Mali-Niger : dépasser les passe d’armes

Décidément entre les deux grands voisins sahéliens, le Mali et le Niger, les incompréhensions sont en train de devenir récurrentes au point de rendre difficiles les relations de bon voisinage. Il y a quelques mois de cela, c’est le Président nigérien, Mohamed Bazoum, connu pour son franc-parler, qui a fustigé la junte malienne qui aurait abandonné le champ de bataille pour le pouvoir. Une sortie qui avait fait réagir Bamako dans une colère contenue, appelant tout de même à la préservation des relations fraternelles. Cette fois-ci, c’est le ministre nigérien des Affaires étrangères, Hassoumi Massaoudou, qui a écorché les autorités maliennes sur les ondes d’une radio internationale, à l’issue du sommet extraordinaire de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), tenu le jeudi 16 septembre dernier à Accra au Ghana.

« En février 2022, les élections doivent avoir lieu, sinon nous allons associer l’ensemble de la communauté internationale aux sanctions contre les militaires maliens. Nous exigeons donc une feuille de route claire pour qu’on aille aux élections », avait-il lancé. Sur les rumeurs de négociations entre les autorités maliennes et des mercenaires de la société russe Wagner, le chef de la diplomatie nigérienne a indiqué que cela était inacceptable. « Nous n’acceptons pas que, dans notre sous-région, des mercenaires viennent s’impliquer, dégrader davantage encore la situation sécuritaire », avait vitupéré M. Massaoudou. Evidemment, comme il fallait s’y attendre, la pilule est mal passée du côté de Bamako qui a aussitôt produit un communiqué sur cette sortie.

« Le gouvernement de la République du Mali condamne fermement et rejette ces propos inacceptables, inamicaux et condescendants… », pouvait-on lire. Alors que les deux pays et leur voisin le Burkina Faso, sont confrontés depuis des années au péril terroriste, cette passe d’armes risque de compromettre les efforts communs dans la lutte. Le Mali et le Niger n’ont nullement besoin de s’étriper dans des malentendus stériles dans ce contexte si délicat. Au-delà des contradictions qui peuvent intervenir dans la bonne marche des relations bilatérales, il sied de trouver la manière idéale pour les surmonter. L’heure doit être à l’union sacrée face à un ennemi qui est en train de menacer la survie même des Etats du Sahel. L’énergie doit être consacrée à aider le Mali à retrouver la stabilité constitutionnelle dans un délai raisonnable.

Il est inopportun d’entretenir des inimitiés inutiles quand un malheur commun vous frappe et vous déstabilise. Les autorités maliennes et nigériennes n’ont d’autre choix que de reconsidérer leurs postures de méfiance pour porter ensemble un regard plus constructif sur le devenir de la sous-région. Le Mali et le Niger sont condamnés à entretenir des relations de bon voisinage non seulement dans l’intérêt de leurs peuples qui partagent d’indéfectibles liens de parenté, mais aussi pour mieux faire face au défi hautement sécuritaire qui les préoccupe. Pour l’intérêt de chaque partie, il serait judicieux de dépasser les principes pour privilégier le dialogue et la concertation pour lever les malentendus. C’est en acceptant de se mettre au-dessus de leurs divergences que les deux voisins sauront se frayer le chemin d’une stabilité et d’une cohabitation qui profitent à tous. Nul besoin de s’invectiver pour bâtir une communauté de destins au Sahel.

Karim BADOLO

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