Aires et territoires des patrimoines autochtones et communautaires

Les Aires et territoires des patrimoines autochtones et communautaires (APAC) sont une approche de conservation de sites naturels protégés par et pour les communautés. Ces APAC sont des forêts, des rivières sacrées, des réserves de passage et pâturage pour bétail ou tout autre site naturel souvent abandonnés au profit de facteurs de dégradation. Au Burkina Faso, 53 000 APAC ont été identifiés à ce jour par l’association Nature et développement (NATDEV).

L’origine des Aires et territoires des patrimoines autochtones et communautaires (APAC) remonte en 2008 où des spécialistes du domaine de la conservation de la biodiversité ont fait le constat qu’à travers le monde, un accent est mis sur les forêts nationales, notamment celles classées. Ces sites pour lesquels les communautés ont consacré d’énormes efforts, étaient moins vus, moins reconnus et moins soutenus. Dans un sursaut d’orgueil, ces spécialistes ont décidé d’engager une lutte mondiale pour prendre en compte ces sites. C’est ainsi qu’une association mondiale APAC a été formalisée en 2010. Elle regroupe 70 pays, dont le Burkina Faso. Pour qu’un site réponde aux critères APAC, il faut qu’il soit important pour la communauté du village ou de villages auquel il appartient. Qu’il y ait un lien avec la population de sorte que cette dernière se batte pour défendre ce site. Il faut que la gouvernance soit communautaire de manière que les décisions viennent du village ou du groupe de villages en se conformant aux règles établies. Enfin, il faut que les actions menées par la communauté dans le cadre de cette nouvelle approche conduisent à la conservation de la biodiversité.
Débutée au Burkina Faso en 2017 avec la désignation d’un point focal national du consortium mondial en la personne du Dr Alexis Kaboré de l’association Nature et développement (NATDEV), l’approche APAC consiste à la reconnaissance, à la sécurisation, à la visibilité et au partage afin qu’elle serve d’exemple ailleurs.

Quatre types d’APAC dénombrés

A ce jour, on dénombre quatre types d’APAC au pays des Hommes intègres. Il s’agit des sites sacrés, les forêts villageoises, les espaces pastoraux communautaires et les Zones villageoises d’intérêt cynégétique (ZOVIC). Selon Dr Alexis Kaboré, 53 858 sites ont été identifiés couvrant une superficie de 721 527, 98 hectares (ha) dont 951 sites documentés (69 forêts villageoises, 89 espaces pastoraux communautaires, 121 points d’eau sacrés, 672 bois sacrés). Concernant les exemples d’APAC emblématiques au Burkina Faso, l’on peut citer le bois sacré du village de Kalwaka (82 ha) dans la région du Centre-Ouest, les ZOVIC de Sadpenga (226 ha) à l’Est et de Saro (861 ha) au Centre-Sud et les points d’eau sacrée comme la mare aux crocodiles sacrés de Bazoulé. A ceux-ci, il faut ajouter les espaces pastoraux communautaires, notamment la mare pastorale de Daroye Wara-Wara (3000 ha) dans le Sahel et l’aire de pâture de Namoungou (12197 ha) à l’Est. L’exemple du bois sacré du village de Kalwaka (2800 habitants) est célèbre au Burkina Faso du fait du nombre important de sites naturels conservés avec une quinzaine de bosquets sacrés présents sur son territoire. Ces sites naturels sont de petites brousses (entre 0,5 et 10 ha de superficie) abritant une grande diversité d’espèces végétales, d’animaux sauvages et de poissons. Certains recouvrent des collines tandis que d’autres abritent des points d’eau (mares ou puits). Mais également, l’approche a permis une mobilisation exemplaire de la population pour la défense de ces APAC. Le succès avec lequel la population a empêché l’implantation d’un projet d’exploitation aurifère dans un de ses bois sacrés a fortement contribué à sa renommée nationale. Pour une meilleure gestion de ces sites, la population organise des Assemblées générales de village (AGV) considérées comme des instances incontournables dans la gouvernance des APAC. Elles sont également des espaces de partage des connaissances sur les APAC, leur histoire, ce qui les lie aux membres de la communauté et les valeurs et normes dans lesquelles est ancrée leur gouvernance. Du plus jeune au plus vieux, hommes comme femmes, autorités coutumières et religieuses, instituteurs en poste dans le village, toutes les composantes sociales sont largement représentées. De nombreux ressortissants du village vivant dans les villes à l’intérieur du pays ont fait le déplacement, tout comme les autorités communales et des personnes venues des villages voisins.
En somme, les APAC sont importantes pour la cohésion sociale des communautés et pour leurs identités. En tout état de cause, les autorités doivent accorder une attention particulière aux APAC. De manière concrète, à côté de la reconnaissance légale, il faut protéger les APAC et les communautés contre les menaces.

Paténéma Oumar
OUEDRAOGO
pathnema@gmail.com

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