Le Japon fournit régulièrement du matériel à la FBBS pour le développement du baseball au Burkina.

Le Burkina Faso est un pays où le cyclisme, l’athlétisme et surtout le football constituent les sports les plus pratiqués et appréciés de la population.

Cependant, depuis cinq ans, une autre discipline méconnue du public, il y a une décennie, pointe à l’horizon avec ses performances non négligeables: le baseball.

Ce sport qui devient de plus en plus populaire est l’œuvre de l’excellente collaboration depuis 2008 entre la Fédération burkinabè de baseball et l’ambassade du Japon au Burkina.

Cette information, très peu de Burkinabè la connaissent, à part les amoureux de la discipline. Le Burkina Faso est l’actuel 50e mondial au classement du Baseball world Rankings 2022 Men’s en date du 31 décembre 2022. Ce classement de la World Baseball and Softball Confederation place le pays des Hommes intègres au 4e rang africain derrière l’Afrique du Sud, 1er en Afrique (25e mondial), l’Ouganda 2e(41e mondial) et le Zimbabwe 3e(46e mondial).

Certes, avec 61 points, le Burkina Faso se classe très loin des 4179 points de l’intouchable Japon, premier mondial de la discipline. Mais force est de reconnaitre que ces performances, à ne surtout pas minimiser dans un pays où la discipline est quasi-méconnue, sont l’œuvre de l’excellent parcours des Etalons lors des championnats d’Afrique de baseball en 2019 en Afrique du Sud.

En effet, le Burkina Faso a gagné ses lettres de noblesse dans le concert des nations de baseball, d’abord lors des éliminatoires régionales au Ghana où il a occupé la première place devant le pays hôte et le Nigéria.

Il s’était ensuite hissé quelques mois plus tard à la 4e place des premiers championnats d’Afrique de baseball, qualificatifs pour les Jeux Olympiques de Tokyo 2020.

Si le Burkina Faso peut être considéré de nos jours comme un pays de baseball en Afrique de l’ouest et une référence sur le continent, il le doit à l’excellent travail, depuis 2004, des jeunes volontaires (JOCV) de l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA).

« Depuis la création de la Fédération burkinabè de baseball et de softball en décembre 2004 nous avons bénéficié de l’appui des volontaires japonais qui nous ont appuyés dans la formation des joueurs, des coachs, des scoreurs et de tous les acteurs du baseball burkinabè », reconnait le président de la Fédération burkinabè de baseball et softball, Ibrahim Siboré.

Le déploiement de volontaires à Koudougou et Ouagadougou, poursuit-il, a permis de renforcer les capacités des clubs de baseball existants dans ces deux villes.

« Si ces deux villes ont un niveau de baseball très élevé, c’est grâce aux volontaires de la JICA. Si vous remarquez, dans nos différents championnats nationaux, Koudougou et Ouagadougou se hissent régulièrement en finale », révèle Ibrahim Siboré.

Le travail titanesque des volontaires Japonais

En effet, entre 2008 et 2018, huit volontaires Japonais ont assisté techniquement la Fédération burkinabè de baseball et de softball (FBBS) ainsi que les clubs burkinabè. L’un d’entre eux a marqué et continue de faire la très jeune histoire du Burkina Faso dans la pratique du baseball : Yuta Deai.

Les visages de tous les acteurs du baseball de même que les joueurs s’illuminent automatiquement à l’évocation de son nom. « Yuta est celui qui a boosté le niveau du baseball burkinabè à un niveau très élevé », s’exclame Ibrahim Siboré.

Les Etalons baseballeurs ont terminé à la 4e place des championnats d’Afrique en 2019, en Afrique du Sud.

L’ancien directeur technique national (2004-2016), Boukaré Sawadogo embouche la même trompette en indiquant qu’il a été le premier volontaire envoyé par la JICA en 2008 pour épauler la Fédération.

« Nous avons débuté l’implantation du baseball au Burkina en 1999. Nous avons donc commencé à participer en 2001 à des compétitions. Lors des compétitions nous avons rencontré des volontaires japonais qui participaient également aux tournois. Nous avons sollicité un volontaire pour nous appuyer, mais à l’époque la Fédération de baseball n’existait pas, c’était un peu compliqué. Mais les choses se sont réglées à la création de la Fédération », raconte Sawadogo qui souligne que l’apport de Yuta, depuis 2008 dans la promotion du baseball au Burkina Faso est inestimable.

La belle histoire entre Yuta et le Burkina Faso commence en mars 2008 lorsque le Nippon débarque à Ouagadougou comme volontaire à la JICA. Il est passionné de baseball depuis l’enfance, mais trouve au Burkina Faso une discipline presque méconnue.

Au début de son volontariat, il apprenait les fondamentaux de la discipline à des garçons et certains anciens apprenants dans des quartiers de la ville de Ouagadougou. Les activités de Yuta se formalisent plus tard avec son soutien à la Fédération burkinabè de baseball.

« Ouagadougou comptait trois équipes à l’époque. Cependant, il n’y avait pas d’environnement de baseball (entraîneur ou arbitre qui connaissait les règles du baseball, le terrain, les équipements). La mission attribuée par la Fédération de baseball est de renforcer les trois équipes existantes, d’augmenter le nombre de joueurs et d’équipements, d’organiser des tournois, de rendre le baseball populaire. La mission était de développer tout ce qui touche au baseball », révèle Yuta.

L’incontournable Yuta Deai

Il commence les week-ends à coacher les équipes qui existaient dans la ville de Ouagadougou, en leur prodiguant des conseils pour les rendre meilleures. Mais la mission du volontaire s’avère rude et il se rend très vite compte qu’il doit changer le fusil d’épaule.

Les clubs disposent désormais d’un terrain de baseball grâce à un don de l’ambassade du Japon.

La plupart des joueurs trainaient des lacunes qui étaient difficiles à corriger. « Alors, j’ai réuni des enfants qui ne connaissaient rien du baseball et j’ai commencé à leur parler de la discipline. Je trouvais plus facile d’apprendre la bonne pratique du baseball si les enfants n’ont pas une idée de ce que c’est. J’ai passé le maximum de temps possible avec les enfants, donc tous les jours, pas de temps en temps. Après cela, l’équipe de Gounghin est devenue un cas modèle qui s’est répandu dans divers endroits du pays », détaille-t-il.

Yuta achève son séjour comme volontaire japonais en mars 2010 et retourne au bercail. Pour autant, il ne veut pas abandonner les graines qu’il a semées du côté de Gounghin.

Dans son pays natal, il recherche des partenaires pour accueillir des joueurs burkinabè et en mars 2012, une équipe semi-professionnelle de Kochi, Fighting Dogs, accepte de les accueillir.

Cette tradition va se perpétuer chaque année avec de fréquents séjours de joueurs au pays du Soleil Levant, qui sera renforcé en avril 2017 avec la création de son centre, l’Académie de baseball à Hokkaido devenue une structure qui accueille les sportifs burkinabè.

Aussi, la 4e place du Burkina Faso au championnat d’Afrique de 2019 en Afrique du Sud est à mettre, en grande partie, à l’actif de l’engagement de Yuta, le sélectionneur très attentionné des Etalons (il n’hésite pas à mettre la main à la poche pour financer certains voyages de l’équipe nationale).

« Lorsqu’il y a une compétition internationale, toute l’équipe se rend au Japon pour un stage. Dans le cadre des éliminatoires des JO 2020, l’équipe burkinabè s’est rendue au Japon grâce à Yuta », mentionne Ibrahim Siboré.

Le Burkina Faso est aujourd’hui l’une des premières nations de baseball, appuie Boukaré Sawadogo, grâce à l’équipe des moins de 12 ans que son coach national a montée en 2009.

« Ils avaient 10 à 11 ans à l’époque. Même lorsque Yuta est retourné au Japon, il leur envoyait par vidéo des exercices spécifiques pour poursuivre leur progression. Et pendant les vacances il faisait venir certains au Japon pour des séjours de 2 à 3 mois », se remémore Boukaré Sawadogo.

Lassina Sanfo, la fierté du baseball burkinabè

Yuta, à l’époque en compagnie de ses jeunes joueurs du quartier Gounghin.

La figure de proue de cette équipe présentement est sans conteste Lassina Sanfo.

Joueur professionnel depuis 2015 et actuel capitaine de son équipe, Kochi Fighting Dogs, le jeune Burkinabè a été désigné meilleur joueur de champ de son championnat pour la saison 2020-2021, dans la ligue de SHIKOKU ISLAND LEAGUE au Japon.

« J’ai connu le baseball avec Yuta en 2008. En 2013, je suis arrivé à Hokkaido, précisément dans le village de Furano chez Yuta, pour me former. Tout s’est bien passé grâce aux encouragements de tous les fans dans la ville de Kochi. Yuta est l’une des personnes les plus importantes dans le développement du baseball au Burkina Faso », estime le joueur de Kochi Fighting Dogs, Lassina Sanfo.

Tous les acteurs du baseball burkinabè sont unanimes: Yuta est à la base de la carrière professionnelle que mène Lassina Sanfo au Japon et qui sera peut-être rejoint très bientôt par Hamidou Kafando, le capitaine des Etalons.

Pour l’ex-volontaire, cet engagement provient de sa passion pour le baseball.

« Ma passion pour le baseball est issue de la curiosité. Raison pour laquelle je continue à faire avancer l’histoire du baseball au Burkina Faso avec les jeunes burkinabè engagés. J’aime voir l’impossible devenir possible. J’apprécie voir les rêves se réaliser. Je ne mets pas de limites aux potentiels humains », justifie-t-il, un brin philosophe.

Le complexe sportif, la fierté des acteurs du baseball

L’engagement sans faille de Yuta, les appuis permanents de la JCA et de l’ambassade du Japon, de l’avis du président de la Fédération, Ibrahim Siboré, ne peuvent qu’offrir un avenir meilleur au baseball burkinabè.

Une trentaine de clubs sont présentement affiliés à la Fédération et les nombreux dons de la JICA ainsi que de l’ambassade en matériels augmentent leurs performances.

« C’est grâce à ces dons que nous continuons à pratiquer le baseball au Burkina. Nous sommes en voie de recevoir un gros lot de matériel grâce encore à Yuta. Il nous envoie une citerne de matériel par le biais du club les Dragons, un autre grand club du Japon », apprécie Ibrahim Siboré.

Et que dire du complexe sportif avec terrain de baseball inauguré en fin février dernier ! Selon Ibrahim Siboré, ce don du Japon à plus de 50 millions FCFA, enlève une grosse épine à leur pied.

« Disposer d’un terrain où on peut tracer et avoir les dimensions selon les normes internationales permettra déjà de nous entrainer et nous préparer aux compétitions internationales. Il est difficile de pratiquer son sport aux heures voulues lorsque l’on ne dispose pas d’un terrain », se félicite-il.

La FBBS, à travers son président, dit vouloir aller tutoyer les sommets dans un proche avenir. Pour ce faire, il est nécessaire, selon Ibrahim Siboré, de créer une ligue professionnelle pour permettre aux clubs de se constituer en clubs semi-professionnels.

L’objectif est de permettre aux différentes équipes nationales d’avoir un niveau international afin que les joueurs puissent rejoindre des formations huppées.

Yuta, lui, conseille la création de « ligues sportives » pour que « les enfants et les adultes puissent nourrir un idéal ». En attendant, l’ancien volontaire japonais n’est pas prêt à lâcher le Burkina Faso et ses baseballeurs.

« J’ai beaucoup appris au Burkina Faso. J’ai appris la joie de transformer 0 en 1. J’ai appris le plaisir de transformer 1 en 2. Le Burkinabè aura un bel avenir s’il arrive à nourrir la passion des gens. Le Burkinabè a beaucoup de potentiel. Il n’y a pas que le baseball. Mon rêve est d’élargir les possibilités des Burkinabè », conclut-il.

Sié Simplice HIEN

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