Kayaba Ouédraogo directeur provincial en charge de l’agriculture du Sanmatenga : «L’hospitalité est la chose la mieux partagée au Burkina»

Dans cet entretien, Kayaba Ouédraogo, directeur provincial en charge de l’agriculture du Sanmatenga, se prononce sur l’accès des terres agricoles aux Personnes déplacées internes (PDI).

Sidwaya (S) : D’où est venue l’idée de récupérer des terres dégradées au profit des PDI?

Kayaba Ouédraogo (K.O.) : La crise sécuritaire a contraint des milliers de Personnes déplacées internes (PDI) à délaisser leurs terres agricoles pour trouver refuge dans des zones jugées «sécurisées». La plupart des PDI des régions du Centre-Nord et du Sahel sont à Kaya. Pour renforcer les mesures de leur prise en charge alimentaire, le Ministère de l’Agriculture et des Aménagements hydroagricoles (MAAH) et ses partenaires ont entrepris l’initiative de récupérer des terres totalement dénudées ou inexploitées. Au-delà de l’urgence, nous nous sommes dit qu’il faut les occuper avec des Activités génératrices de revenus (AGR). L’objectif étant de faciliter leur réinsertion sociale.

S : Comment êtes-vous arrivés à convaincre les propriétaires terriens ?

K.O. : C’est vrai que le Burkina Faso vit une pression foncière. Et, il est difficile de trouver des superficies cultivables pour ces milliers de PDI. Mais, étant donné qu’il s’agit de terres impropres à l’agriculture, les propriétaires terriens n’ont pas trouvé d’inconvénients, surtout qu’ils vont aussi bénéficier du soutien des partenaires. Car, il s’agit d’une prise en charge holistique qui prend en compte les PDI et leurs hôtes. L’autre raison est que la plupart de ces PDI ont un lien parental avec ces propriétaires terriens. Au préalable, nous avons aussi mené une campagne de sensibilisation envers les populations-hôtes, afin qu’elles acceptent secourir leurs compatriotes en détresse. Les propriétaires terriens n’ont pas exigé de compensation financière, car l’hospitalité est la chose la mieux partagée au Burkina Faso.

S. : Quelles sont les activités menées sur le terrain ?

K.O. : Nous avons d’abord initié des séances de formation en techniques culturales au profit de ces producteurs, afin qu’ils maîtrisent bien la technologie de récupération de terres dégradées. Il s’agit de faire en sorte que les PDI soient autonomes en formant des formateurs en leur sein. Elles ont appris comment déterminer les courbes de niveau, afin de pouvoir disposer les cordons pierreux ou les digues filtrantes. Ensuite, nous sommes passés à la phase pratique qui consiste à la réalisation du zaï, des demi-lunes, des cordons pierreux, etc. Pour créer des AGR au profit des PDI, des PDI ont procédé, soit au «Cash for food» (travail contre nourriture, en français), soit au «Cash for work» (travail contre argent).

Ce qui nous a permis de réaliser, dans la province du Sanmatenga, 11 659 hectares de zaï, 3 015 hectares de demi-lunes, 12 jardins scolaires, 8 périmètres maraîchers et 7 boulis. Après ces réalisations, nous sommes passés à la dernière étape qui consiste à mettre en valeur ces terres récupérées, en définissant le type d’exploitation, selon la nature ou le degré de dégradation. Pour les terres à vocation agricole, nous avons donné aux producteurs des semences de céréales et de légumineuses et de la fumure organique. Pour les activités pastorales, avec le soutien des agents de l’élevage, nous avons octroyé des semences fourragères, notamment l’andropogon (espèce herbacée), pour les aliments pour bétail.

Interview réalisée par E.S.

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