En attendant le nouveau cap

Régulière, transparente et sincère. La décision du Conseil constitutionnel tient en trois mots. Après examen des 33 recours reçus, les grands juges ont livré, hier dimanche au cours d’une audience solennelle, les résultats définitifs des élections législatives du 22 novembre 2020. Les sages ont confirmé les résultats proclamés par la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Ainsi, le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), parti majoritaire, s’adjuge 56 sièges de députés, suivi du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) avec 20 sièges, du Nouveau temps pour la démocratie (NTD) avec 13 sièges et de l’Union pour le progrès et le changement (UPC), 12 sièges. Quarante-huit heures auparavant, le Conseil constitutionnel, qui n’a pas enregistré de recours, proclamait, le vendredi 18 décembre, les résultats définitifs de l’élection du président du Faso. Le candidat Roch Marc Christian Kaboré est élu dès le premier tour avec 57,74% des suffrages exprimés, soit 1 645 229 voix. Cette proclamation définitive met fin au processus électoral et ouvre celle de la mise en place des nouvelles institutions. En ce qui concerne l’Assemblée nationale, les nouveaux élus se réunissent après la proclamation définitive des résultats du scrutin, en principe, pour valider leurs mandats et élire leur président. En attendant, les premiers enseignements de la vérité des urnes interrogent. Sur 126 partis politiques en lice, seuls 15 ont obtenu des sièges. Sans denier aux autres partis le droit de proposer leurs offres politiques, ces résultats reposent la question de la rationalisation du système partisan burkinabè…Faut-il continuer à ouvrir des guichets spéciaux à l’orée de chaque échéance électorale pour délivrer des récépissés de création de nouveaux partis dont la plupart, suite à des frustrations politiques ? La question sera posée d’une façon ou d’une autre au cours du quinquennat à venir et appellera des réponses structurelles pour qu’enfin nous sortions de « ces spectacles piteux de candidats obligés de masquer leur manque d’assise populaire derrière la prétendue gloutonnerie des populations traitées de passage de vénales alors que lesdites populations ont prouvé… qu’elles avaient une claire perception des enjeux capitaux du moment ». Cette perception populaire des enjeux du moment est la principale leçon des résultats de l’élection présidentielle. Le président sortant remporte le scrutin au premier tour, contre vents et marées, à la grande incompréhension d’une partie de la classe politique qui rongeait les freins à l’idée de tirer profit de l’insécurité grandissante. En effet, le Burkina Faso est devenu le pays sahélien le plus ciblé par les attaques terroristes avec son cortège de victimes civiles et militaires, sans que cela ne suscite le moindre sentiment chez certains, prompts à critiquer le pouvoir en place. Pour sortir de la spirale, suffisait-il de procéder à une restauration de l’ordre ancien pour avoir la paix ? Ou passer la main à une autre génération de politiques impatients de prendre enfin le gouvernail ? La réponse s’est avérée très complexe, maturée et plus réaliste. A la classe politique de tirer les bonnes graines de ces résultats qui ne sont pas loin de traduire la sagesse africaine selon laquelle, quand la case du voisin prend feu, la nôtre aussi est menacée.
A ce propos, les récentes sorties médiatiques et les argumentaires aux relents parfois régionalistes de certains hommes politiques s’accommodent mal avec une période d’incertitudes, qui nécessite de recoudre le tissu social.
Il y a lieu donc d’appeler les Burkinabè, toutes tendances politiques confondues, à rester sereins dans l’attente du discours d’investiture et celui de fin d’année du président du Faso qui indiqueront le nouveau cap.

Mahamadi TIEGNA

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