Depuis l’adoption en 2015 du Pacte national pour le renouveau de la justice (PNRJ), suite à des Etats généraux consacrés au secteur, des réformes ont été engagées pour restaurer le système judiciaire burkinabè. Les violations des règles de droit, l’intolérance, la propension à se rendre soi-même justice, l’incivisme, avaient fini par créer une crise de confiance des populations envers l’appareil judiciaire.
Il fallait donc agir pour rectifier le tir. Le PNRJ porte avec lui des correctifs que les gouvernants travaillent à apporter, en vue d’asseoir une justice crédible et plus accessible, une justice qui répond aux aspirations profondes des citoyens. Cette dynamique est entretenue par les différents pouvoirs, au nom de la continuité de l’Etat. Ainsi, l’Assemblée législative de transition (ALT) a adopté à l’unanimité, le lundi 9 juin 2025, le projet de loi portant relecture de l’organisation judiciaire au Burkina Faso.
Plusieurs innovations ont été introduites pour améliorer le fonctionnement de la justice, un appareil dont la complexité et la lenteur font régulièrement débat. Au nombre de celles-ci figurent l’institution de la possibilité pour les juridictions de tenir des audiences dans une des langues nationales, l’octroi de la compétence au président du Tribunal de grande instance (TGI) de délivrer des certificats d’individualité, l’intégration des assesseurs dans la composition de la cour d’appel et la création d’un tribunal de travail dans le ressort de chaque TGI.
Les nouvelles dispositions consacrent également, parmi tant d’autres, à l’élargissement des compétences du juge des enfants qui connait dorénavant de tout délit et contravention commis par les mineurs et la prise en compte du doyen des juges d’instruction et des assesseurs dans la composition des TGI. Censées régler des incohérences et des incomplétudes, comme l’a indiqué le ministre de la Justice et des Droits humains, Edasso Rodrigue Bayala, les innovations apportées vont rendre la justice davantage accessible et opérationnelle, au bonheur des populations qui attendent beaucoup de ce secteur sensible.
Autant dire que la machine judiciaire, objet de critiques, fait lentement et surement sa mue. Confronté à des problèmes de ressources, la justice burkinabè s’emploie à jouer son rôle régalien qui consiste, entre autres, à assurer la protection juridique des citoyens, à rendre justice en cas de litiges, à sanctionner les infractions et à maintenir l’ordre public.
Les populations regagnent peu à peu confiance à leur justice, à la lumière des efforts consentis pour instaurer la fluidité et la célérité dans le traitement des dossiers. Plusieurs affaires de détournements de fonds publics ou de blanchiments de capitaux, comme celles concernant l’ex-ministre des Transports, Vincent Dabilgou et des responsables du ministère de l’Action humanitaire dont Amidou Tiegna, ont été instruites et jugées avec une rapidité salutaire.
De plus en plus, on semble s’éloigner de cette époque où on parlait de justice à deux vitesses, où la fameuse formule « on te fait et puis il n’y a rien » était beaucoup usitée. On peut dire en toute modestie que la justice burkinabè œuvre progressivement à pallier ses insuffisances majeures dont, entre autres, l’influence du politique, le manque de moyens mis à la disposition des acteurs et l’inaccessibilité des services judiciaires. Le chemin est encore long mais, la dynamique est enclenchée et maintenue. Tout n’est pas rose pour le moment. La justice burkinabè est loin d’être parfaite mais, elle travaille à son rythme à atteindre un niveau de prestation plus appréciable. C’est à l’honneur des autorités et des acteurs du domaine…
Kader Patrick KARANTAO