Communauté de destin

Le Mali, le Burkina Faso et le Niger sont depuis quelques temps, dans l’œil du cyclone, du fait des attaques terroristes aux bilans macabres, perpétrées par Ansar Dine, le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO), la katiba Macina, Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) … et, de plus en plus, l’Etat islamique au grand Sahara.

Les analystes s’accordent à indexer la situation libyenne comme étant à l’origine de cette déferlante violence contre les populations civiles, les Forces de défense et de sécurité (FDS) et les symboles des différents Etats. La zone des trois frontières, dont les groupes terroristes ont pris le contrôle, leur offre aujourd’hui une force de nuisance insoupçonnée, ce qui leur permet d’étendre les actions criminelles et de trafics d’armes, de munitions, de drogues, de cigarettes et d’êtres humains, notamment. Dans leur progression, les terroristes pourraient étendre leur terreur aux pays côtiers, pour mieux sécuriser et amplifier leurs trafics en accédant aux débouchés maritimes.

Dans ce contexte, plusieurs pays côtiers ont visiblement compris l’adage qui dit que « quand la case du voisin brûle, la vôtre aussi est en danger ». Le Ghana, le Bénin et la Côte d’Ivoire ont plusieurs fois participé à des opérations conjointes, de part et d’autre, de leurs frontières avec des Etats sous menace terroriste comme le Burkina Faso, le Niger et le Mali.

Dans ce sens, l’ampleur de la situation au Burkina Faso et au Mali est prise au sérieux par la Côte d’Ivoire, d’autant plus qu’elle partage en tout, 1 116 km de frontières avec ces deux pays. Certes, depuis l’attaque de Grand Bassam en 2016, le pays vit une apparente accalmie, mais le sujet préoccupe au plus haut niveau les autorités ivoiriennes, au point qu’en fin d’année 2019, une opération « Frontières étanches » a mobilisé plus de 300 militaires pour prêter main forte à la police et à la gendarmerie au Nord du pays.

L’enjeu était de taille, puisque la France a « formellement déconseillé » à ses ressortissants d’aller dans la zone frontalière entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso, « en raison du risque terroriste et d’enlèvement ». Le récent séjour du chef d’Etat-major des forces armées ivoiriennes, le général de corps d’armées, Lassina Doumbia, au Burkina Faso, a fini de convaincre que l’union des forces est l’ultime solution dans la lutte contre le terrorisme.

« La lutte contre le terrorisme ne peut se faire seule. Il faut forcément une réponse collective, surtout que la Côte d’Ivoire et le Burkina ont une frontière d’à peu près 500 km à partager », avait- il fait savoir. Le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire partagent une communauté de destin, parce que liés par l’histoire, la culture, l’économie et la géographie.

Du reste, le Traité d’amitié et de coopération (TAC) s’évertue à perpétuer ces liens depuis 2008. En vertu de cette fraternité entre les peuples, le président ivoirien, Alassane Ouattara, doit davantage s’impliquer dans la mobilisation des ressources en faveur du G5 Sahel, en vue de l’opérationnalisation de la force conjointe dans la lutte contre le terrorisme dans la région. La stabilité de la Côte d’Ivoire en dépend. Le Burkina Faso est une sorte de digue pour les pays côtiers dans « l’avancée » du terrorisme et il y va de l’intérêt de tous que cette barrière ne cède pas.

En plus des opérations d’envergure pour sécuriser les territoires nationaux, au-delà des échanges de renseignements, les pays côtiers doivent contribuer en hommes à la mise en place de la prochaine « Coalition pour le Sahel », décidée lors du Sommet de Pau en France, le 13 janvier 2020. Cela est d’autant plus nécessaire que, les actions individuelles des pays ont montré leurs limites dans le combat contre le terrorisme.

 Jean-Marie TOE

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