Décès de Dr Luc Marius Ibriga : florilège d’hommages à « un homme multidimensionnel »

Enseignant-chercheur en sciences juridiques et politiques dans les universités Joseph-Ki-Zerbo et Thomas- Sankara et ancien contrôleur général d’Etat, Dr Luc Marius Ibriga a tiré sa révérence au petit matin du 25 décembre 2022 à l’âge de 66 ans.

Dr Luc Marius Ibriga n’est plus. Admis à la retraite, il y a de cela un an après près de trois décennies passées dans l’enseignement et la recherche en sciences juridiques et politiques dans les universités Joseph-Ki-Zerbo et Thomas- Sankara, il a rendu l’âme, le 25 décembre 2022, à Ouagadougou. En dehors des amphithéâtres où il a officié pendant 27 ans, Dr Luc Marius Ibriga s’était fait également connaitre sur le terrain de la promotion et de la défense de l’Etat de droit, des libertés et du bien commun.

A l’annonce de son décès, ils étaient nombreux à lui rendre hommage sur les réseaux sociaux. Collègues, anciens étudiants et collaborateurs ont salué l’engagement d’un homme au service du droit. Son collègue philosophe, enseignant-chercheur à l’université Joseph-Ki-Zerbo, Pr Jacques Nanema, a remercié l’illustre disparu pour tout ce qu’il a pu faire pour ce pays en formant les étudiants, en conseillant les citoyens par sa parole publique et surtout en donnant l’exemple aux gouvernants par sa conscience professionnelle, son sens du service public désintéressé, ses qualités humaines de simplicité, d’ouverture et d’humanisme. « Au moment où ce pays rame dans les turbulences identitaires et politiques, au moment où certains de nos concitoyens cherchent à nous ramener sous la férule humiliante d’une gouvernance et d’une gestion moyenâgeuse de la vie publique, au moment où le désespoir pousse d’autres dans la tentation d’instaurer une dictature éclairée(…), tu demeureras longtemps une lampe pour guider nos pas et éclairer nos consciences pour que nos pas s’éloignent du naufrage qui nous guette », a écrit Pr Jacques Nanema sur sa page Facebook. Dans le même ordre d’idées, son ancien étudiant et avocat, Me Guy Hervé Kam, a dit de Dr Luc Marius Ibriga qu’il était « simplement humain ». « Rigoureux, Luc l’était assurément. Mais de cette rigueur qui aurait pu le rendre inaccessible, Luc en a fait un outil efficace de construction de l’homme burkinabè.

De nombreux enfants issus de milieux modestes ont réussi en droit et dans la vie, grâce à lui. Burkinbila, Luc l’était avant tout, un vrai. Il était l’incarnation de l’intégrité, du patriotisme, du courage et du don de soi », a souligné Me Kam. Pour lui, il a transmis « le flambeau » et a promis de continuer le combat pour résister « aux intempéries », selon la formule de son enseignant.

Eclaireur d’une conscience citoyenne

Du côté officiel, le président de la Transition, le capitaine Ibrahim Traoré, a indiqué que la Nation perd un de ses valeureux fils qui a consacré sa vie à la formation et à l’éveil d’une conscience citoyenne, libre, intègre et digne. « Je salue la mémoire d’un homme de conviction qui a su incarner le combat pour une gouvernance vertueuse. Son passage à la tête de l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de Lutte contre la corruption (ASCE-LC) a marqué un pas important dans l’engagement de notre pays pour une gestion plus saine des deniers publics», a souligné le chef de l’Etat dans son hommage. L’homme que le Burkina pleure aura marqué plus d’un pour son dévouement à l’enseignement du droit et son engagement au service de la construction d’un Etat de droit. Lors de l’hommage que lui rendaient ses pairs enseignants-chercheurs en novembre 2021 lorsqu’il prenait sa retraite, tous avaient été unanimes à reconnaitre ses qualités d’enseignant-chercheur rigoureux, compétent et de défenseur des libertés civiques. D’aucuns l’avaient qualifié de « baobab».

« C’est un homme pluridimensionnel que nous voulons célébrer car il a été pour moi un père, un encadreur, un conseiller conjugal », avait dit à l’occasion, l’ancien ministre en charge de la fonction publique, Pr Séni Ouédraogo qui a été l’étudiant de Dr Ibriga. Né le 27 septembre 1956 à Korhogo en Côte d’Ivoire, Dr Luc Marius Ibriga aura été de ceux qui ont été de la lutte pour l’alternance démocratique au Burkina. A la tête du Forum de citoyennes et citoyens de l’alternance et membre du Front de résistance citoyenne (FRC), il aura contribué à édifier l’opinion publique sur la nécessité de consolider l’Etat de droit, gage d’une démocratie au service de tous. A la suite de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014, Dr Ibriga a été membre du comité de rédaction de la Charte de la Transition. Par la suite, il a été nommé en 2015 contrôleur général d’Etat de l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de Lutte contre la corruption (ASCE-LC). Il va diriger l’institution jusqu’au 10 mars 2022 où il a passé la main à son successeur, Philippe Néri Kouthon Nion. Durant son passage à la tête de l’ASCE-LC, il aura engagé d’importantes réformes afin de permettre à l’institution d’exercer pleinement ses missions en toute indépendance. Dans une interview accordée à Sidwaya en décembre 2021, il affirmait ceci à propos de la corruption : « Si notre société est de plus en plus gangrénée par la corruption, véritablement c’est nous tous qui serons perdants dans la mesure où nous allons aller de plus en plus vers une société mafieuse, violente et dans laquelle les plus faibles vont pâtir ». Dr Luc Marius Ibriga a été co-auteur avec Matthieu Fau-Nougaret de l’ouvrage L’architecture de paix et de sécurité en Afrique paru aux Editions L’harmattan.

Karim BADOLO


Disparition du Dr Luc Marius Ibriga

Le chef de l’Etat salue la mémoire d’un homme de conviction

« C’est avec une profonde tristesse que j’ai appris la disparition, ce jour 25 décembre 2022, du Dr Luc Marius Ibriga, éminent universitaire et ancien contrôleur général d’Etat. Notre Nation perd ainsi un de ses valeureux fils qui a consacré sa vie à la formation et à l’éveil d’une conscience citoyenne, libre, intègre et digne. Je salue la mémoire d’un homme de conviction qui a su incarner le combat pour une gouvernance vertueuse. Son passage à la tête de l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de Lutte contre la corruption (ASCE-LC) a marqué un pas important dans l’engagement de notre pays pour une gestion plus saine des deniers publics. Puisse son exemple de vie nourrir notre engagement collectif pour un Burkina Faso de liberté et d’intégrité. Qu’il repose dans la paix des braves sur cette terre de dignité qu’il a tant aimée et servie ».

Capitaine Ibrahim TRAORE,

président de la Transition,

chef de l’Etat.

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