Analyse du discours du chef de l’Etat : un esprit de combativité

Tout comme il était attendu, le message de nouvel an du Président de la Transition, le capitaine Ibrahim Traoré, a marqué les esprits. Cette adresse n’a pas laissé indifférents les Burkinabè qui traversent des moments difficiles, aussi bien dans la forme que dans le fond. Habillé en tenue de combat, comme il en a l’habitude, l’air grave, le chef de l’Etat a choisi de parler à la Nation depuis Solenzo, chef-lieu de la province des Banwa.

Libérée du joug des terroristes début décembre 2022, cette localité où le capitaine Traoré s’est rendu par la route, selon certaines sources, est devenue le symbole de la reconquête du territoire national. Quoi de plus normal que le chef de guerre, qu’il est, jette son dévolu sur Solenzo pour « saluer la bravoure de ces hommes qui ont mené cette opération afin de reconquérir cette ville ».

Le président de la Transition attache particulièrement du prix à la reprise des localités sous contrôle terroriste, un indicateur clé dans le combat contre les forces du mal. Le capitaine Traoré ne s’est-il pas engagé, dès sa prise du pouvoir le 30 septembre 2022, à débarrasser le Burkina Faso des groupes terroristes qui l’assaillent ? La reconquête de Solenzo donne des signaux d’espoir, toute chose que le chef de l’Etat a voulu faire observer en y livrant un message de combativité.

Il a eu des mots d’encouragement à l’endroit des forces combattantes déployées sur l’ensemble du territoire national. En l’occurrence, les Forces armées nationales (FAN), les Forces de sécurité intérieure (FSI) et les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP). Aussi a-t-il exhorté les forces combattantes à aller de l’avant, la lutte contre le terrorisme étant une lutte de longue haleine.

« C’est le lieu pour moi de leur dire de ne jamais baisser les bras, jamais baisser les bras ; il faut protéger ces populations, il faut les défendre. Lorsque dans la journée, elles se battent pour chercher leur pain quotidien, que nous, nous soyons dans les brousses pour leur permettre de le chercher en toute sécurité. Et la nuit, lorsqu’elles seront endormies, que nous soyons encore dans la brousse pour leur permettre de dormir tranquillement ; c’est notre mission, la mission du combattant, mission noble », a soutenu le capitaine Traoré.

Il a évoqué la réorganisation en cours de l’armée, notamment un changement de tactique des unités combattantes, ce qui leur permet de reprendre du poil de la bête. C’est de bonne guerre, étant donné que plus de 40% du territoire national est sous contrôle des groupes armés. « Dans la mentalité des combattants, la tactique a déjà changé, en témoignent çà et là, les victoires sur le terrain.

Cela leur donne donc du moral, cela leur prouve qu’ils sont au-dessus, qu’ils sont capables », s’est réjoui le capitaine Traoré. Un changement de stratégie fera suite « dans les jours à venir » à celui de tactique, a-t-il assuré. La réorganisation de l’armée, foi du chef de l’Etat, s’accompagne aussi d’une politique d’acquisition d’équipements et de logistique qui devrait incessamment s’intensifier.

« Le souhait pour nous, c’est que lorsque les populations demandent les forces, qu’elles soient présentes », a indiqué le capitaine Traoré qui entend, par ailleurs, mettre en place un programme urgent d’investissements en infrastructures routières pour accompagner l’élan de guerre. Tous les aspects sont pris en compte par le président de la Transition, décidé à se donner les moyens pour venir à bout de l’hydre terroriste. Il suscite beaucoup d’espoir auprès des populations qui n’en peuvent plus de vivre l’enfer sur terre depuis plus de sept ans.

Parallèlement à son serment de « casser » du terroriste, le capitaine Traoré entend livrer un autre combat, celui de la bonne gouvernance. « La gouvernance a longtemps piétiné. Nous sommes dans un processus intense contre la corruption et les biens mal acquis. La justice et les contrôleurs ont reçu carte blanche pour commencer à mener la lutte contre la corruption et cela peut se sentir déjà sur le terrain. Je les encourage à continuer le travail et à pouvoir nous aider à changer notre système de gouvernance », a-t-il mentionné à ce sujet.

Un cadre de concertation pour la refondation de la Nation sera bientôt lancé. La société burkinabè souffre de plusieurs maux, à telle enseigne qu’une thérapie de choc est nécessaire. Les détournements de deniers publics sont légion sous nos cieux, mais les auteurs ne sont pas nombreux à rendre gorge. Le népotisme, la concussion, le favoritisme et autres tares gangrènent l’administration publique. Il n’y a quasiment plus de repères pour les jeunes générations, si ce n’est la culture de l’imposture. Le tableau est sombre, malgré certaines avancées.

Le capitaine Traoré a du pain sur la planche. Il a impérativement besoin de l’accompagnement de ses compatriotes de l’intérieur et de l’extérieur pour changer le visage du pays. N’a-t-il pas lancé un appel dans ce sens ? Les Burkinabè ont à choisir entre se donner la main pour faire face à l’adversité et persister dans leurs guéguerres et couler ensemble. « Le destin n’est pas une question de chance. C’est une question de choix : il n’est pas quelque chose qu’on doit attendre, mais qu’on doit accomplir », disait l’homme politique américain, William Jennings Bryan.

Kader Patrick KARANTAO

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