Littérature : « Sankara y a pas son héritier »

Dans son roman, « Sankara, le conclave des héritiers », le journaliste et écrivain burkinabè, Jean Philippe Tougouma décrit, à travers ses personnages, l’impact de l’œuvre et de la vie du père de la Révolution burkinabè sur la jeunesse africaine et du monde entier en général.

L’héritage de Thomas Sankara est en débats dans le conclave des personnages du livre.

«Tuez Sankara, des milliers de Sankara naitront », avait déclaré Thomas Sankara plusieurs semaines avant son assassinat dans le tragique après-midi du 15 octobre 1987. Le père de la Révolution burkinabè restait convaincu que même après sa disparition, ses héritiers poursuivront son combat pour la libération et l’indépendance de l’Afrique. Pour les Afro-pessimistes, Thomas Sankara n’a pas laissé des héritiers. La preuve est que près de 35 ans après sa tragique disparition, peu de chefs d’Etat africains ont pu tenir tête à l’impérialisme. Mais pour les Afro-optimistes, les milliers de Sankara ont toujours existé, il fallait juste ouvrir l’œil et le bon pour les voir s’exprimer. Selon ces optimistes, il est temps que la pensée de Thomas Sankara renaisse de ses cendres et se répande à travers toute l’Afrique. Ce rêve est-il réalisable ? En attendant de trouver réponse à cette lancinante question, le journaliste et écrivain burkinabè, Jean Philippe Tougouma fait naître à travers son roman « Sankara, le conclave des héritiers », des ‘’ milliers de Sankara ‘’ y compris Marguerite, le personnage central de son roman. Composé de 187 pages, l’ouvrage comprend 15 chapitres (Rencontre préparatoire, Les modèles de Sankara, Les fora régionaux, Remue-ménage à Wogdgo, Le mot de bienvenu de Marguerite, Le message de l’Amérique, Le message de l’Asie, Le message de l’Europe, Le message de l’Océanie, Le message de l’Afrique, Une pause méritée, Le message des burkinabè, C’est quoi le Sankarisme, Vers la fin du conclave, Sankara y a pas son héritier). Ces différentes parties constituent plus ou moins les temps forts de ce « conclave » singulier. En effet, tous les participants partagent en commun la même date de naissance ou d’anniversaire. Ils sont tous nés le 15 octobre 1987 à 16h30, date et heure fatidiques de l’assassinat crapuleux de Thomas Sankara (Thamos Sankara dans le roman, ndlr), le père de la Révolution burkinabè. Marguerite, l’héroïne du roman, refuse de célébrer son quinzième anniversaire et d’arroser son admission au Baccalauréat série E, obtenu avec la mention « bien ».

Un modèle d’intégrité

Tout comme son héros, elle restera droit dans ses bottes, malgré l’insistance de son entourage : « Je suis née le jeudi 15 octobre 1987 à 16 heures 30 minutes au moment où le président du comité national de la Révolution, président du Faso, le vrai, l’unique, le capitaine Thamos Sankara mourait lâchement assassiné par ses frères, ses faux-frères. Pensez-vous qu’il est correcte que moi je fête ma naissance quand d’autres commémorent la mort d’un leader, sauveur, messie de tout un peuple ? J’ai décidé désormais, de ne plus fêter le 15 octobre jusqu’à ce qu’un jour, la lumière soit faite sur ce drame». Déterminée à promouvoir les idéaux de Thamos Sankara et surtout faire éclater la vérité sur la triste fin du héros du 4 août 1983, elle lancera, à son trentième anniversaire, un site web intitulé naturellement, www.15octobre1987.net. En compagnie d’autres 15 octobristes venus d’horizons divers, elle organisera un conclave à la Maison du peuple de Wogdgo…Pour le préfacier de l’ouvrage, Yacouba Traoré, journaliste et ancien directeur général de la Radiodiffusion-Télévision du Burkina, « Sankara, le conclave des héritiers » est une réussite littéraire, qui a pu poser des questions sur tous ces jeunes qui ont pris fait et cause pour Sankara et en ont fait, leur modèle achevé de l’intégrité, du patriotisme, du don de soi ». Mieux, Philippe Tougouma, malgré les questions qui foisonnent, écrit-il, s’est gardé de donner une réponse qu’il fait porter à un actant qui affirme haut et fort dans un conclave que « Sankara y a pas son héritier ». Une petite phrase aux grandes conséquences, dans un milieu où chacun, estime-t-il, est convaincu que le modèle c’est lui, la réincarnation c’est lui. «Assurément, c’est là le tournant du roman de Jean Philippe Tougouma », se convainc le préfacier Yacouba Traoré. Critique littéraire, journaliste aux Editions Sidwaya, Jean Philippe Tougouma est également l’auteur de La Chute du sphinx de Koso-Yam ou les secrets d’une insurrection et de La fortune en course de fin, un recueil de nouvelles sur le Pari mutuel urbain (PMU).

W. Aubin NANA

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