Le discours de la rupture

Nommé le 10 décembre dernier, le Premier ministre, Lassina Zerbo, a été investi à une large majorité dans ses fonctions par le Parlement à l’issue de sa Déclaration de politique générale (DPG). Cette formalité constitutionnelle passée haut la main, le Premier ministre et son gouvernement de combat fort de 25 fantassins, ont désormais les coudées franches pour dérouler, sans délais, la feuille de route que les députés ont plébiscitée par un vote massif (103 votes positifs, 24 abstentions et aucun vote négatif) pour un retour à la normale d’un état de quasi urgence sécuritaire permanent.

En effet, c’est en plein milieu d’une crise sécuritaire aux multiples facettes, d’une ampleur probablement inégalée depuis l’indépendance du pays que le Premier ministre Lassina Zerbo a présenté à la Représentation nationale, le vendredi 7 janvier 2022, sa DPG. Lassina Zerbo n’a pas seulement affiché ses intentions à travers les 4 pierres angulaires de l’action gouvernementale que sont le retour de la paix, de la sécurité et la consolidation de la résilience ; le retour des Personnes déplacées internes (PDI) dans leur localité d’origine ; la réconciliation nationale ; la lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite.

Il a surtout esquissé les conditions « stratégiques et opérationnelles » de leur mise en œuvre qui appellent tantôt à la révision de certaines dispositions légales, tantôt à l’accroissement des ressources financières allouées aux secteurs névralgiques ou à l’optimisation de l’efficacité de la dépense publique, sans pour autant s’engager franchement sur les priorités qui nécessiteraient davantage de concertation au sein du gouvernement et avec ses partenaires (le projet de découpage administratif, la tenue des élections municipales…).

Ce, en droite ligne du changement de paradigme impulsé par le chef de l’Etat, Roch Marc Christian Kaboré, depuis le sommet à la suite du drame d’Inata dont l’électrochoc a conduit, entre autres, à des changements dans le commandement des Forces de défense et de sécurité, à la démission du gouvernement de Christophe Dabiré. C’est logiquement une DPG de rupture qui a été présentée à l’Assemblée nationale. Rupture dans la vision, car trop souvent, a diagnostiqué le Premier ministre, « nos actions ont été réduites à la gestion de crise et des urgences.

Mais nous devons savoir nous projeter dans le long terme ». Rupture dans la perception même desdites actions dont le métronome sera désormais la situation sécuritaire. « Aucun indicateur sectoriel amélioré n’aura assez de reconnaissance de la part de nos concitoyens tant que la situation sécuritaire restera volatile, incertaine, sans victoire probante », a martelé M. Zerbo.

Rupture aussi dans les propositions de solutions ou le maître-mot semble être de ne différer aucune remise en question des approches actuelles. Il a souligné à plusieurs reprises que son gouvernement n’a pas une mais plusieurs stratégies pour non seulement apporter une réponse conséquente contre le terrorisme, mais aussi agir contre les causes lointaines et immédiates du phénomène.

Il a cité, à titre d’illustration, la Stratégie nationale de cohésion sociale (SNCS), la Stratégie nationale de prévention de l’extrémisme violent (SNPREV), la Stratégie de défense nationale qui a nourri la loi de program-mation militaire 2018-2022, le projet Amélioration de la participation communautaire à la coproduction de la sécurité au Burkina Faso et pour lesquels des ressources financières ont été allouées…

Au gré de la dégradation de la situation sécuritaire, le pays est à son 7e gouvernement et à son 3e Premier ministre depuis 2016 sans pour autant que la préoccupation majeure des populations qui est de pouvoir vaquer paisiblement à leurs occupations ne soit garantie. Ce gouvernement de combat de Lassina Zerbo a donc le devoir, à ce moment crucial de l’histoire du Burkina Faso, d’agir, d’unir et de protéger les Burkinabè, d’affûter leur sens de responsabilité, d’incarner la probité, la justice et le progrès social. Rien de moins !

Mahamadi TIEGNA

mahamaditiegna@yahoo.fr

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