L’indispensable cohésion

A l’heure où le Burkina Faso vit une insécurité sans précédent, la cohésion entre les Forces de défense et de sécurité (FDS) est une nécessité. Les unités combattantes ne peuvent pas faire face aux groupes armés terroristes qui endeuillent le pays, nuit et jour, dans la défiance ou dans la désunion. C’est ce qu’on constate malheureusement au sein de nos FDS dont on ne finira jamais de louer les sacrifices pour la patrie. Et c’est la République qui en pâtit à chaque fois. On note, en effet, une recrudescence des incidents impliquant des militaires et des forces de sécurité intérieure lors des opérations de contrôle, comme l’a déploré le Chef d’état-major général des armées (CEMGA), le colonel-major, David Kabré, dans une note de service datée du 18 juillet 2022. Le commandant en chef des armées a pris ses responsabilités en rappelant ses éléments à l’ordre.

Aussi les a-t-il invités à respecter un certain nombre de consignes, à savoir, entre autres, avoir sur soi les documents d’identité et pièces afférant aux moyens de locomotion utilisés, se soumettre avec respect et courtoisie aux différents contrôles de police et aux entrées des casernes et à décliner dès les premiers instants de contact leur identité, grade, titre et corps d’appartenance. Si le CEMGA a donné de la voix, c’est que les accrocs entre militaires et forces de sécurité intérieure sont en train de s’inscrire dans la routine. La récente rixe, survenue le 14 juin 2022 à Kaya, chef-lieu de la région du Centre-Nord et mettant en scène des militaires et des policiers municipaux, nous rappelle cette triste réalité. Des informations reçues, tout a basculé, à la suite du retrait de la mobylette d’un militaire pour non-respect d’un panneau de stop lors d’un contrôle. Il n’en fallait pas plus, pour que ses frères d’armes effectuent une descente musclée dans les locaux de la Police municipale à Kaya. La suite, on la connait, cinq policiers municipaux ont été blessés. Fort heureusement, la hiérarchie militaire s’est mise en branle pour circonscrire cet incident qui aurait pu prendre une tournure dramatique. Plusieurs bagarres du genre ont été enregistrées.

Une altercation en décembre 2006 à Ouagadougou, reste particulièrement gravée dans les mémoires. Il s’agit de celle entre des éléments de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) et un groupe de militaires, dont l’un a perdu la vie. En représailles, les jeunes soldats avaient organisé des expéditions punitives qui s’étaient soldées par 5 morts et des dégâts matériels importants. Des sommets des chefs d’Etat de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) qui devaient successivement avoir lieu à Ouagadougou, avaient été annulés, à cause de cette poussée de fièvre de la soldatesque. Les incidents entre militaires et forces de sécurité intérieure sont légion, mais nous avons foi qu’elles seront de mauvais souvenirs à l’avenir, surtout dans le contexte actuel de lutte contre le terrorisme. La hiérarchie militaire y travaille et son action est à saluer et à encourager. Les FDS, qui défendent l’intégrité territoriale au prix de leur vie, doivent regarder dans la même direction. Elles doivent nécessairement faire preuve d’unité, de solidarité et d’harmonie, par ces temps difficiles où la Nation a grandement besoin d’elles.

La crise sécuritaire qui secoue le Burkina Faso est tellement préoccupante qu’on ne peut se payer le luxe de sombrer dans des guéguerres. 40% du territoire national échappe au contrôle des autorités. Aussi les exactions terroristes, qui ont commencé depuis 2015, ont-elles déjà fait plus de 2 000 morts et près de 2 millions de déplacés internes, selon des chiffres officiels. Jamais le Burkina Faso n’avait présenté un tel visage. La terre de nos ancêtres, jadis havre de paix, est menacée de toutes parts. Alors, les FDS doivent se donner la main, pour sauver la Nation qui compte sur elles. Elles doivent absolument cultiver la cohésion dans leurs rangs, comme l’a signifié, le Président du Faso, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, le 21 juillet dernier, au cours de sa visite surprise auprès des unités d’intervention de la Police nationale. On ne saurait gagner la guerre contre le terrorisme, sans mettre de côté notre ego dimensionné ou surdimensionné.

Kader Patrick KARANTAO

Laisser un commentaire