La politique, un deal hérétique ?

Sous nos tropiques, le meilleur moyen de donner de l’espoir au peuple est de lui faire croire que tout ira mieux demain. Mais demain n’étant pas loin, le peuple se rend compte aujourd’hui que hier n’était qu’un coup de vent. L’écho des promesses stériles retentit dans le cœur des désabusés qui crient à la tromperie.

Mais qui vous a dit que la politique était une discipline disciplinée au point d’être sage ? Qui vous a dit que la politique avait un brin d’éthique, allergique à l’hérésie et à la félonie ? Les amis d’hier qui s’étaient juré fidélité et loyauté crient leur divorce sur la place publique et c’est celui qui fait le plus de boucan qui est le maître du camp. Au gré de ses intérêts, il flirtera avec le «diable» tout en côtoyant les «saints».

Comment peut-on militer dans un parti, défendre les idéaux de ce parti, ne jurer que sur la tête du président du parti et quitter ledit parti sur fond de calomnie et d’injures ? Il y en a qui font des lapsus incongrus en appelant l’actuel président par le nom de son prédécesseur ! L’inconscient est un bon gardien. Pendant que l’épée de Damoclès plane sur nos têtes, on rampe pour battre campagne, avant l’échéance.

En politique, on parodie toujours ; on feint d’être, ce qu’on n’est pas ; on fait semblant de faire ce qu’on ne peut pas faire ; on jure d’agir en tapant du poing sur la table pour avoir des points, mais en vérité, c’est un parjure. On prendra demain des bains de foule avec les gueux sous paillotes pour avoir la voix des sans voix. On leur distribuera des T-shirt, pendant qu’ils attendent des couvertures pour être au chaud. On ira chanter fleurette à la veuve et à l’orphelin avec du pain rassis sans savoir combler le vide existentiel de leur quotidien.

Pendant que la boussole peine à montrer le nord, «Terminator» est attendu pour sauver «Sarah Connor» des griffes de la mort. Mais l’équation est à plusieurs inconnus ; la méthode de résolution est toujours en téléchargement, faute de connexion haut débit. Sous nos tropiques, faire de la politique, c’est faire du surplace «en jouant arrêté». Il suffit de créer des «institutions jumelles» qui se ressemblent et s’assemblent sans être ensemble ; elles finissent par se mêler les pinceaux au pied du tableau dans un conflit d’attributions sans gratification.

Pendant ce temps une société dite civile s’avilie de jour en jour entre compromis et compromission. Quand on a la bouche pleine on ne parle pas, on mange ! Il suffit donc de jeter un os au «chien méchant» affamé qui aboie sur tous les toits pour laisser la caravane passer en paix. Il suffit d’organiser en grande pompe des rencontres aux allures de course à la montre pour des retrouvailles sur fond de ripaille et sortir dire au peuple que la victoire est à portée de main. Drôle de pagaille !

Depuis que la politique est devenue un métier, il y en a qui sont passés maîtres dans l’autodéfense ou dans l’attaque. Ils sont sur toutes les chaînes de radio et passent dans toutes les télés. Ils sont à la Une des journaux entre frasques et bourrasques. Sur les réseaux sociaux de jeunes clavistes pigistes rompus dans la désinformation et la manipulation travaillent à redorer le blason du mentor en quête de virginité politique. Dans les bas quartiers de la plèbe, 2000 francs, un T-shirt et une casquette mal cousues suffiront pour ameuter le «cheptel» au moment venu.

Dans les hameaux de culture, quelques coups de vuvuzéla avec la complicité de quelques notables serviables seront d’un apport appréciable. Un sac de riz, nuitamment livré et quelques billets de banque craquants peuvent provoquer un effet d’entraînement. Surtout quand les ancêtres votent et voient à travers les murs, des urnes, il y a de quoi savoir voter utile pour éviter le courroux des aïeuls !

La démocratie est un apprentissage continu, mais lorsque les apprenants sont d’éternels redoublants dans la même classe, il faut reconnaître qu’elle restera un luxe entre de sales mains profanes. En attendant 2020, que le spectacle commence : démission pour «convenance abdominale ou digestive» retournement de veste en pleine campagne ; détournement de militants déçus achetés au rabais au «marché de bétail électoral»…

La politique est devenue un deal ; un fonds de commerce entretenu par des vendeurs ambulants aux promesses mirobolantes et d’ignorants acheteurs myopes. Le discours politique est de nos jours avarié et malgré les adjuvants qui l’assaisonnent, le goût de la ratatouille est infect.

Si la politique n’est que roublardise et convoitise, arrivisme et populisme, mensonges et supercherie, alors nous construirons une nation, mais sans fondation. Si la politique descend aussi bas que la poussière, puissent les dignes qui l’ont exercée en servant leur peuple sans se servir, être honorés. Si l’on y prend garde, la politique sera le prochain mal incurable du Faso de demain.

Clément ZONGO
clmentzongo@yahoo.fr

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