Culture de la fraise à Ouagadougou: pari gagné au barrage de Boulmiougou

L’heure est à la récolte dans les plantations de Gilbert Bonkoungou.

Réussir la culture de la fraise dans nos contrées relève d’un parcours du combattant. Mais c’est un pari gagné par des maraîchers au barrage de Boulmiougou, situé à la sortie-ouest de Ouagadougou. Zoom sur la production de la fraise sur ce site.

Le barrage de Boulmiougou, sis à la sortie-ouest de Ouagadougou, sert à la culture maraichère. Ils sont nombreux, hommes et femmes, qui s’adonnent à cette activité. Eux-mêmes se dénombrent à plus de 600. Ils se sont donné le défi de réussir la culture de la fraise. En cette matinée du 20 mars 2024, nous sommes allés à leur rencontre. Une plage de plantes maraichères en croissance, à perte de vue : salade, choux, oignon, tomate, navet, betterave, fraise…

Plusieurs personnes s’activent sur le site. Parmi les hommes, il y a quelques femmes. L’heure semble être au désherbage, à l’irrigation, à la récolte ou à la commercialisation. Le site est divisé en petites parcelles ou planches. A côté, se trouvent des puits alimentés par l’eau du barrage asséché. Au fur et à mesure que nous progressons sur le site à la recherche du président de la Coopérative « Sougourinooma», Zakaria Zagré, le bruit des motopompes s’accentue.

Raccord en main, allant d’un bout à l’autre de ses plantations, Zakaria Zagré, nous accueille. En plus de la fraise, à l’image de tous les autres, il entretient d’autres cultures. Il montre des plantations de fraise. Dans le processus, il fait savoir que le sol est préparé depuis septembre, le repiquage se fait en octobre pour avoir les premières récoltes en janvier.

Celles-ci se font chaque trois jours, de 6 heures à 8 heures du matin. Du haut de ses trente années d’expérience dans la culture maraîchère, il pense que la production de la fraise est exigeante et comporte trop de risques. Il faut des moyens financier, technique…
« Il y a des moments où on achète un pied à 150 F CFA. Et il faut planter au moins une soixantaine de pieds sur une planche. Sans oublier les fertilisants comme la fumure organique, le compost, les herbicides… », dit-il.

10 tonnes à l’hectare

Des plants de fraise en gestation.

Les fraisiers ont besoin d’un sol très fertile. Il estime le rendement à 10 tonnes à l’hectare. Le président de la Coopérative « Sougourinooma » de Boulmiougou, créée en 2014 avec 147 membres, pense qu’il n’a pas fait beaucoup froid cette année. Pour cette saison, la récolte de la fraise n’est pas bonne. Il évalue ses gains autour de 700 000 F CFA au lieu de 2 millions F CFA comme la saison précédente.

En plus du climat qui n’a pas été propice, il croit qu’il faut une nouvelle variété. La variété la plus cultivée depuis plus d’une vingtaine d’années ici est le Kamarosa. Adama Ouédraogo consacre une partie de ses terres à la culture de la fraise également. Approchant la quarantaine, il dit être actif sur ce site depuis une vingtaine d’années. « J’ai appris la maraicher-culture avec mes parents.

Je fais la fraise sur une dizaine de planches », confie-t-il. A l’entendre, c’est depuis le mois de septembre qu’il commence à préparer la terre pour la rendre plus fertile. Après, c’est le repiquage des pieds. L’arrosage se fait une fois par jour. La récolte dure de janvier à Avril. « Je peux avoir 100 000 F CFA par mois. Bien que la récolte du fruit rouge soit en deçà de ses attentes, il reste optimiste, car la demande est grandissante.

C’est pourquoi, il invite les jeunes désœuvrés à les rejoindre. « Ici, il y a du travail et on ne sort pas perdant », déclare-t-il. Justine Kabré fait partie des 27 femmes de la Coopérative. Elle est productrice de fraise depuis 17 ans sur un espace de 20 planches. Comme la plupart des exploitants de ce site, elle entretient plusieurs cultures maraichères. Pour elle, cultiver la fraise est contraignant, mais rentable. Elle encourage les femmes à s’y intéresser.

Gilbert Bonkoungou, lui aussi, produit la fraise. Il avoue que c’est un don de soi. Bien qu’il lui reste encore un mois de récolte, il craint que les résultats ne soient pas à la hauteur de ses attentes. Toutefois, il a pu satisfaire ce jour-là une cliente du nom de Saoudata Ouédraogo à qui il a vendu le kilogramme à 2 000 F CFA. Celle-ci en a pris 26.

Le maraîcher informe que la plupart des acheteurs sont des femmes. Très tôt le matin elles prennent d’assaut le site. Ramata Ouédraogo en fait partie. Après Boulmiougou, c’est au grand marché, Rood-Wooko qu’elle écoule sa marchandise. Elle étale ses fraises sur une assiette. Le tas de huit petites fraises coûte 100 F CFA. « J’ai payé le kilogramme à 1 500 F CFA pour revendre à 2 500 F CFA.

J’ai obligation de vendre aujourd’hui même les 25 kilogrammes que j’ai pris », affirme-t-elle. Une de ses camarades, Marie Claire Nacoulma nous apprend qu’elle a arrêté de vendre la fraise à cause de sa rareté et de sa cherté. Avec plus de 10 ans d’expérience dans le commerce de ce fruit rouge, elle avoue que la récolte n’est pas bonne cette année. Elle regrette qu’il en soit ainsi, car le commerce de fraise est rentable.

Les difficultés

Des fraises produites au Barrage de Boulmiougou de Ouagadougou.

Ali Sini est le responsable de la zone 2 (environ 400 personnes). A l’entendre, la grosse difficulté à laquelle ils font face est le manque criant d’eau. Le barrage a déjà tari en mi-mars. Il doit être aménagé pour qu’il puisse retenir beaucoup d’eau. « Avec plus d’une vingtaine d’années d’activité ici, je constate que le problème d’eau impacte négativement notre travail », déplore-t-il. Il appelle les autorités à l’aide pour la construction de forages. Une autre difficulté est liée à la commercialisation. Consommer de la fraise n’est pas dans les habitudes alimentaires des Burkinabè.

D’où, un faible marché intérieur. Selon M. Zagré, lui et ses camarades s’organisent comme ils peuvent pour l’écoulement de leurs produits. C’est ainsi qu’ils misent sur des achats et des ventes groupés. Pour l’occasion, ils peuvent récolter environ quatre tonnes à destination du Togo, de la Côte d’Ivoire…. « Cependant, il y a des moments où nos marchandises sont refoulées. Tu peux préparer une commande pour convoyer par un vol de la compagnie Air Burkina.

Et à l’aéroport, on te dit qu’il n’y a plus de place. Nous souhaitons qu’on nous réserve de la place dans chaque vol », annonce-t-il. Selon M. Sini, le problème de conservation se pose également. C’est un produit dont la manipulation et la conservation sont délicates. C’est dans cette optique qu’il réclame l’érection de chambres froides pour la conservation en cas de mévente.

Pour le président Zagré, les structures de recherche nationales doivent s’intéresser à la culture de la fraise. De nouvelles variétés pourraient voir le jour. « Nous exploitons la variété « kamaroso » depuis belle lurette. Elle n’est plus rentable et il faut de nouvelles espèces. Sur le marché international, le pied de nouvelles variétés coûte 800 F CFA et l’achat ne peut se faire qu’à partir de dix mille pieds. Ce qui n’est pas à la portée de tous », révèle-t-il.

Habibata WARA


Origine de la fraise

Originaire d’Amérique du sud, le fraisier est une plante de type vivace et dont les feuilles mesurent 10 à 15 cm de haut. Il existe plusieurs variétés de fraise. Elles se distinguent les unes des autres par rapport à la forme, au parfum, au taux de sucre, au degré d’acidité. Cette plante aux nombreuses vertus thérapeutiques fait partie de la famille des rosacées. La fraise serait un bon remède contre les troubles digestifs grâce à sa richesse en fibres. Elle aiderait à réduire les ballonnements intestinaux. Elle est riche en eau et serait un bon stimulant pour le système immunitaire et lutte contre la fatigue.

Source : Internet