Allemagne : Les défis de Olaf Scholz

L’ère Angela Merkel s’est refermée en Allemagne. Après 16 ans au pouvoir, la très médiatique chancelière a cédé sa place, hier mercredi 8 décembre 2021, à son successeur, Olaf Scholz, 63 ans. Conformément aux usages démocratiques dans ce pays, celui-ci a été élu sans difficulté par 395 des 736 députés du Parlement, la Bundestag.

Il lui fallait 369 voix pour être élu, ce que le parti de Olaf Scholz, le SPD, arrivé en tête aux législatives, avec 206 sièges, n’avait pas. Mais il a pu bien évidemment compter sur le soutien de ses deux nouveaux partenaires de coalition, les Verts (118 sièges) et les libéraux du FDP (92 sièges). Le 9e chancelier allemand, qui a prêté serment quelques heures après son élection, a désormais les coudées franches pour conduire un gouvernement, composé pour la première fois par autant d’hommes et de femmes et résultant d’une coalition inédite. Angela Merkel aura passé toutes ses années à la chancellerie à apporter sa pierre à l’édification de la première économie de l’Union européenne.

A Olaf Scholz, le nouveau maitre de Berlin, de jouer maintenant sa partition, dans l’optique de conduire l’Allemagne vers des lendemains plus reluisants. Les défis sont nombreux et de taille. Le socio-démocrate devra d’abord poursuivre la lutte contre la pandémie de la COVID-19, qui sévit toujours en Allemagne. La quatrième vague de la pandémie, qualifiée de « hautement dramatique » par Angela Merkel avant son départ du pouvoir, a frappé le pays, avec les conséquences qui vont avec. Concernant la semaine du mercredi 1er au mardi 7 décembre 2021, les chiffres officiels indiquent 52 054 nouveaux cas et 270 morts en moyenne chaque jour. Alors que 69,4 % de la population était complètement vaccinée contre la COVID-19, à la date du 7 décembre 2021. Le pays le plus peuplé d’Europe (83, 24 millions d’habitants en 2020 selon la Banque mondiale), qui compte sur la vaccination pour se tirer d’affaire, a durci le ton, avec dans le viseur, les personnes non vaccinées. Avec une vie sociale déjà limitée, les non-vaccinés ne sont pas au bout de leurs peines. Le 2 décembre dernier, le gouvernement allemand a pris d’autres mesures plus drastiques à l’encontre de cette population cible.

Sur l’ensemble du territoire national, les non-vaccinés n’ont plus accès aux bars, restaurants, théâtres, cinémas, salles de spectacle ou de sport. Ils ne sont pas non plus les bienvenus dans les commerces non essentiels et les marchés de Noël, avec l’interdiction formelle d’être en contact avec plus de deux personnes d’un autre foyer. Berlin mesure les conséquences désastreuses du coronavirus sur l’économie et n’entend pas transiger avec les non conformistes. Les partisans de l’extrême droite sont foncièrement contre la vaccination, et il va falloir jouer des coudes pour les amener dans les rangs. Il est un fait, que l’activité économique est en pleine relance en Allemagne, mais les difficultés d’approvisionner en bois, plastiques, acier et composants électroniques pourraient contraindre les autorités à revoir leurs prévisions à la baisse. L’heure n’est pas vraiment au grand optimisme dans le pays.

La production manufacturière allemande a chuté de 1% sur un mois, en avril dernier, tandis que le moral des investisseurs a affiché une baisse surprise de 4,6 points en juin passé. Olaf Scholz va devoir donc se montrer intraitable, pour mettre un frein à la hausse exponentielle des nouveaux cas de contamination. L’économie allemande, qui fait des jaloux au-delà des frontières, en dépend fortement. Olaf Scholz devra aussi travailler à redonner à l’Allemagne un nouveau visage, en se penchant sur ses infrastructures vieillissantes, en rendant plus performante son administration et en rattrapant le retard constaté dans le domaine de la transition numérique. Le nouveau chancelier est également attendu sur la scène internationale, avec les soucis géopolitiques impliquant la Russie et la Chine. Selon les observateurs avisés, Olaf Scholz devrait se montrer plus ferme, qu’Angela Merkel à l’égard de la Russie, qui n’a pas encore renoncé à sa légendaire politique d’annexion, en violation du droit international. L’énigmatique Poutine a envoyé des troupes militaires importantes aux frontières de l’Ukraine, ce qui laisse entrevoir une éventuelle agression, connaissant ses méthodes.

Olaf Scholz a quatre ans, pour se montrer à la hauteur des défis qu’il connait déjà, puisqu’il était ministre des Finances et vice-chancelier depuis 2018. Il est n’est donc pas en terrain inconnu. Les rouages de l’administration allemande n’ont aucun secret pour lui. Il devrait, par conséquent, se sentir comme un poisson dans l’eau. Olaf Scholz sera-t-il mieux qu’Angela Merkel, qui s’est plutôt montré conservatrice que réformatrice ? La balle est dans son camp…

Kader Patrick KARANTAO

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