Des dénonciations des cas de sorcellerie par des guérisseurs et guérisseuses dans les communes rurales de Bané et de Bagré, dans la province du Boulgou, région du Centre-Est, créent le désordre depuis un certain temps dans ces deux localités. Informé, le gouverneur de la région, Antoine Ouédraogo, a échangé avec ces guérisseurs et guérisseuses, le jeudi 27 juin 2019, à Tenkodogo.
«Depuis un certain temps, il y a un phénomène d’installation de guérisseurs dans notre région, plus particulièrement dans la province du Boulgou dont l’activité consiste essentiellement à la dénonciation de cas de sorcellerie. Cela a pour conséquence l’exclusion sociale, avec les désagréments qui s’en suivent. Nous avons jugé bon de les rencontrer pour recadrer leur activité parce qu’ils travaillent dans l’illégalité. Car, ne disposant pas d’autorisation d’exercer. De plus, ces dénonciations vont porter un coup à la cohésion sociale et au vivre-ensemble dans notre région. Ils devraient se limiter à soigner uniquement les malades plutôt que de dénoncer des cas de sorcellerie», a déclaré le gouverneur du Centre-Est, Antoine Ouédraogo, à l’entame de sa rencontre avec les guérisseurs, venus des villages des communes de Bané et Bagré. Il a étayé ses propos par des cas de dénonciation qui lui sont parvenus, notamment des cas de personnes qui ont été violentées, ligotées et frappées par des Kogl-wéogo.
Celles-ci ont porté plainte, soit à la police, à la gendarmerie et même auprès du procureur près le Tribunal de grande instance (TGI) de Tenkodogo. «Je suis devenu guérisseur par un don de Dieu. Je n’ai pas acquis mon don à la suite d’une maladie et je ne m’y attendais pas. Je n’ai pas cherché non plus ce pouvoir de guérir. J’ai eu une vision un soir où j’ai été investi du pouvoir de soigner. Ceux qui m’ont donné ce pouvoir, m’ont instruit de soigner toutes sortes de maladies», a déclaré Adama Dabré, guérisseur du village de Bourma, commune de Zabré. Selon lui, sa méthode de travail ne consiste pas à dénoncer la sorcellerie ; ce sont les malades eux-mêmes qui dénoncent les auteurs pendant la transe de délivrance. Adama Dabré a dit avoir compris le message du gouverneur, à savoir éviter d’accuser de sorcellerie des personnes.
Car, cela met à mal la cohésion sociale. Comme Adama Dabré, les guérisseurs ont pris l’engagement de ne plus faire des dénonciations en matière de sorcellerie, mais de soigner leurs malades sans tenir compte de leurs aveux. Si la venue des guérisseurs dans la commune de Bané a été salutaire pour la population, le maire Issouf Kéré a déploré, cependant, le fait que cette situation, au regard des conflits générés par les cas de dénonciation de sorcellerie, soit devenue un problème. Il a dit avoir reçu des plaintes de la population, notamment des femmes accusées de sorcellerie et au moins une vingtaine de familles de sa commune sont en difficulté à la suite de dénonciation de sorcellerie. «En plus du fait que certaines personnes sont chassées de leurs familles, il y a également des mésententes, des discordes et des conflits familiaux. Une situation conflictuelle devenue inquiétante», a-t-il ajouté. Les préfets, les maires et les forces de l’ordre ont été instruits à cet effet par le gouverneur pour l’exécution des instructions et des sanctions seront prises à l’encontre des contrevenants, a prévenu Antoine Ouédraogo.
Bougnan NAON