Un compromis salvateur

 

 

Un compromis salvateur

Depuis le 29 juillet 2021, le magistrat Elysée Ouédraogo, au titre de la communauté catholique, a été élu pour présider aux destinées de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) pour cinq ans. Jusqu’au bout, tout le processus aura été émaillé de « conflits » qu’il faut forcément dégoupiller pour des commissaires, qui devront cohabiter cinq ans durant, et à qui revient la tâche d’organiser les élections. Du reste, les Burkinabè ne se font pas d’illusions, n’eut été l’implication personnelle du président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, il était à parier qu’un nouveau front s’ouvrirait dans un pays qui connait déjà des crises notamment sécuritaire et sanitaire.

 

Face au constat de « blocage», le chef de l’Etat en rassembleur, a, de façon « discrète » et efficace, dû rencontrer la chefferie coutumière de notre pays, notamment le Mogho Naaba Baongo. Cette médiation a permis au représentant des coutumiers, le Sao Naba, de renoncer finalement à son ambition de briguer la présidence de la CENI, suite au refus de l’opposition qui menaçait de boycotter l’institution, lui faisant courir le risque d’une paralysie certaine, voire le discrédit. La rencontre du président du Faso avec les leaders de la majorité présidentielle Simon Compaoré et de l’opposition politique Eddie Komboïgo pour « baliser» l’élection du président de la CENI, aura été décisive. Ce Burkina qui palabre avant de donner le sourire, est appelé de tout cœur par ses habitants qui ne veulent que la paix pour le développement de leur pays. Maintenant que le vin tiré a été bu « sans modération », il va falloir au-delà de tout, pouvoir revoir nos schèmes du vivre ensemble. L’intervention du chef de l’Etat et la suite « favorable » qui en a émané, réconforte les Burkinabè qui n‘oublient pas que le second mandat du président du Faso est bien placé sous le thème de la réconciliation nationale. Savoir s’oublier pour la communauté est une bien belle façon d’affirmer son patriotisme. Mais il faudrait plutôt que chacun joue pleinement sa partition. En l’espace de deux mois, Roch Marc Christian a été obligé d’intervenir « hors » champ pour solutionner des crises naissantes en prenant sur lui la conduite de la défense nationale avec les résultats probants qui viennent des théâtres des opérations. Et en s’investissant personnellement dans ce qui aurait pu être aussi une crise majeure, celle de la Commission électorale nationale indépendante.

Pourtant, les Burkinabè se satisfaisaient quand même d’une Commission électorale nationale indépendante qui avait sonné le requiem d’une commission nationale d’organisation des élections inféodée à l’administration, par conséquent partisane aux yeux d’une opposition qui, à l’époque, subissait les laminages d’un Tukgili à la mode. Pourquoi donc cette CENI, qui attendait certainement des réglages eu égard à la nouvelle donne politique de notre pays, s’est-elle brusquement grippée ? Cette institution ne répond-elle plus au contexte ? Faut-il quitter ce schéma égalitaire et paritaire de cinq commissaires issus de la majorité, de l’opposition et de la société civile ? Ou faut-il une CENI adaptée à nos réalités avec des hommes rompus en matière électorale ? Que revêt en réalité la notion de société civile dans un pays où les va et vient entre partisans ou observateurs se font au gré des intérêts du moment ? La guéguerre qui a entrainé les flottements, puis le report des élections à la CENI doivent nécessairement appeler à une revisitation de la faîtière des élections dans notre pays. Sur la composante chefferie traditionnelle au moins, l’Essai du professeur Albert Ouédraogo « Démocratie et cheffocratie » ou « la quête d’une gouvernance apaisée au Burkina Faso » est déjà une bonne base qui pourra permettre l’avancée des débats sur la question. Toutes ces questions devront être abordées sereinement pour balayer les scories et éviter la tempête comme celle qui a secoué la CENI.

Après la relance du processus électoral, celle du dialogue politique est la prochaine étape qui devrait se nourrir du sens de compromis salvateur qui a prévalu au sein de la classe politique, pour définitivement balayer les gros nuages d’août sur les prochaines échéances électorales.

 

Par Mahamadi TIEGNA

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