station de Loumbila, l’insémination artificielle est une activité qui suscite beaucoup d’engouement de la part des producteurs qui veulent multiplier leurs animaux. Il rassure de la disponibilité de ses services à répondre aux sollicitations dans ce sens. Au vu de cette donne, Dr Kaboré indique que bientôt les autorités prendront un décret pour l’opérationnalisation de la vente des semences. En attendant, pour bénéficier de l’insémination artificielle sur le terrain, de la part des agents de la station, il est demandé aux éleveurs la somme de 30 000 F CFA. Ce coût, en réalité, résulte d’une subvention de l’Etat.

Au sujet des races de porcs, objet de multiplication à Loumbila, le DRGMAP a laissé entendre que c’est la race Large white qui est la plus prisée par les éleveurs périurbains de Ouagadougou, en raison de ses performances en matière de fourniture de viande de qualité. « Tous ces endroits de porc au four que vous voyez, commercialisent de la viande issue de cette race de porc. Ainsi donc lorsqu’on insémine cette race avec celle locale, il en résulte des produits intéressants en matière de production de viande », explique Arnaud Stéphane Tapsoba.

…se distinguent par la qualité de leur viande et de leur production laitière.

A l’instar des porcins, la multiplication des bovins, deuxième catégorie d’animaux concernés, suit le même procédé de recueillement de semence pour insémination. Chez les bovins, les races concernées sont la Montbéliard et la Tarentaise. De l’avis de Dr Tapsoba, ces deux races sont capables de produire 300 à 400 mille poches de semence annuellement. A la station de Loumbila, les bovins se remarquent aussi par le poids. On en dénombre de 900 kg, voire une tonne.
Il y a aussi des races issues de croisement. Il s’agit par exemple de la Brune des Alpes, la GIR, la Holstein.

Ces différentes races de bovins se démarquent par leur stabilité et leur performance dans la production de viande et de lait.
De l’avis de Dr Tapsoba, ces différentes races de porcins et de bovins font partie de la grande race pure d’animaux. Elle est obtenue directement à la station de Loumbila, par manipulation biotechnologique, encore appelée transfert d’embryon. « Des embryons d’un animal pur sont collectés puis implantés par exemple dans l’utérus d’une vache locale et c’est le résultat qui donne la race pure », explique Arnaud Stéphane Tapsoba

Confronté à la pression foncière

A la création de la station de loumbila en 1975, l’objectif était destiné à la stabulation et à l’exportation des animaux sur pied. A l’époque, le site s’étendait sur 6 500 ha. Du fait que l’endroit n’est pas clôturé, on enregistre des installations anarchiques de particuliers qui exploitent des bandes de terre, pour des activités de maraîchage. Conséquence, la superficie du domaine est progressivement réduite. De plus de 6 000 ha, il y a presque une cinquantaine d’années, le site ne s’entend, de nos jours, que sur environ 125 ha. Une réduction drastique qui amène le responsable des lieux à tirer sur la sonnette d’alarme.
L’autre difficulté à laquelle le site est confronté est la vétusté des bâtiments.

En août 2023, la station de Loumbila a reçu la visite des ministres en charge de l’agriculture et délégué en charge des ressources animales. Ils ont pu constater les différents problèmes soulevés. Au sujet de la prédation foncière, des instructions ont été données pour remédier à la situation. Néanmoins, Dr Tapsoba conseille aux acquéreurs de parcelles à proximité de la station d’élevage d’être prudents. Car, en cas de litige, il sera difficile pour l’Etat de laisser filer une portion de périmètre qui lui appartient.
Il y a aussi l’éternel problème du financement des activités de la structure. Notamment

Dr Arnaud Stéphane Tapsoba (milieu), assisté de ses collaborateurs, déplore la pression foncière qui menace le domaine de Loumbila.

pour ce qui concerne l’acquisition des hormones pour les inséminations et l’aliment pour bétail. En effet, l’acquisition de fourrage constitue l’un des points des dépenses les plus importantes, surtout pour les animaux qui ne vont pas en pâturage, malgré l’existence de parcelles de production de fourrage sur place.

A ce niveau, l’insuffisance du financement de l’Etat est souvent compensée par la contribution de divers partenaires techniques et financiers. La Direction des ressources génétiques animales et de la multiplication des animaux performants (DRGMAP), nouvellement créée en mars 2023 est subdivisée en antennes régionales. L’antenne régionale du centre comprend la station de Loumbila, qui est fonctionnelle, et celle de Komki-Ipala, en cours d’érection.

L’antenne régionale de l’Ouest, avec les stations de Banankélédaga et de Samendéni. Les antennes régionales du Sahel et de l’Est avec respectivement les stations de Sambomaye et de kikidéni qui sont à l’arrêt du fait de l’insécurité dans ces zones. Sa mission principale est la production de matières génétiques performantes, notamment les animaux sur pied, la semence et les embryons. Mais c’est seulement la station de Loumbila qui a la capacité de collecter de la semence grâce à son laboratoire de biotechnologie animale. C’est aussi à Loumbila que se fait la collecte des animaux performants pour desservir ensuite les autres antennes régionales.

Gabriel SAMA