Promotion de l’agro-écologie: les bio-fertilisants et bio-pesticides pour une production saine

Pour la DGA, Martine Sawadogo, Bioprotect fait la promotion de l’agro-écologie, respectueuse de l’Homme et de l’environnement.

L’utilisation des pesticides et des engrais chimiques a des effets néfastes sur l’environnement et la santé humaine et animale. Des voix s’élèvent de plus en plus pour dénoncer cette évidence et encourager le retour à une agriculture écologique. Parmi elles, il y a Bioprotect, une entreprise de production et de commercialisation de bio-fertilisants et de bio-pesticides. Zoom sur son unité de production située à Sabtenga, à quelques encablures de la capitale, Ouagadougou.

Bioprotect est une entreprise burkinabè de production et de commercialisation d’intrants organiques à base de ressources naturelles locales. En compagnie de la Directrice générale adjointe (DGA), Martine Sawadogo (son époux Arsène Sawadogo étant le directeur général), nous avons pu toucher du doigt les réalités de travail sur son unité de production à Sabtenga, à la sortie-nord de Ouagadougou. Dès l’entrée du site, on aperçoit une variété d’étals en vrac : des tas de graines de neem, des déjections d’animaux, des pulpes d’orange, des stocks de produits finis, etc. « Tous ces éléments que vous voyez sont transformés en fertilisants. Ce sont entre autres de la bouse d’animaux, des graines de neem, des os d’animaux calcinés, transformés en poudre ou en granulés. C’est une autre manière de contribuer à rendre la ville propre », lance-t-elle. L’unité produit une gamme variée de fertilisants organiques et de bio-pesticides. Au regard de la dégradation des sols due en partie à l’utilisation des produits chimiques, fait savoir Mme Sawadogo, Bioprotect œuvre à la promotion de l’agro-écologie.

A l’écouter, c’est une autre façon de cultiver qui respecte l’Homme, l’environnement et la plante. C’est pourquoi, l’entreprise propose des bio-pesticides qui luttent contre les maladies et les ravageurs des cultures, des bio-fertilisants qui vont permettre de dynamiser le sol et d’améliorer sa structure et sa qualité de façon durable. Selon Martine Sawadogo, le fournisseur de fertilisants organiques et de bio-pesticides se donne pour mission de contribuer au développement de l’agriculture biologique au Burkina Faso. Les objectifs visés sont, entre autres, d’assurer la production, la promotion et la distribution  de produits inoffensifs aux agriculteurs. Ces produits sont des bio-stimulants et fertilisants des sols d’origine biologique. Ce sont aussi des produits de protection des végétaux efficaces contre les ravageurs des plantes. Offrir aux agriculteurs une alternative durable à l’utilisation d’engrais et de pesticides chimiques très polluants fait également partie des objectifs.

Les produits

Des bio-pesticides fabriqués par Bioprotect.

Albert Kafando fait partie des employés de Bioprotect. Apprenant de l’école agronomique de Matourkou, il présente certains pesticides. Selon lui, le Vitasol lutte contre les maladies fongiques et améliore la qualité du sol. Fait à base d’un champignon appelé trichoderma, il est conseillé de l’utiliser pour pulvériser le sol ou le mélanger dans le compost avant le repiquage ou avant de placer la pépinière. Grâce à ses propriétés répulsives, ovicides et larvicides, le HN lutte efficacement contre une gamme variée de ravageurs comme les vers de terre, les papillons… On l’utilise comme préventif et curatif. Quant à la poudre de neem, elle est efficace contre une gamme variée d’insectes. La poudre est également utilisée avec succès dans la conservation du niébé. Le vitaplan est un autre produit qui améliore la vie de la plante. Selon le technicien, il repousse les ravageurs et lutte contre certaines maladies.

«Le Superfruit et l’Epivert  sont des engrais organiques issus de la déjection animale. Sous forme de liquide, leur rôle est d’améliorer la vie des plantes. On les pulvérise sur les plants qui commencent à avoir des feuilles», explique M. Kafando. Ces produits sont présentés dans des bidons de 0,5 à 1 litre. Pour en tirer profit, Albert Kafando conseille de vérifier d’abord et toujours la date de fabrication et de bien secouer pour que le mélange soit homogène. Puis l’utilisation se fait selon les indications données. On peut se les procurer par exemple dans des boutiques de l’entreprise à Ouagadougou. Le technicien ne tarit pas d’éloges pour les bienfaits de leurs marchandises sur les plantes. « On conseille l’agro-écologie, une agriculture qui aide à restaurer, à prémunir et à garantir le sol. Elle procure des cultures saines à l’abri de certaines maladies avec une longue durée de conservation », dit-il. La liste des solutions Bioprotect est longue et leur notoriété a dépassé les frontières du pays. « Nous faisons des livraisons en Côte d’Ivoire, au Togo, au Mali, … », affirme la patronne.

La demande est de plus en plus forte et la production va croissante. Le chargé de production des intrants et bio-pesticides, Ousseini Bokoum, informe que la production journalière varie en fonction de la demande. Au minimum 30 tonnes par jour de compost enrichi, 2 000 litres par semaine de produits de traitement. Selon lui, tout dépend de la commande. Quand elle est forte, elle peut atteindre 5 000 litres. Dans cette unité de Sabtenga, il y a une quinzaine de permanents dont cinq femmes. Ils y travaillent tous les jours sauf les dimanches et jours fériés de 7h30 à 17h. En cas de grandes commandes, on peut recruter une soixantaine de prestataires saisonniers.

Une activité rentable

Selon le chargé de production, Ousseini Bokoum,  la production journalière de compost enrichi atteint au moins 30 tonnes.

C’est une activité rentable à plusieurs niveaux, foi de Mme Sawadogo. La raison, selon elle, est la satisfaction morale, économique et sociale, ainsi que l’impact positif sur l’environnement. La DGA qui est agronome de formation se rappelle le début de l’aventure qui remonte à 2011. « Face à la sécheresse et à la dégradation continue des sols, mon époux (Arsène Sawadogo) a voulu faire quelque chose pour accompagner les producteurs dans le domaine du traitement et l’amélioration des sols. Comme on ne peut produire sans traiter, on s’est lancé dans la production des bio-pesticides», raconte-t-elle. C’est ainsi qu’a été créé le trichoderma qui a eu un grand succès auprès des producteurs. Mélangé au compost, il permet de protéger le système naturel des plantes.

On a abouti plus tard, avec l’appui des femmes, à la mise en place des unités rurales de compostage dans des villages, une sorte de banque de matière organique. La demande était forte. Pour satisfaire la clientèle, une unité de production est installée à Boussé (45 km de Ouagadougou), puis à Sabtenga. « Au début, on faisait 100 tonnes par an et aujourd’hui on a atteint 2 000 ou 3 000 tonnes. De la fabrication du compost, on est passé à celle des engrais », confie-t-elle. Elle se souvient aussi que c’est avec un fonds personnel d’environ 30 000 F CFA, qu’ils ont démarré leur business en 2011. Aujourd’hui, le chiffre d’affaires tournerait autour de 20 millions F CFA par mois. Grâce aux levées de fonds, aux prestations de services, à l’accompagnement de l’Etat à travers des projets, des crédits et aux investisseurs, ils arrivent à atteindre leurs objectifs. Sans oublier l’appui de certains partenaires dont OXFAM Burkina, PAM, Synergie, l’ARFA (Association pour la recherche et la formation), …

En reconnaissance à ses efforts fournis, Bioprotect a été lauréat de plusieurs prix nationaux et internationaux. Par exemple en 2013, il était parmi les lauréats des Journées de l’entreprenariat burkinabè. En 2011,  le prix SEED du Programme des Nations unies pour l’environnement lui a été décerné. En 2023, Mme Sawadogo est lauréate du prix Développement durable, secteur de l’agriculture, décerné par WELA (Women empowerment and leadership agora). Ce prix international récompense les efforts exceptionnels des organisations et des personnes en faveur de l’égalité du genre et l’autonomisation des femmes en Afrique. Au-delà de produire et de commercialiser les intrants bio, Bioprotect offre d’autres services.

Séance de sensibilisation de femmes sur les conséquences liées
à l’utilisation des intrants chimiques de synthèse.

Il s’est lancé dans la culture, la transformation et la commercialisation des produits du cru (tomate, haricot vert, oignon, sésame, …). La fourniture de prestations de services (appui technique, formation, assistance, conseils) au profit des personnes physiques ou morales, désireuses de se lancer dans la production biologique, fait également partie des activités de la structure. Les responsables se sont donné pour mission de toucher le cœur de maximum de producteurs. C’est ainsi qu’en collaboration avec des partenaires, ils forment et encadrent des producteurs pour l’adoption de pratiques agro-écologiques, sur la détection et la prévention des problèmes phytosanitaires des plantes, ainsi que le contrôle des ravageurs en agriculture biologique.

Comme toute œuvre humaine, le promoteur des bio-intrants fait face à des goulots d’étranglement. L’adoption de toute innovation est compliquée parce qu’il faut rompre avec les vieilles habitudes. C’est le cas avec des agriculteurs habitués à l’utilisation des produits chimiques concurrents. Mme Sawadogo déplore les subventions que l’Etat continue d’accorder pour l’achat de ces produits chimiques. Pour elle, il est difficile d’être compétitif vis-à-vis de ces fabricants qui mettent sur le marché des solutions à des prix relativement bas. « On ne reçoit pas beaucoup de commandes venant de l’Etat concernant les engrais. On souhaite que la donne change. Plus on gagne des commandes, plus il y aura sans doute des emplois», soutient-elle. L’autre difficulté évoquée est inhérente à la crise sécuritaire. Vu que les activités agricoles sont à l’arrêt dans certaines localités, les ONG ne font plus de commandes. La DGA de Bioprotect n’oublie pas de signaler que son site de production est exigu. Son souhait est de pouvoir booster sa production à 50 000 tonnes l’année et de voir 50% des producteurs utiliser les fertilisants et les pesticides bio.

Habibata WARA


Les produits phares

SOLSAIN : Engrais organique ensemencé du champignon Trichoderma qui s’installe autour des racines des plantes, créant une barrière protectrice contre les champignons pathogènes du sol.
PLANTSAIN : Engrais qui contient des arômes extraits du champignon bénéfique Trichoderma qui contribuent à la fluidification de la sève, ce qui permet de limiter la pénétration de population de champignons pathogènes.
LIMOSAIN : Engrais riche en extraits d’orange qui ont la propriété d’assécher les carapaces des insectes.
PIOL : Il contient des extraits de piment, d’ail et d’oignon qui exercent une action répulsive sur les insectes mais aussi permet de les éradiquer complètement.
HN (Huile de neem): Elle est composée essentiellement d’huile de neem. Grâce à ses propriétés répulsives, ovicides et larvicides, HN lutte efficacement contre une gamme variée de ravageurs. HN est aussi efficace dans la conservation des graines de niébé.

H.W.


Les conseils d’une agronome pour une bonne production

« -Suivre les itinéraires techniques de production
-Eviter les brûlis dans les champs. Utiliser le compost comme fumure de fond avant de labourer.
-Choisir la bonne semence. Car, elle détermine 40% de succès dans la production.
-Etre à temps : le temps compte beaucoup. Un retard d’une semaine équivaut à beaucoup de pertes, car chaque jour compte. Si on conseille par exemple de semer le 1er juin, il faut tout faire pour être dans la fourchette du 1er au 7 juin. Si on sème vers le 15 juin, il y a risque d’être victime de retard de pluie.
-Respecter le dosage du compost. On doit préparer les champs. Il n’y a pas de mauvais sol, il faut l’alimenter. Deux semaines après le semis, il faut sarcler. Sinon les mauvaises herbes risquent d’envahir le champ.
-Respecter le traitement. Eviter de faire de l’à-peu-près. On conseille de traiter par exemple le niébé au bout de 35-40 jours. Les producteurs doivent miser sur la qualité au lieu de la quantité.  Une petite superficie est facile à gérer et peut donner un bon rendement ».

H.W.