Tenir compte des progrès

La représentation nationale d’Amnesty International a présenté, mercredi dernier à Ouagadougou, le rapport 2020/21 de l’ONG sur les droits humains. Le document de 500 pages jette un regard sur le Burkina, à la page 136, parmi 35 pays du continent où la situation des droits humains est jugée « alarmante ». Les récriminations n’ont pas varié. Entre autres griefs, ce rapport pointe des exécutions extrajudiciaires et la commission d’actes de tortures dans un climat « d’impunité généralisée ».

A priori, il est loisible d’affirmer que l’ONG de renommée mondiale pour ses prises de positions tranchées sur tout ce qui constitue une violation des droits humains à travers « le monde libre », a fait son job. Des questions taraudent néanmoins l’esprit de certains de nos concitoyens. Pourquoi maintenant ?
Y aurait-il un but recherché ? Pourquoi les avancées notables n’ont pas été prises en compte ? En effet, les conclusions du rapport 2020-2021 d’Amnesty international rappellent celles d’international Crisis Group publiées en février 2020 pour le compte de l’année précédente. L’ONG recommandait (sic), « un usage proportionné de la force », la limitation du rôle des groupes d’autodéfense, la résolution de la question foncière qui fait le lit des conflits locaux, la mise en place de garde-fous contre les abus.

Ces recommandations ont déjà donné lieu à la prise de mesures correctives par les différentes entités épinglées et dont la prise en compte aurait, peut être, rendu le présent rapport moins alarmant pour le Burkina Faso. Aussi la prise en compte du contexte, qui est celui du Burkina Faso, aurait-il facilité la compréhension de la situation pour l’observateur lambda. Le terrorisme a pris pied en 2016 dans le pays, devenu en quelques années une destination vivement déconseillée par les chancelleries occidentales. En 2019, le Burkina Faso est devenu le pays sahélien le plus ciblé par les attaques terroristes avec un rapport de force en défaveur des forces régulières, dans un attentisme sidérant.

Ebranlé dans ses fondements, le pays, au-delà de l’appel à la solidarité internationale, a tenté de mobiliser ses propres forces, dénommées Volontaires pour la défense de la patrie (VDP). L’ultime tentative de reprise en main de la situation par les FDS, appuyées localement par des VDP a coïncidé avec le réveil soudain et les cris d’orfraie de certains partenaires internationaux du pays, relayés par leurs organisations de défense des droits humains pour dénoncer des crimes de guerre, des exécutions extrajudiciaires sur des bases communautaires … Le rapport ne fait pas la part entre les victimes, ce peuple respectueux, travailleur et les coupables, ces « voyous » qui, sous le couvert d’une guerre sainte, font des veuves, des orphelins et privent le pays des Hommes intègres de cette paix qui a toujours fait sa spécificité.

Mais il nous semble qu’il en va aujourd’hui du Burkina Faso comme d’autres pays endurant au quotidien l’extrémisme violent : tant que des hordes de hors-la-loi viendront troubler la stabilité et obliger l’Etat à revoir ses priorités de développement, le risque de trouver sur le chemin des fils intègres demeurera. Avant d’être engagé dans la spirale terroriste avec la cohorte de crimes crapuleux, de victimes innocentes dans tous les milieux, rarement Amnesty international trouvait à redire sur la gouvernance en matière des droits humains au Burkina. Peut-être alors, faut-il aider le pays, initialement considéré comme « le ventre mou » militaire de la sous-région, à continuer à consolider ses acquis, à sauvegarder la vie et les intérêts du peuple.

Pour imager, il n’y a pas lieu de galvaniser David parce qu’il est « petit », moins baraqué que Goliath en les mettant sur le même registre. En quoi des forces qui ont été attaquées, souvent dans leurs repères, peuvent-elles figurer sur la même liste que des hordes de tueurs sans formation et sans idéologie fixe ? Osons croire que les conclusions de ce rapport ne serviront pas de base à des mesures de rétorsions internationales pour étouffer et priver un pays à forte « dépendance sécuritaire », de ses atouts qui lui permettent de tenir et de faire face à l’ennemi. Heureusement, il n’est dans l’intérêt de personne d’offrir ce coup de pouce inespéré à l’entreprise terroriste qui lorgne déjà les côtes du Golfe de Guinée.

Par Mahamadi TIEGNA
mahamaditiegna@yahoo.fr

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