Utilisation des réseaux sociaux au Burkina: des « créateurs de contenus » s’illustrent dans plusieurs domaines

Les réseaux sociaux sont des plateformes de divertissement et des sources de revenus financiers pour des créateurs de contenus.

Les réseaux sociaux occupent une place prépondérante dans la société moderne. Facebook, TikTok et Instagram par exemple offrent un espace virtuel où des individus partagent des idées, des informations et interagissent. Cette activité séduit plusieurs jeunes burkinabè qui créent et publient des vidéos sur certaines réalités, souvent sous forme d’humour. On les appelle à tort ou à raison des « créateurs de contenus ». Allons à la découverte de quelques-uns.

 

Selon l’Intelligence artificielle (IA), un créateur de contenus est un professionnel du web qui imagine, conçoit et met en ligne différents types de contenus (textes, images, vidéos, audio, etc.) pour des sites web, des blogs ou des réseaux sociaux comme YouTube, Instagram, TikTok, etc. L’objectif principal est de capter l’attention d’un public et de l’engager à travers des publications de qualité, qu’il s’agisse d’informer, de divertir ou de susciter des émotions.  Pour d’autres, aussi simple que cela puisse paraitre, un créateur de contenus crée du contenu. Il peut s’agir de photos, de vidéos (sur YouTube, Instagram ou TikTok), d’articles de blog ou de podcasts, qu’il diffuse sur les réseaux sociaux ou sur son propre site web. C’est une personne experte dans son domaine, qui a, à cœur, de partager sa passion et de proposer des contenus uniques. Ses publications sont visuellement attractives, racontent une histoire ou répondent à un problème, une interrogation. Certains créateurs de contenus n’ont aucune attente financière liée à leur activité. Pour d’autres, il s’agit de leur métier. 

De l’avis de Bassératou Kindo, journaliste, ancienne présidente de l’association des blogueurs du Burkina Faso, un créateur de contenus est une personne qui crée du contenu digital : vidéo, podcasts, textes… Elle utilise l’internet pour exprimer sa passion, son expertise dans un domaine. Cela suppose qu’elle a une ligne éditoriale, une constance, une communauté qui la suit. « Mais quand on suit l’éco-système numérique du Burkina Faso, il n’y en a pas de façon claire. On a beaucoup de gens qui se disent créateurs de contenus, mais moi en tant que personne avertie du digital, je n’arrive souvent pas à détecter leur ligne éditoriale. Pour moi, la création de contenus doit respecter obligatoirement la ligne éditoriale et l’identité de la personne », souligne-t-elle. 

Selon Bassératou Kindo, un bon créateur de contenus doit forcément avoir une ligne éditoriale.

Au-delà de toutes ces considérations, qu’on les appelle à tort ou à raison Créateurs de contenus, certains Burkinabè se démarquent du lot. Ils se distinguent par les contenus de leur publication. Parmi eux, il y a Delphine Sidbèga. C’est une jeune femme active sur les réseaux sociaux. Elle publie des vidéos sous forme de petits sketches humoristiques sur l’actualité people, les réalités sociales. Elle collabore souvent avec des comédiens, des artistes pour captiver son public dans « Delphy show ». Avec plus de 730 000 followers sur TikTok et environ 570 000 sur Facebook, 94 500 sur YouTube et 24 000 sur Instagram, elle est devenue populaire. Pour atteindre ce sommet, que du chemin parcouru. C’est en 2017, alors passionnée du cinéma, qu’elle commence aux côtés d’un comédien burkinabè qui faisait des vidéos. Elle explique : « à partir de 2019, je me suis vraiment lancée dans la création de contenus. J’ai commencé par YouTube où je faisais les news de « Delphine show ». Je traitais l’actualité people teintée d’humour. Les gens ont aimé. Par la suite, j’ai continué dans les « scénarios gag ».  Aujourd’hui, elle a du succès au point qu’elle est suivie dans ses vidéos quotidiennes par des milliers de personnes. Elle confie que pour avoir un tel succès, il faut être armé de patience et avoir de la passion pour ce l’on fait. « Sans passion, même avec le talent, on peut ne pas aller loin. La passion aide à surmonter les difficultés, les obstacles », déclare-t-elle. 

Parmi les créateurs de contenus burkinabè, il y a un médecin qui suscite la curiosité des internautes. Par ses publications, il est arrivé à captiver plus de 130 000 abonnées sur Facebook. C’est Dr Abdallah Ouédraogo, médecin de santé publique, artiste-slameur. Depuis 2022, sur un ton humoristique, il sensibilise le public sur les thèmes de santé en français ou en mooré. Il travaille avec une équipe où il joue le rôle de médecin et les autres sont des patients. Dr Abdallah explique les raisons de sa présence sur les réseaux sociaux : « en tant que médecin, nous avons deux rôles : soigner les gens et leur apporter l’information afin qu’ils ne tombent pas malade. Le meilleur canal pour passer le message est la musique et l’humour. L’humour est très consommé par tous les âges ». Ses sources d’inspiration sont surtout les faits de société à travers lesquels, lui et son équipe lancent des messages de sensibilisation. Chaque mois, ils font l’effort de faire une ou plusieurs publications en fonction de la disponibilité de l’équipe. 

Peggy Ingrid Ouédraogo est active sur les médias sociaux sous le nom de « Kis Mom ».  C’est en 2018 qu’elle y fait son apparition en tant que mannequin photo pour des entreprises, notamment sur Facebook. Par la suite, elle affirme que tout en faisant le job des entreprises, elle racontait son quotidien. Progressivement, elle captive l’attention du public. C’est ainsi qu’aujourd’hui, elle se retrouve avec environ 95 000 abonnés sur TikTok et 12 500 sur Instagram. Sa famille, très réservée, dit-elle, lui reprochait de s’afficher beaucoup. Mais pour finir, la créatrice a pu avoir le soutien de ses proches. Certains font appel à ses services pour vendre leurs produits. 

Delphine Sidbèga amuse 730 000 followers sur TikTok dans « Delphy show».

Sur les réseaux sociaux, Laurine Hien, alias « Laurine a dit » se distingue dans le domaine de l’art culinaire. Passionnée de cuisine, elle publie en ligne ses spécialités asiatiques, notamment japonaises.  De façon captivante et personnelle, elle aborde ses sujets. « Laurine a dit » est suivi par plus de 37 000 abonnés sur TikTok. A sa communauté TikTok, elle propose de bons plats de bouffe, de bonnes adresses pour bien manger. Ce sont des endroits généralement qu’elle fréquente ou qu’elle découvre. « Je parle en détails de ce que j’apprécie, les spécificités de l’endroit. Pour leur donner plus de visibilité », affirme-t-elle. La mère de famille dit le faire pour son propre plaisir. « En retour, je ne gagne pas grand-chose. Certains propriétaires ne savent même pas que c’est moi qui ai fait la vidéo. Je ne leur dis pas », poursuit-elle. Elle dit avoir un appui de taille qui est son conjoint. Ce serait d’ailleurs lui qui a eu l’idée des coups de tête qu’elle fait à la fin des vidéos. 

Les avantages 

Ces jeunes burkinabè ne font pas de la création de contenus un métier. Même s’ils ne sont pas au stade de monnayer leur activité avec des plateformes, il n’en demeure pas moins qu’ils en tirent souvent profit. Delphine Sidbèga, gagne bien sa vie grâce à ces réseaux. Souvent ambassadrice, elle signe des contrats avec des entreprises nationales et internationales. A l’écouter, un contrat lui a apporté environ 2 millions francs CFA. Son plus petit contrat peut être évalué à 350 mille F CFA. Delphine, en plus des vidéos gags, gère une entreprise d’évènementiels. Elle projette se lancer dans la production cinématographique. Mais elle continuera de servir ses abonnés avec « Delphy show ».

Pour Dr Abdallah, l’objectif premier de sa présence sur les réseaux sociaux est la sensibilisation. C’est pourquoi, il est difficile pour lui, d’en faire une source de revenus financiers. Néanmoins, les entreprises qui souhaitent joindre leur image à ce qu’ils font, sont mises à contribution pour assurer le déplacement des membres de l’équipe. « Nous refusons quand les éléments proposés sont contraires à ce que nous défendons », prévient-il. Le meilleur gain est l’effet positif de ses publications sur ceux qui le suivent. C’est le cas d’une de ses vidéos faites sur le palu en s’inspirant d’Aïcha Trembler. Pour montrer aux gens que le paludisme peut aussi faire trembler et qu’il faut se protéger. « Cette vidéo a touché plus d’un million sept cent mille personnes. On a reçu des commentaires venant de

Laurine Hien alias « Laurine a dit » s’investit dans l’art culinaire pour le bonheur de ses abonnés sur TikTok.

nombreux pays. Cela nous a montré qu’il faut faire un travail de qualité, pour ne pas influencer négativement la communauté », se réjouit-il. Un autre exemple de vidéo qui a impacté est celle faite sur la faiblesse sexuelle. « Des victimes de ce mal se cachent pour prendre certains produits dangereux, car elles ont honte d’aller voir un spécialiste. Après publication de la vidéo, j’ai reçu beaucoup de messages.  Certains ont confié que le fait d’en parler leur donne courage et qu’ils souhaitent passer me voir », témoigne-t-il.

Pour Peggy Ouédraogo, la visibilité lui permet de donner une formation gratuite en maquillage. « J’essaie d’allier la publicité à mon quotidien pour diversifier », dit-elle. Elle confie que dans ses collaborations, l’argent n’est pas mis en avant. Ce qui compte le plus pour elle, ce sont les relations.  Elle signe des contrats, fait des pubs qui lui procurent des revenus dont le montant dépend des produits. Elle a aussi un salon de coiffure et est chargée de communication d’une entreprise. 

Le revers de l’activité

Les créateurs ne reçoivent pas uniquement des encouragements, des likes ; ils ne bénéficient pas uniquement de partages. Ils sont sujets à toutes sortes de critiques. Etre célèbre a un prix. « J’ai été victime d’une réaction venant d’un groupe. Après avoir publié une vidéo, j’ai reçu un message me disant que ce que j’ai avancé dans la dernière phrase est une diffamation. Ils me préviennent qu’ils vont saisir les autorités compétentes. Quelques minutes après, les auteurs s’excusent, car ils n’avaient pas bien compris », raconte Dr Abdallah. Selon lui, ces personnes étaient prêtes à aller loin avec ce qu’elles ont cru être une diffamation. « Le fait d’être populaire sur les réseaux ne plait pas à tout le monde. Les gens cherchent la petite faille pour vous attaquer. Vous avez donc interdiction à ne pas leur donner l’occasion de vous attaquer », poursuit-t-il. C’est pourquoi, il fait très attention à tout ce qu’il annonce. Selon lui, la prudence doit être de mise. 

Delphine Sidbèga pense qu’il est compliqué pour une femme d’être sur les réseaux sociaux. « Les gens oublient qu’on fait un travail. Les hommes t’écrivent pour te courtiser. Ce n’est pas un harcèlement, mais on est vue comme des filles faciles. Je ne réponds pas aux messages qui ne parlent pas de boulot », avance-t-elle. Pour Peggy Ouédraogo, les

Peggy Ingrid Ouédraogo est active sur les médiaux sociaux sous le nom de « Kis Mom ».

followers ne sont pas toujours bienveillants. Certains profitent pour tenter de lier amitié, de courtiser. Elle relate : « j’essaie d’être courtoise. Mais ce n’est pas évident. Quand je mets un contact après une publication, je n’ai pas de répit ». Elle raconte un cas de mauvaises expériences. Une personne sollicite son aide pour faire la publicité de ses produits. Sans fixer de montant, elle lui lance : « vous les enfants d’aujourd’hui, vous pensez que c’est facile d’avoir l’argent. Pour faire des vidéos seulement tu veux qu’on te paye ». 

C’est pour dire que les gens ne considèrent pas leur activité comme un travail. « Ils pensent que c’est juste prendre une caméra pour se filmer et publier. Ils ne nous prennent pas au sérieux. Alors qu’il y a des heures de travail derrière les publications », déclare-t-elle. Elle dit envisager de limiter ses apparitions pour sa tranquillité et celle de sa famille. Même si elle peut compter sur l’appui de son partenaire. 

Quelques qualités d’un bon créateur de contenus

Selon Bassératou Kindo, un bon créateur de contenus doit forcément avoir une ligne éditoriale. En plus, il faut de la passion, la constance et un travail de bonne qualité obtenu grâce à un matériel de qualité : un bon téléphone, un studio, une bonne connexion… Ces critères réunis permettent de fidéliser la communauté au point que quand le créateur s’absente, il est réclamé. Il faut être innovant, avoir une bonne plume pour écrire les scénarios, avoir une bonne équipe. Plus les images sont belles et le son audible, plus les gens aiment. Selon Delphine Sidbèga, un créateur de contenus doit être armé de patience. Il doit aimer ce qu’il fait avec passion. De l’avis de Dr Abdallah, un bon créateur de

contenus a un fil conducteur qui le guide.  Ce qui lui permet à tout moment d’avoir du contenu. Les gens vont sur sa page pour avoir des informations dans son domaine. C’est une personne qui doit être aussi exemplaire pour ne pas influencer négativement. Elle doit être intègre, avoir de l’imagination, de l’originalité. Le contraire peut entrainer une

Dr Abdallah : « l’humour est le meilleur canal pour faire passer des messages de sensibilisation ».

réduction du nombre des membres de sa communauté.  Quant à Peggy Ouédraogo, elle croit que pour réussir dans ce domaine, il faut savoir accepter les critiques, qu’elles soient positives ou négatives. Laurine Hien suggère de ne pas se laisser influencer par des commentaires désagréables. Pour elle, quand on ne supporte pas certaines choses, il est préférable de s’abstenir de faire des publications. 

Irène Ouédraogo fait partie des followers. Elle apprécie particulièrement les publications de « Laurine a dit », Peggy, Sarah Rouamba… Elle trouve que Laurine a un style particulier de s’adresser à son public, de faire découvrir de bonnes adresses de restauration en alliant humour et rhétorique. Elle souhaite que les créateurs burkinabè s’engagent plus dans des causes qui méritent d’être mises en avant. Ils devraient utiliser leur popularité pour défendre des causes nobles, importantes. Elle conseille de ne surtout pas tomber dans le buzz. Pour Soraya Rouamba, les créateurs de contenus burkinabè font du bon boulot. La qualité de l’image, la manière de s’exprimer, les thématiques abordées sont à saluer. Elle apprécie particulièrement Djemila Diallo. Celle-ci œuvre dans le cadre de la lutte contre les cancers de sein. Elle fait de la sensibilisation et des formations. Elle demande aux créateurs de se faire accessibles. Cela peut leur ouvrir des portes ou les aider à améliorer leurs contenus.

Par ailleurs, Bassératou Kindo conseille de ne pas tout publier sur les réseaux sociaux, surtout les informations professionnelles et privées. Par contre, elle encourage les jeunes à s’intéresser au digital et à la création de contenus. Car pour elle, créer du contenu fait de la mémoire pour la jeune génération. Elle leur conseille de s’intéresser aussi à YouTube comme ils le font avec Facebook et TikTok. « YouTube est une plateforme où on peut sauvegarder certaines données. Plus on crée, plus on raconte notre histoire par nous-même. Mais si on laisse, les gens le feront à notre place et nous sortirons perdants », prévient-elle, avant d’encourager la création de contenus textes pour Wikipédia également.

Habibata WARA

 

Légendes : 

1-Les réseaux sociaux sont des plateformes de divertissement et des sources de revenus financiers pour des créateurs de contenus.

 2-Delphine Sidbèga amuse 730 000 followers sur TikTok dans « Delphy show». 

3-Dr Abdallah : « l’humour est le meilleur canal pour faire passer des messages de sensibilisation ».

4-

5-Peggy Ingrid Ouédraogo est active sur les médiaux sociaux sous le nom de « Kis Mom ».  

6-Laurine Hien alias « Laurine a dit » s’investit dans l’art culinaire pour le bonheur de ses abonnés sur TikTok.

7- Dr Abdallah pendant une sensibilisation.

 

Voir ph dossier Créateurs de contenus LU………………mac adama

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