Situation nationale : « Il faut rétablir au plus vite l’appareil constitutionnel », Serge Bambara dit Smockey

Suite au coup d’Etat du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR), Serge Bambara alias Smockey du Balai citoyen donne ici son point de vue sur la situation.

Sidwaya (S) : Quel sentiment suscite chez vous la survenue de ce énième coup d’Etat au Burkina ?

Serge Bambara (S.B.) : Cette actualité me donne un sentiment mitigé. D’abord parce qu’au regard de tous les sacrifices que le peuple burkinabè a consentis, il était en droit d’aspirer à beaucoup mieux que cela, un Etat de droit démocratique avec des citoyens qui peuvent à un moment donné siffler la fin de la récréation si le besoin se fait sentir. Malheureusement, il y a eu une très mal gouvernance sous l’ancien régime s’il faut tenir compte des appels au secours de la population si bien qu’on est arrivé à ce coup de force que je regrette.

S : Selon vous, comment en est-on arrivé à cette situation ?

S.B. : On est arrivé à cette situation parce qu’il y a eu un Etat sourd en apparence vis-à-vis de son peuple, mais en réalité dans les faits rien n’a changé. On était en droit de penser que dans un contexte post insurrectionnel, ce régime, sachant d’où il venait, parce que c’est quand-même un sacrifice des Burkinabè qui lui a permis de s’installer, allait tenir compte au plus haut point des besoins des populations et allait rompre surtout avec les anciennes pratiques. Mais malheureusement, l’habitude est une seconde nature et les politiciens n’échappent pas à cette règle.

S : Un coup d’Etat accueilli par une liesse de certains citoyens. Comment réagissez-vous à cela ?

S.B. : D’une part, on peut comprendre que les populations excédées par tant d’insécurité et de morts, par tant de clientélisme de la part de leurs gouvernants, par tant de fausses promesses, en soient arrivées à cela. En tout cas une grande partie de la population ! Parce que je ne crois pas que ce soit l’entièreté de la population, car il y a une partie légaliste qui s’accroche à la tradition de l’appareil démocratique classique. On peut donc comprendre au regard du danger qu’il y avait, mais je pense qu’on pouvait espérer mieux aussi.

S : Qu’attendez-vous du Lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba et ses hommes qui viennent de prendre le pouvoir ?

S.B. : Il faut être clair à ce niveau. Un gouvernement digne de ce nom est un gouvernement qui a un processus constitutionnel normal. Donc il faut rétablir au plus vite l’ordre constitutionnel. Il faut tenir compte des besoins des populations cette fois-ci parce que les mêmes causes produisent les mêmes effets. Si on n’y prend garde, ce régime tant adulé par une partie de la population peut être vomi demain. L’ancien régime avait bénéficié aussi d’une certaine légitimité avant d’être cloué au pilori de l’opinion populaire. On attend d’eux la préservation des acquis de l’insurrection populaire pour laquelle nous nous sommes tous sacrifiés. Que les procès en cours ne soient pas arrêtés mais qu’ils puissent bénéficier d’une certaine accélération afin que la justice se fasse. Je pense au procès Thomas-Sankara, à celui de Norbert-Zongo et tous les autres notamment ceux de l’insurrection populaire. On attend d’eux qu’ils ne ramènent pas les fantômes de l’ancien régime et qu’il y ait un changement vrai. Qu’on mette les hommes qu’il faut à la place qu’il faut et que cette fameuse démocratie qu’on a toujours voulue au service des masses populaires puisse connaitre au moins un début de mouvement. On a encore un exemple à donner au reste du monde. Le monde entier nous a enviés dans notre révolution et dans notre résistance face au coup d’Etat manqué de 2015. Le monde entier attend de voir si le réveil des Burkinabè nous a ramenés dans un cycle décisif dont nous ne sortirons jamais. Nous avons en tout cas une occasion de démontrer au monde entier que nous sommes dignes du titre d’hommes et femmes intègres. La terre des hommes intègres demande à ce que cette intégrité soit remise au bout du drapeau et à l’honneur.

Propos recueillis par

Karim BADOLO

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