Loi de finances rectificative 2021 : Les interpellations de la société civile

Le Centre d’études et de recherche appliquée en finances publiques (CERA-FP), le SPONG et l’ONG ORCADE, ont organisé une conférence publique sur l’analyse citoyenne du projet de loi de finances rectificative 2021, le vendredi 7 mai 2021, à Ouagadougou. L’objectif est d’amener l’Assemblée nationale à prendre en compte leurs propositions alternatives lors du vote de ladite loi à l’hémicycle.

La société civile veut jouer sa partition dans le processus d’élaboration et d’exécution du budget de l’Etat. A cet effet, un consortium d’organisations, composé du Centre d’études et de recherche appliquée en finances publiques (CERA-FP), du SPONG et de l’ONG ORCADE, ont organisé une conférence publique sur l’analyse citoyenne du projet de loi de finances rectificative (LFR) 2021, le vendredi 7 mai 2021, à Ouagadougou.

« L’objectif de cette conférence est d’échanger avec les départements ministériels, les parlementaires, les OSC, les médias pour leur donner notre lecture alternative du contenu de la loi de finances rectificative et voir dans quelle mesure nous pouvons influencer l’Assemblée nationale pour la prise en compte des préoccupations des populations », a indiqué le secrétaire exécutif du CERA-FP, Hermann Doanio.

Cette conférence vise également à recueillir les suggestions, avis, recommandations des participants dans l’optique de consolider la gouvernance des finances publiques pour le bien-être des populations du Burkina Faso, a ajouté le représentant du SPONG, Pierre Ouédraogo.

Dans sa communication, M. Doanio a fait savoir que le projet de loi de finances rectificative 2021 s’aligne sur les priorités de développement dans la continuité du Plan national de développement économique et social (PNDES) 2016-2020.

Un déficit budgétaire « élevé »

Ce projet de loi soumis à l’Assemblée Nationale pour examen et adoption est arrêté en recettes à 2 128,98 milliards FCFA et en dépenses à 2 669,78 milliards FCFA, avec un déficit budgétaire de 540,80 milliards FCFA, qui est le même que celui de la loi de finance initiale. Il estime que ce gap de financement, qui sera entièrement couvert les emprunts obligataires et les ressources de trésorerie, reste très élevé ; il représente 20,26% des dépenses budgétaires totales rectifiées de 2021.

Les recettes propres de l’Etat sont prédominantes aussi bien dans la loi de finances initiales (LFI) que dans la LFR. Elles représentent respectivement 85,25% et 85,23% des recettes totales, a souligné le conférencier.

L’analyse du projet de LFR fait ressortir que des recettes fiscales, estimées à 1 594, 5 milliards F CFA ont connu une baisse de 0,63%. Tandis que des recettes non fiscales, évaluées à 219, 9 milliards F CFA sont en hausse de 2,33% par rapport à la LFI.

Quant aux dépenses courantes qui sont de l’ordre de 1 778 milliards F CFA dans la LFR, elles ont progressé de 0,2% ; les dépenses d’investissement (891 milliards F CFA) ont augmenté de 1,63%. Cependant, le conférencier a déploré que 67% des dépenses totales de l’Etat soient consacrées aux dépenses courantes contre 33% pour les dépenses d’investissements.

Il a également déploré que seulement 35,91 milliards FCFA de ressources propres de l’Etat soient prévues pour les besoins d’investissements en 2021, ce qui représente 4,03% des dépenses totales d’investissements.

En outre, les charges de personnel consommeront environ 52,36% des recettes propres. « Cette situation peut paraître de prime abord insoutenable pour le pays. Cependant, il faut remarquer que les niveaux de salaires dans la fonction publique ne sont pas exagérés et que la plupart des services ne sont pas dotés en personnel suffisant pour répondre aux besoins de la population. Les véritables défis seraient l’exploitation optimale du potentiel fiscal du pays et la réforme de l’administration publique pour tendre vers une administration de services et de résultats », souligné M. Doanio. Pour ce qui concerne le train de vie de l’Etat, il représente environ 7,68% des dépenses totales du projet de budget rectifié 2021 et 11,52% des dépenses courantes.

9% du budget au secteur rural

Les ressources allouées aux secteurs prioritaires de la santé, de l’éducation, du secteur rural, la sécurité et défense, la protection sociale ont connu une légère hausse, passant de 1 637,641 milliards de FCFA, soit 61,76% du budget initial, à 1 642,591 milliards de FCFA, soit 61,53% du projet de budget rectifié. Malgré cette hausse en valeur absolue, la part de ces secteurs dans le budget a légèrement baissé.

Si les 23,75% du budget alloués à l’éducation dans tous les ordres d’enseignement (primaire, secondaire, supérieur et à la formation professionnelle) sont à saluer, le communicateur a déploré que seulement 10% (33,7 milliards FCFA) soient réservés aux investissements contre 90% (458 milliards FCFA) pour les dépenses courantes. Et selon le secrétaire exécutif de CERA-FP, il est à craindre que les autorités ne puissent tenir leurs promesses en matière d’offre éducative.

Le budget alloué à la santé n’a pas connu d’évolution et se chiffre à 313,371 milliards FCFA soit 11,7% du budget 2021. 54,5 milliards (17,4%) de ces ressources sont orientés vers les investissements sanitaires.

Les dépenses des ministères en charge du secteur rural (agriculture, élevage, eau et assainissement, environnement) sont passées de 250,491 milliards de FCFA à 250,991 milliards de FCFA, soit une hausse légère de 0,20%.  Elles représentent 9,4% du projet de budget 2021 rectificatif. Les dépenses d’investissements de ces secteurs représentent 80% de leurs dépenses totales.

Le budget de la sécurité et de la défense a connu une augmentation d’un peu plus d’un milliard F CFA, passant de 405,30 milliards de FCFA à 406,65 milliards de FCFA.  « Ces dernières années, le secteur de la sécurité et de la défense est l’un de ceux qui brasse le plus de ressources budgétaires. Malheureusement, la situation sécuritaire du pays se dégrade de plus en plus », a fait remarquer le conférencier du jour. Et d’ajouter que l’engagement du Gouvernement d’allouer 1% du budget de l’Etat à la lutte contre la corruption n’est pas respectée, car le budget de l’ASCE-LC se chiffre à 2,902 milliards de FCFA, soit 0,11% du budget.

Cette conférence a été l’occasion de formuler des recommandations dans le sens de l’amélioration de la gouvernance financière et économique au pays des hommes intègres, de la prise en compte des besoins des populations. Il s’agit, entre autres, de l’accroissement des dépenses d’investissement dans les secteurs sociaux (santé, éducation) et des ressources à la protection sociale, de l’exploitation optimale du potentiel fiscal, la définition de taux de TVA progressifs, la priorisation des dépenses d’investissements, surtout sur ressources propres.

Mahamadi SEBOGO

Windmad76@gmail.com

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