L’urgence d’une synergie

Initialement prévu à Ouagadougou, c’est à Niamey que le sommet extraordinaire des chefs d’Etat du G5 Sahel s’est tenu, hier dimanche 15 décembre 2019 sous la présidence de Roch Marc Christian Kaboré, Président en exercice de l’organisation. En solidarité avec le Niger qui a perdu 71 soldats à la suite d’une attaque terroriste, le 10 décembre 2019 à Inatès, les cinq chefs d’Etat présents ont salué la mémoire des victimes, mais aussi de celles des attaques de Boulikessi, Tanbakort et Indelimane au Mali, Koutougou et Boungou au Burkina Faso.

Ces récentes attaques, en plus d’illustrer la gravité croissante de la situation dans la bande sahélienne, viennent rappeler, si besoin en était encore, l’urgence d’œuvrer davantage en synergie pour faire face à la pieuvre terroriste et ses tentacules insidieux : les conflits communautaires. C’est la quintessence du message livré par le président en exercice du G5 Sahel devant ses pairs. « Les attaques sans cesse perpétrées par les groupes terroristes dans notre espace rappellent non seulement l’extrême gravité de la situation, mais aussi, l’urgence de travailler davantage en synergie pour faire face à ces barbaries d’une autre époque », a-t-il souligné.

Pour lui, la paix et la sécurité de notre espace commandent une conjugaison des efforts et une mutualisation des moyens d’action pour gagner le combat. Une prise en compte des dimensions sécuritaire, politique et économique s’impose également à son avis. Les pays du G5 Sahel doivent trouver l’approche adéquate pour vaincre les assaillants qui ne cessent de gagner du terrain. En attestent ces propos du président nigérien, Mahamadou Issoufou : « Les terroristes sont devenus de véritables professionnels de l’art de la guerre.

Tout en s’attaquant à nos troupes, ils s’attaquent parallèlement à nos alliances. Ils s’activent à trouver des relais au sein des populations pour dénoncer la présence des troupes alliées à nos côtés ». Alors qu’elle peine à monter en puissance, la force conjointe est critiquée de l’intérieur et de l’extérieur par des populations impatientes de voir un retour à la paix dans leurs pays. D’aucuns estiment d’ailleurs que certains dirigeants perdent du temps à réclamer un mandat onusien pour la force conjointe du G5 Sahel, plutôt que de renforcer ses capacités opérationnelles.

Au moment où le terrorisme se métastase, l’urgence d’une synergie commande une plus grande solidarité, à l’échelle de la CEDEAO. L’autre défi est la clarification de la position des chefs d’Etat du G5 Sahel par rapport à la présence militaire française au Sahel face à leur homologue, Emmanuel Macron, au sommet de Pau reporté à janvier 2020. On le
sait, l’engagement de la France, premier marketeur diplomatique du G5 Sahel sur la scène internationale et au Conseil de sécurité des Nations unies, est au cœur de la polémique.

Une certaine opinion accuse l’Hexagone de duplicité dans la lutte contre le terrorisme au Sahel. Il est donc important que le rôle de l’ancienne puissance coloniale et partant, de toutes les forces amies présentes aux côtés des pays sahéliens soit appréhendé avec lucidité, loin du vent de « dégagisme » qui souffle sur Ouagadougou, Niamey et Bamako. Dans cette perspective, la rencontre de Pau peut s’avérer un exercice d’équilibrisme délicat pour nos têtes couronnées.

Par Mahamadi TIEGNA

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