Publicité à Bobo-Dioulasso : Un secteur dynamique dans l’anarchie

Dans la ville de Bobo-Dioulasso, la publicité bat son plein.

Dans les centres urbains au Burkina Faso, la publicité est incontournable dans le développement économique. C’est ainsi que les collectivités territoriales en profitent pour réaliser des investissements. Mais, à Bobo-Dioulasso, ce secteur lucratif est confronté à l’anarchie.

En cette fin du mois de décembre 2021, la capitale économique, Bobo-Dioulasso, se prépare à accueillir la nouvelle année 2022. La ville grouille de monde. L’activité économique est rythmée par les achats. En ces moments propices, l’activité publicitaire prend de l’ampleur, à travers une présence marquée d’enseignes, de pré-enseignes et d’affichages sur divers supports. Aux quatre coins de la ville, des panneaux publicitaires trônent majestueusement et attirent la convoitise des passants.  Bon nombre de ces dispositifs publicitaires ne respectent visiblement pas la règlementation en la matière. Car, leurs propriétaires doivent bénéficier d’une autorisation de la mairie de Bobo-Dioulasso pour occuper le domaine public et ensuite s’acquitter des taxes. Selon la loi 080 portant Code de la publicité au Burkina Faso, les enseignes, « toute inscription, forme ou image apposée sur un immeuble et relative à une activité qui s’y exerce », sont soumises aux règles de la publicité. Il en est de même pour les pré-enseignes qui constituent « toute inscription, forme ou image indiquant la proximité d’un immeuble où s’exerce une activité déterminée ». Le soleil amorce déjà sa course dans le ciel vers le zénith.  Le promoteur  de l’agence de communication et de production Mediacom, Josias Zounzaola Dabiré, nous accueille dans sa structure. « Mon rôle est de concevoir des outils de communication. Il s’agit des spots publicitaires, des documentaires, des publi-reportages et des affichages qui sont contrôlés par la mairie de Bobo-Dioulasso », s’empresse-t-il de dire. Selon lui, il faut reconnaître qu’il y a une certaine anarchie, un désordre de manière générale dans le monde de la publicité. Les gens font, par exemple, des publicités à partir de leurs smartphones qui ne répondent pas aux normes, fulmine Josias Zounzaola Dabiré. A l’entendre, au lieu de les publier dans les médias classiques bien contrôlés, ils utilisent les médias sociaux. Il en est de même pour les affichages publicitaires, à l’en croire. « Des utilisateurs confectionnent eux-mêmes leurs affichages sans l’aide d’une agence de communication avec pour conséquences des formats anormaux et des messages inadéquats », soutient-il. Pour lui, la sensibilisation à petite échelle est le meilleur moyen pour conscientiser les utilisateurs des affiches. Il appartient aux autres structures de publicité (agences), ajoute-t-il, de jouer également leur partition pour aider à faire passer le message à des millions de cibles.

Une police de la publicité

« Pour qu’il y ait de l’ordre, force doit rester à la loi pour que la commune puisse se tirer d’affaire. Il faut, à la limite, mettre en place une police de la publicité spécifiquement pour éviter les pertes de recettes subies par la commune de Bobo-Dioulasso », propose le promoteur de Mediacom. Les taxes publicitaires sont collectées par la commune de Bobo-Dioulasso. A l’arrondissement 1, le régisseur Mohamed Nignan en fonction depuis 2020 et son équipe se chargent de cette collecte. D’un air décontracté, il assure qu’il fait son travail avec enthousiasme. Il rappelle que dans la publicité, il y a les émissions des titres de recettes qui doivent être faites par l’ordonnateur qui les renvoie au receveur municipal pour la prise en charge. Elles sont ensuite renvoyées pour les différentes sorties de terrain malgré les difficultés à tous les niveaux qui ne manquent pas sur le terrain. Il s’agit de la réticence des utilisateurs des outils de publicité, sans oublier l’anarchie dont il est question dans le secteur. « Dès le 15 janvier de chaque année, les régies de recettes sortent sur le terrain pour les taxations, les impositions et les recouvrements en même temps, mais ce sont les taxations et les impositions qui sont le plus au rendez-vous à cette date. Après, il y a les sorties quotidiennes de terrain pour expliquer les différentes taxes, le bien-fondé de les payer dans leur généralité et ce qu’en font les autorités municipales. Vous savez que c’est vilain, mais c’est comme cela dans notre pays, le taux d’analphabétisme étant élevé », explique Mohamed Nignan. En somme, le régisseur de l’arrondissement 1 de Bobo-Dioulasso et ses coéquipiers donnent un mois aux contribuables qui posent des réserves. Ils donnent l’opportunité à ceux qui estiment que les montants des taxes sont trop élevés ou en baisse par rapport à l’exercice passé de venir s’expliquer et comprendre les faits. « Après les explications et les avis d’imposition, il y a les convocations pour vous amener à venir payer les Avis de mise à recouvrement (ADR) et les Avis de mise en demeure de payer (ADP), c’est-à-dire les sommations. Il y a toujours des lettres de rappel en cas d’oubli. S’il y a des réticences, je fais un rapport et j’envoie à qui de droit en tant que régisseur assermenté », note-t-il. La publicité sur les feux tricolores, les poteaux électriques et les bâtiments publics est interdite de manière règlementaire. Mais, déplore M. Nignan, les gens passent par les affichages de formats A3 et A4.

Les services municipaux, à Bobo-Dioulasso, mettent souvent fin aux publicités illégales.

« Une amende entre 5 000 FCFA et 100 000 FCFA »

« Si vous enlevez ces affiches la nuit, le matin, vous revenez les trouver. L’autorité dispose d’une dérogation pour ramener à l’ordre les contrevenants. Ils doivent être punis d’une amende entre 5 000 F CFA et 100 000 FCFA. Ces affiches doivent, dans les normes, être cachetées et faire l’objet d’une autorisation spéciale pour un temps donné. Le plus marrant, c’est l’anarchie prônée par certaines personnes dans la ville de Bobo-Dioulasso », affirme le régisseur Nignan. Les commerçants, eux, relève-t-il, sur le terrain, utilisent les enseignes, les pré-enseignes, les banderoles, les affiches et ne peuvent pas échapper au paiement des taxes après explication et imposition. Est-ce que les utilisateurs de ces affiches, enseignes et pré-enseignes publicitaires s’acquittent réellement des taxes à payer ? « Je ne veux pas dévoiler les choses et je ne veux pas non plus les voiler. Il y a des gens qui n’ont pas les moyens et il y a ceux-là qui sont des récalcitrants. Ces derniers sont punis conformément à la loi. Dans mon rapport de novembre 2021, nous sommes entre 95% et 96% de taux de recouvrement malgré la situation. Ceux qui font de l’anarchie sont difficiles à cerner mais il y a des numéros de téléphone sur les affiches », répond Mohamed Nignan. Que les autorités communales prennent la question de manière sensible et permettent à la Police municipale de relever ces numéros et réprimander ou moraliser un peu les contrevenants, martèle-t-il. « Les affichages anarchiques sont rentables si elles sont taxées, par exemple à 100 FCFA par affiche. La loi dit clairement que les affiches dans les lieux non autorisés tels que les cimetières, les voies publiques, les arbres, les bâtiments et les feux tricolores sont interdites. Il faut que les promoteurs mettent fin à cette pratique. Qu’ils s’attachent les services de la municipalité à l’aide de document formel en conformité avec la règlementation ! Ceux qui font la grande publicité sont aussi interpellés pour remplir leur devoir de payer les taxes. Les sommes demandées dépendent du nombre de panneaux et de leurs dimensions », insiste M. Nignan. Il se convainc qu’il faut que l’on prenne de nouvelles délibérations autour de la question pour insérer de nouvelles pratiques publicitaires telles que les panneaux lumineux déjà utilisés à Ouagadougou. « Le paiement des taxes est volontiers. Car les contribuables doivent le faire sans aucune pression. Toutefois, ce qui est dur, c’est le fait de payer les taxes en une tranche », indique-t-il. Toutefois, le régisseur de l’arrondissement 1 de Bobo-Dioulasso dit ne pas comprendre pourquoi les gens s’entêtent à faire de l’anarchie que l’on ne dénonce pas. Comme solution, il propose de retirer les affiches publicitaires anormales comme à Ouagadougou.

Plus de 223 millions FCFA recouvrés en 2020

1. L’ex-maire de Bobo-Dioulasso, Bourahima Fabéré Sanou : « La publicité concerne l’occupation du domaine public et les taxes générées ».

« De 2 000 à 2019, le recouvrement des taxes publicitaires en général variait entre 100 000 000 FCFA et 150 000 000 FCFA. En 2019, il se situait à un peu plus de 150 000 000 FCFA. En 2020, j’ai fait un recouvrement de plus de 223 000 000 FCFA sans compter les pertes subies par l’anarchie. Si chacun payait 100 FCFA ou 150 FCFA par affiche, on pouvait engranger des devises. En 2021, l’arrondissement 1 a, lui seul, recouvré 149 000 000 FCFA sur 150 000 000 FCFA », se réjouit-il. Il recommande la création d’une cellule de publicité pour gérer de façon efficace et efficiente les questions de publicité dont les fruits sont utilisés par la mairie de Bobo-Dioulasso pour des investissements. Le maire de la ville de Bobo-Dioulasso, Bourahima Fabéré Sanou, évoque la publicité sous deux volets. Il s’agit de l’occupation de l’espace dans la commune de Bobo-Dioulasso et l’appui que les taxes sur la publicité apportent au budget communal. Comment l’espace est occupé ? Il avoue qu’au regard des insuffisances de gestion, l’on trouve un peu partout des panneaux publicitaires dans la ville de Bobo-Dioulasso et de multiples acteurs dans le domaine de la publicité. « Le constat que nous avons fait est que la plupart de ces personnes ne sont pas liées à la commune par un contrat. Donc, il n’y a aucun cahier des charges. Ce qui veut dire qu’à un moment donné, des personnes ont été acceptées soit par simple autorisation, soit par simple correspondance pour implanter tel ou tel autre panneau. Depuis, ces dernières sont restées à travailler moyennant des sommes qui sont fixées par l’autorité à la tête du client. Le constat a été fait et nous avons proposé une délibération au conseil municipal qui, du reste, a été renouvelée à notre dernière session en septembre 2021 », évoque-t-il. Il faut qu’on harmonise les dimensions des supports, leur nature et les taxes à payer, dit-il. Il faut un cahier des charges, estime-t-il, pour respecter les prescriptions qui régissent le domaine public en plus des taxes annuelles à payer. Aujourd’hui, fait remarquer Bourahima Fabéré Sanou, il y a eu de nouvelles formes de publicité qui arrivent et exigent d’autres approches telles que les oriflammes, les petits panneaux sur les poteaux, les terre-pleins, les antennes, etc. Dans ce sens, il confie que la mairie a reçu des demandes multiformes et est en train d’étudier pour établir le cahier des charges qui convient. « Nous avons plus de 500 000 000 FCFA de recettes publicitaires annuellement que nous estimons en deçà du potentiel réel sur le terrain. Les discussions sont en cours au niveau des services du receveur municipal qui avait demandé à un moment donné de suspendre pour faire un recensement dans le but d’établir un fichier approximatif des contribuables à la taxe sur la publicité. Malgré cette suspension, il y a l’arrondissement 1 qui a pu faire des recettes de près de 200 000 000 FCFA par an », ajoute-t-il.

Aucun cahier des charges clairement défini

Dans le domaine des affichages, par exemple, soutient M. Sanou, il y a l’anarchie liée au fait que l’autorité n’ait pas clairement défini les cahiers des charges pour savoir qui fait et comment faire de la publicité. Car, la publicité est un secteur qui est organisé. Il faut être d’abord une structure de publicité avant de s’adresser à la collectivité pour l’occupation de l’espace public. Dans ce cas, éclaire le bourgmestre, ceux qui font de la publicité devraient approcher la collectivité qui leur dira comment implanter un support. « A ce propos, la collectivité tiendra compte de l’occupation réelle du domaine public. Mais, malheureusement, n’importe qui se lève pour occuper le domaine public. C’est le cas critique lorsqu’un artiste doit faire une prestation avec les affiches évènementielles de toute sorte à n’importe quel point de la voie publique, sur les monuments avec n’importe quel gabarit, encombrant et salissant. Mais nous travaillons à organiser le secteur avec la complicité des services déconcentrés de l’Etat notamment le receveur municipal pour recenser ceux qui sont dans le domaine de la publicité régulièrement agréés et voir comment ‘’ démarcher ‘’ avec eux pour établir clairement un cahier des charges », assure-t-il. C’est le cas d’un promoteur qui a demandé à implanter des oriflammes qu’on lui a accordées par simple lettre pour occuper le boulevard de la Révolution et la place Tiéfo- Amoro avec 13 millions FCFA à payer annuellement comme taxe, poursuit-il. A un moment donné, déplore le maire de Bobo-Dioulasso, on a demandé à ce qu’on dépose ces oriflammes parce que le promoteur a outrepassé les termes du contrat en envahissant toute la ville. « La publicité est un instrument utilisé au quotidien, les moyens publicitaires occupent le domaine public, se diversifient et devraient profiter à la ville à travers les grandes sociétés et les recettes générées dans la commune. Nous sommes en pleine réforme dans le secteur de la publicité et dans les années à venir, cela pourra avoir un effet induit sur les recettes communales », se convainc Bourahima Fabéré Sanou. Selon lui, il y a des panneaux dont les utilisateurs occupent plus l’espace public et paient moins à la municipalité. En plus, les relations entre la mairie et les commerçants sont toujours tendues dans cette dynamique. A entendre le maire Sanou, cela s’explique par le fait que l’économie nationale est basée sur le secteur informel formé d’individus qui ignorent souvent les textes.

La publicité sur les arbres est interdite à Bobo-Dioulasso.

Délivrer des actes d’occupation du domaine public

« Au-delà des abords de la route, il y a les espaces verts où la municipalité a tenté d’y mettre de l’ordre avec la délivrance des actes d’occupation du domaine public centralisés dans un premier temps au niveau de la commune et ensuite déconcentrés dans les arrondissements », rappelle-t-il. Pour le commerçant au grand marché de Bobo-Dioulasso, Amsa Ouédraogo, il existe des panneaux publicitaires au sein du grand marché de Bobo-Dioulasso mis en location. A son avis, il faut payer la facture au sein de la Structure de gestion des infrastructures marchandes (SGEIM), pour l’emplacement du panneau. Il en est de même pour les affiches à raison de 150 FCFA à 200 FCFA par affiche au sein du marché. « Il y a des personnes qui trompent la vigilance des structures de surveillance. S’il n’y a pas de cachet sur l’affiche, les services de surveillance le retirent », déclare-t-il. Le directeur en charge des infrastructures routières et de la mobilité de la commune de Bobo-Dioulasso, Issouf Yao, confie que son service du domaine public et de la publicité veille au contrôle de l’occupation du domaine public et autorise ceux qui souhaitent occuper ce domaine dans les règles de l’art. Pour la publicité, il précise qu’ une demande doit être adressée à l’autorité communale avec comme ampliataire, la Police municipale qui peut même aller sur le terrain seule pour traquer les anarchistes. « Chaque jour, il y a des installations anarchiques, par centaine. Ceux qui ne vont pas inscrire leurs numéros sur les affiches verront leurs affichages déposés. C’est une exigence. Il y a des interpellations séance tenante pour déguerpir les fautifs », rappelle Issouf Yao. Le receveur municipal et trésorier régional des Hauts-Bassins, Jérôme Jean Stéphane Paré, explique que de 2017 au 30 novembre 2021, les prévisions de recouvrement s’élevaient à 1 452 501 652 F CFA contre 861 486 950 FCFA de recettes effectivement collectées, soit un taux de recouvrement de 59,31%. « La grande publicité n’a pas de problème mais, c’est la petite publicité qui enregistre l’anarchie dans l’occupation du domaine public avec la réticence de certains contribuables à payer par ignorance ou mauvaise foi », renchérit-il. Et d’ajouter que comme toutes les autres recettes propres, les produits issus de la perception de la taxe sur la publicité participent au financement du développement socio-économique de la commune de Bobo-Dioulasso. « Plus le recouvrement de la taxe est optimisé, plus la commune de Bobo-Dioulasso dispose de moyens financiers pour investir et impacter positivement l’économie », conclut-il. En somme, la commune de Bobo-Dioulasso envisage mettre en place des marchés secondaires structurés dans les arrondissements pour amener les gens à quitter le domaine public et faire de la publicité saine.

Le commerçant au grand marché de Bobo-Dioulasso, Amsa Ouédraogo : « Il y a des panneaux publicitaires au sein du grand marché de Bobo-Dioulasso mis en location ».

                                                                                   Boukary BONKOUNGOU

Encadré 1

La publicité en chiffres à Bobo-Dioulasso

Dimensions (en m2)/Nature du panneau publicitaire  

Prix

1 m2 25 000 FCFA
2m2 à 4 m2 50 000 FCFA
4 m2 à 6 m2 105 000 FCFA
6 m2 122 000 FCFA
6 et moins de 8 m2 150 000 FCFA
8m2 et moins de 12m2 200 000 FCFA
12m2 et moins de 15 m2 235 000 FCFA
15m2 300 000 FCFA
plus de 15 m2 450 000 FCFA
Enseignes un forfait de 50 000 FCFA
Caravanes publicitaires par traversée un forfait de 200 000 FCFA
Véhicules sonorisés 2800 FCFA/jour/véhicule
Véhicules peints publicitaires 100 000 FCFA/An
Banderoles 2 000 FCFA/semaine/banderole

Source : Service de régie de l’arrondissement 1 de Bobo-Dioulasso

Encadré 2

Aïcha Dabré, présidente de Publicitaires Associés

« Il est impérieux d’assainir le secteur de la publicité »

 Publicitaires Associés (PA) est l’association professionnelle des entreprises de communication et de publicité au Burkina Faso, créée en 2007. Elle a pour objectifs, entre autres, de promouvoir une saine pratique des métiers de la communication et de la publicité, tout en garantissant à la fois les intérêts des consommateurs, des annonceurs et ceux des acteurs. Publicitaires Associés veut ainsi permettre à ses membres de fournir à leurs clients un service compétent, efficace, loyal et responsable. Sa présidente, Aïcha Dabré, explique l’anarchie dans le secteur de la publicité et les stratégies pour vaincre ce phénomène.

 

Sidwaya (S) : Comment expliquez-vous l’anarchie dans le domaine de la publicité en général au Burkina Faso ?

Aïcha Dabré (A. D.) : Pour avoir une idée de l’attractivité globale dans le secteur, il faut savoir que le domaine de la communication enregistre à lui seul, ces dix dernières années, près 10 % des choix et projets d’entrepreneuriat dans notre pays. Pour autant, je n’irai pas jusqu’à employer le terme d’anarchie pour caractériser les réalités et les conditions d’exercice des métiers de communication et de publicité au Burkina Faso. Pour atténuer cette caractérisation d’anarchie, je voudrais vous rappeler que le Burkina dispose d’un Code de la publicité, depuis la promulgation de la loi N°025-2001/AN du 25 octobre 2001, portant Code de la publicité au Burkina Faso. Ce Code a été révisé par la loi N°080-2015/CNT, portant règlementation de la publicité au Burkina Faso, promulguée le 12 juin 2018. Cela dit, je dois quand même admettre avec vous que, en dépit de ce cadre législatif et règlementaire qui a été fixé, de nombreux acteurs interviennent et exercent encore dans le secteur, se faisant passer pour des publicitaires, au grand mépris et en violation flagrante des dispositions de ces textes et lois en toute impunité le plus souvent. Une situation qui, à elle seule, justifie amplement la naissance et le combat de Publicitaires Associés. En effet, il est impérieux que les professionnels du secteur se réunissent et se donnent la main pour, avec l’aide de l’administration et dans l’intérêt de tous les annonceurs, assainir la pratique de la profession.

S : Pour vous, quelles sont les stratégies qu’il faut utiliser pour réguler le secteur de la publicité ?

A.D. : La formation des acteurs, ainsi qu’une coercition plus accrue, stricte et sans faille des contrevenants aux lois et textes qui régissent le secteur me semblent être le triptyque indispensable à un assainissement économique nécessaire et indispensable du secteur. Avec l’aide des pouvoirs publics et l’accompagnement des écoles et instituts de formation, nous devons activement œuvrer à une plus grande professionnalisation des métiers de la publicité. De même, nous devons faire en sorte que les annonceurs aient une bonne et saine information quant aux contours règlementaires d’exercice de la profession. Dans le même temps, il est important pour les pouvoirs publics d’encourager les entreprises du secteur, grandes créatrices d’emplois des jeunes. Notamment, par des mesures économiques incitatives, des allègements fiscaux et une célébration des bonnes pratiques professionnelles et commerciales dans le secteur. Enfin, ce n’est pas trop demander que de s’attendre à l’application plus rigoureuse des lois et textes censés règlementer la profession. Pour la présidente de l’association professionnelle du secteur que je suis, je dirai que la compétence, une règlementation plus stricte et une saine concurrence sont les maîtres-mots pour un avenir enviable du secteur de la publicité dans notre pays.

Propos recueillis par Boukary BONKOUNGOU

Encadré 3

Commune de Ouagadougou : un partenaire essentiel

La ville de Ouagadougou est un partenaire essentiel et incontournable pour les publicitaires, selon les spécialistes du secteur. Le domaine communal constitue en effet un espace très convoité, essentiel et vital pour eux, afin d’y déployer leurs visuels, notamment à travers les affichages publics et autres, foi des responsables de Publicitaires Associés (PA), une association de publicitaires basée dans la capitale. Pour la présidente de PA, Aïcha Dabré, l’on ne devrait pas parler véritablement d’anarchie car la publicité visuelle et grand public obéit à des normes et conditions assez strictes, définies par arrêté municipal. « Les publicitaires plaident efficacement et mènent un lobbying conséquent pour considérer certaines réalités concrètes et faciliter un partenariat gagnant-gagnant avec la ville de Ouagadougou », rappelle-t-elle. Malheureusement, déplore-t-elle, des incompréhensions surviennent et la commune se comporte comme une concurrente vis-à-vis des régies publicitaires. C’est ainsi que l’on peut apercevoir des panneaux d’affichage public avec la mention « Autorisation annulée… ». Une concertation réelle entre les parties peut éviter par exemple, le déploiement massif et pléthorique de surfaces d’affichage sur les terre-pleins et la lenteur dans le traitement des dossiers marquée par une opacité inquiétante.

B.B

Encadré 4

L’agrément du Conseil supérieur de la communication

L’article 2 de la loi n°080-2015/CNT du 23 novembre 2015 dispose que « Constitue une opération de publicité, toute inscription, forme, image ou son destinés à informer le public ou à attirer son attention sur une marque, un produit ou un service ». Aux termes de l’article 4 de la loi organique 015-2013/AN du 14 mai 2013 portant attributions, composition, organisation et fonctionnement du Conseil supérieur de la communication (CSC) et son modificatif n°004-2018/AN du 22 mars 2018, l’autorité de régulation a, entre autres, pour attributions de veiller à l’application de la législation et de la règlementation relative à la communication au Burkina Faso et au respect de la déontologie professionnelle par les médias. Elle doit aussi veiller au respect des principes fondamentaux régissant le contenu de la publicité à travers les médias. L’article 4 de la loi n°080-2015/CNT du 23 novembre 2015 portant règlementation de la publicité au Burkina Faso dispose que : « L’Etat assure la régulation du secteur de la publicité par le biais de l’instance nationale chargée de la régulation du secteur de la communication avec le concours des structures compétentes ». L’article 4 de la loi organique 015-2013/AN du 14 mai 2013 prévoit que : « tout manquement aux dispositions législatives et règlementaires régissant les activités de communication fait l’objet d’une mise en demeure du CSC ».

B.B

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