Côte d’Ivoire/Burkina : De nouveaux accords pour raviver la coopération

La 5e conférence au sommet du Traité d’amitié et de coopération (TAC) entre la Côte d’Ivoire et le Burkina s’est tenue, le vendredi 29 juillet 2016 à Yamoussoukro. Les chefs d’Etat, Alassane Ouattara et  Roch Marc Christian Kaboré, ont  conclu de nouveaux  accords bilatéraux dans divers domaines, en vue de  raviver les liens séculaires entre les deux pays.  

La  Côte d’Ivoire et le Burkina, par la tenue de la 5e conférence au sommet du Traité d’amitié et de coopération (TAC), le vendredi 29 juillet 2016, à Yamoussoukro, viennent de montrer, que leurs liens de fraternité et de  coopération résistent aux épreuves. Au terme de deux heures d’échanges, sur les terres natales du père de la nation ivoirienne, Félix Houphouët -Boigny, les présidents ivoirien, Alassane Ouattara et burkinabè, Roch Marc Christian Kaboré ont pris des engagements pour l’avenir.

En  effet, ils ont  donné leur caution à 13 nouveaux  accords, qui touchent à divers domaines, dont l’aviation civile, le tourisme et  l’enseignement supérieur (Ndlr : voir la liste des accords en encadré).   Ces  accords, s’ajoutant à  la trentaine établis depuis l’avènement du TAC en 2008,  ont été signés à la clôture des travaux,  par les ministres concernés des deux  pays.

Au-delà des perspectives, à en croire les termes du communiqué final des travaux, livré par le ministre des Affaires étrangères de Côte d’Ivoire, Dr Albert Mabri Toikeuse, les deux chefs d’Etat ont évalué la mise en œuvre des projets communs prioritaires.  Au sujet du projet de construction de l’autoroute Yamoussoukro-Ouagadougou, la conférence au sommet  s’est félicitée de  l’achèvement des études de faisabilité et  des  financements obtenus, notamment auprès de l’UEMOA.

Les présidents Ouattara et  Kaboré ont exhorté  les deux gouvernements  à « poursuivre » la recherche des financements  complémentaires, en vue de la réalisation  de ce  « projet vital» pour le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire.   Les deux chefs d’Etat  ont également  discuté du projet de réhabilitation du chemin de fer Abidjan-Ouagadougou-Kaya et son prolongement jusqu’à Tambao, et  de  la construction  du terminal minéralier au Port d’Abidjan.

Ils ont  encouragé les deux parties à continuer les négociations déjà entamées  avec les groupes Bolloré et Pan Africain Minerals,  en vue de procéder à la signature du projet de convention de concession révisée.  Les dirigeants ivoirien et burkinabè ont par ailleurs noté avec satisfaction  « le respect des engagements de la SITARAIL, au titre du traitement de la dette due aux Etats et aux sociétés de patrimoine ferroviaire ».

Concernant l’approvisionnement régulier du Burkina Faso en énergie électrique et en hydrocarbures  par la Côte d’Ivoire, précise le communiqué, la partie bénéficiaire a renouvelé ses remerciements  au voisin  ivoirien  pour sa décision d’augmenter la fourniture d’électricité de 70 à 80 mégawatts.  Dans ce domaine,   la conférence au sommet s’est  réjouie  de « l’adoption des termes de référence relatifs à l’élaboration du plan directeur commun de développement des capacités de production et de transport  de l’électricité entre les deux Etats ».

L’affaire du mont Péko : Le même satisfecit   a été exprimé   par rapport  aux

« progrès » réalisés dans le cadre de la création de la société de pipeline sur le tronçon  Bouaké-Ferkéssédougou et  Ferkéssédougou-Ouagadougou  avec la participation de la Société nationale burkinabè d’hydrocarbures (SONABHY) au capital de ladite entité.   La lutte contre le terrorisme a aussi meublé les échanges entre les deux présidents, qui  ont  loué  la qualité de la coopération entretenue par les services de sécurité de leurs pays.   Aussi  ont-ils décidé  de  « mutualiser  davantage » leurs efforts pour lutter « efficacement »  contre les groupes terroristes.

Des  questions d’actualité étaient  également à l’ordre du jour du  sommet,  renseigne le communiqué final,  notamment   le déguerpissement  des Burkinabè installés illégalement  au mont Péko.  Sur ce point,  les  présidents Ouattara et  Kaboré  ont instruit leurs ministres en charge de la question de procéder à la mise en place effective du comité mixte de coordination et de suivi  post-évacuation.

Cette  structure aura pour mission d’évaluer les  besoins des personnes concernées (Ndlr : elles sont estimées à 30 000, dont 27 000 Burkinabè), de renforcer les services sociaux de base et de proposer  toutes les mesures idoines pour favoriser  le retour des compatriotes, qui le désirent.    « Il s’agit de prendre en compte les questions humanitaires et autres, qui entourent  cette affaire,  sinon  l’opération d’évacuation est déjà achevée »,  a  confié le ministre des Affaires étrangères et des Burkinabè de l’extérieur, Alpha Barry.

Ce sont autant de centres d’intérêt  qui  ont  retenu l’attention des  deux chefs d’Etat.     Tous ont d’ailleurs  marqué  leur  satisfaction au regard  des conclusions du sommet.  «  Le pari d’un sommet réussi a été tenu.  Je salue l’ambiance fraternelle et le climat convivial qui ont prévalu tout au long  des travaux.  Je suis convaincu que notre  partenariat  sera maintenu et se renforcera »,  a dit le président Kaboré.

« A l’heure du bilan, nous pouvons  affirmer que notre coopération se porte bien, et que les relations entre les deux pays sont  remarquables »,  a,  pour sa part, déclaré Alassane Ouattara.   Tout en   affichant  leur  « ferme » volonté de mettre en œuvre les accords,  les présidents ivoirien  et  burkinabè  ont  invité les gouvernements à poursuivre les concertations, pour  conduire les  projets   vers des résultats à même d’impacter positivement la vie des deux peuples.

Avant tout,  ils  ont  magnifié, de part et d’autre, la coopération  ivoiro-burkinabè,  fondée  sur la fraternité,  l’histoire et la géographie.  « Les liens multiples, qui existent entre la Côte d’Ivoire et le Burkina, sont solidement ancrés dans un patrimoine culturel et historique commun », a laissé entendre le président  Kaboré.

Son pair de Côte d’Ivoire n’en pense pas moins, lui qui  a vanté la qualité  « exceptionnelle » des liens avec le Burkina   Faso.   La conviction des deux chefs d’Etat, à les entendre,  est que le traité d’amitié  a permis à la coopération ivoiro-burkinabè de s’ « intensifier », au fil des années, avec  à la clé des « avancées  remarquables ».   Le 6e  sommet du TAC se tiendra en juillet 2017 à Ouagadougou.

Kader Patrick KARANTAO
Envoyé spécial à Yamoussoukro


Liste des 13 accords signés

1. Accord de services aériens entre le Gouvernement du Burkina Faso et le Gouvernement de la République de Côte d’Ivoire

2. Accord de coopération entre la République de Côte d’Ivoire et le Burkina Faso relatif aux opérations de recherches et de sauvetage d’aéronefs

3. Accord de facilitation des activités de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Burkina Faso en République de Côte d’Ivoire ;

4. Mémorandum d’entente en matière d’enseignement technique et professionnel entre le Gouvernement du Burkina Faso et le Gouvernement de la République de Côte d’Ivoire

5. Accord de coopération entre l’Université Alassane OUATTARA (UAO) de la République de Côte d’Ivoire et le Centre National de la Recherche Scientifique et Technologique (CNRST) du Burkina Faso

6. Accord de coopération entre l’Université Felix HOUPHOUET-BOIGNY de la République de Côte d’Ivoire et le Centre National de la Recherche Scientifique et Technologique du Burkina Faso

7. Accord de Coopération entre le Centre National de la Recherche Agronomique de la République de Côte d’Ivoire et le Centre National de la Recherche Scientifique et Technologique du Burkina Faso

8. Accord de Coopération entre la Société Ivoirienne de Technologie Tropicale et le Centre National de la Recherche Scientifique et Technologique du Burkina Faso

9.   Accord portant création, organisation et fonctionnement du Comité paritaire spécialisé de suivi du Protocole d’Accord de coopération dans le domaine du Tourisme

10.  Accord portant création, organisation et fonctionnement du comité paritaire chargé du suivi de l’accord culturel et de l’évaluation des relations culturelles

11. Accord  de programmes d’échanges culturels pour les années 2017, 2018 et 2019

12. Accord portant création, organisation et fonctionnement de la Commission Permanente de Suivi de l’Accord de Coopération en matière de lutte contre la traite transfrontalière des enfants.

13. Convention de concession révisée de l’exploitation des Transports ferroviaires

Source : documents 5e TAC


Réaction de quelques ministres burkinabè

Filiga Michel Sawadogo (Enseignement supérieur) : Les travaux ont été denses.  Concernant mon département, il s’agit de permettre au CNRST de travailler avec les universités et centres de recherche ivoiriens sur des projets communs. Il s’agit surtout des projets financés par des partenaires extérieurs, qui nécessitent une mise en commun de moyens pour parvenir aux résultats attendus.  De manière générale,  les relations ivoiro-burkinabè, qui s’étaient un peu dégradées  au cours des deux dernières années, viennent de reprendre leur cours normal, et les perspectives sont bonnes dans les différents domaines de coopération.  Une relation d’amitié et de fraternité s’instaure aussi entre les deux chefs d’Etat.

Tahirou  Barry (Culture, arts et tourisme) : Il y a eu deux accords culturels et un sur le tourisme. Tous ces accords visent à développer les échanges et la coopération culturelle et touristique  entre les deux pays.  Nous nous en réjouissons.

Alpha Omar Dissa (Energie et mines) : Au TAC 2014, il avait été prévu d’approvisionner le Burkina à hauteur de 70 à 80 mégawatts, ce qui est effectif depuis début 2016.  Mais l’application de cet accord a créé d’autres problèmes,  à savoir que nos infrastructures de transport ne sont pas adaptées à des puissances élevées. Ce qui fait, qu’on assiste fréquemment à des ruptures de la ligne d’interconnexion du côté du Burkina ou de la Côte d’Ivoire.  Le TAC 5 a donc recommandé la mise en place d’une équipe mixte de surveillance, d’intervention et d’entretien du réseau d’interconnexion.  De sorte à ce que la Côte d’Ivoire, qui dispose de matériels de haute technologie pouvant permettre de travailler sous tension,   puisse  aider le Burkina en cas de rupture.  En cas de rupture en Côte d’Ivoire,  les troupes burkinabè, généralement très réactives, pourront également  se redéployer pour  aider  le voisin ivoirien.   Ce qu’il faut noter, c’est  la recherche des pannes.  Quand il y a une panne, il faut la retrouver, sur une plusieurs centaines de kilomètres. Si nous mutualisons nos forces humaines et matérielles, en attendant de renforcer le réseau, nous pouvons parer les difficultés liées au transport de l’énergie.

Alpha Barry (Affaires étrangères): Nous n’avons pas abordé la question des mandats d’arrêt contre le président Compaoré et le président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire, Guillaume Soro. Nous observons une nette séparation des pouvoirs dans les deux pays. C’est une affaire de justice.  Nous avons noté des problèmes entre les deux pays, et  nous avons décidé de régler diplomatiquement les conséquences de cette affaire.  Ce qui a conduit à la tenue du 5e TAC.  Nous n’avons pas décidé de régler l’affaire elle-même diplomatiquement et la précision est importante.

Propos recueillis par K.P.K.

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