Un vent nouveau souffle sur les Etats-Unis d’Amérique. L’élection présidentielle du 3 novembre 2020 a consacré la victoire du démocrate, Joe Biden, face au président sortant, le républicain Donald Trump, qui conteste à cor et à cri les résultats du scrutin. Pour l’actuel locataire de la Maison Blanche, qui n’avance aucune preuve, les démocrates lui ont volé sa victoire, en orchestrant des fraudes, surtout dans les votes par correspondance. Cette posture du président américain n’étonne guère les observateurs avisés, puisqu’il avait affiché sa ferme intention de ne pas reconnaître les résultats de l’élection s’il venait à perdre. Droit dans ses souliers et fidèle à sa réputation de va-t-en-guerre, Donald Trump entend mener une bataille judiciaire pour garder son fauteuil, mais on n’a pas besoin d’être un tapeur de sable de l’Est du Burkina, pour savoir que sa démarche ne s’annonce pas prometteuse.
Aux Etats-Unis, le système électoral est tellement complexe, qu’il est difficile d’imaginer des fraudes. « C’est impossible ! », s’est exclamé l’ancien secrétaire d’Etat aux Affaires africaines et analyste politique, Herman Cohen. Comme pour dire que le président sortant discute du sexe des anges. Certes, la défaite a un goût amer, encore plus pour quelqu’un qui a un esprit de gagneur comme lui, mais Donald Trump doit admettre que ses compatriotes ont décidé de tourner la page de sa gouvernance. L’élection présidentielle, qu’il vient de perdre malgré sa combativité à toute épreuve, le prouve aisément. La politique d’isolationnisme, illustrée par le concept « America First », de Donal Trump, a manifestement choqué les sensibilités aussi bien à l’interne qu’à l’extérieur. Sur le plan national, on a en mémoire, parmi tant d’autres mesures, ses nombreux décrets à polémique sur l’immigration aux relents racistes, même s’il s’en est toujours défendu, la suppression de nombreuses réglementations fédérales aux dépens de l’environnement, de la protection sociale ou de la discipline bancaire et le gel des embauches dans la Fonction publique. Sa gestion pour la moins catastrophique de la crise sanitaire liée à la pandémie de la covid-19, avec plus de 200 000 morts aux Etats-Unis, laisse également pantois. En matière de politique étrangère, Donald Trump a également bousculé les codes établis avec des décisions renversantes, que seul un novice en politique pouvait prendre.
Le retrait des Etats-Unis de l’Accord sur le climat, dans un contexte de lutte contre le changement climatique ou de celui sur le nucléaire iranien resteront dans les annales de l’histoire. Que d’alliances internationales ont été menées ! Joe Biden, qui devrait prendre fonction le 20 janvier 2021, sauf cataclysme, arrive donc au pouvoir dans un contexte des plus explosifs. Si sa victoire est à savourer sans modération, même au-delà des frontières américaines, sa tâche, elle, s’annonce compliquée, dans une Amérique, dont les divisions se sont accrues, sous la gouvernance Trump. Il devra déployer une force herculéenne, pour redonner confiance aux Américains, en effaçant le plus possible les traces de son prédécesseur et en ramenant les Etats-Unis à sa place sur la scène internationale. Déjà Joe Biden, qui préfère le consensus aux étincelles comme Trump, s’est posé en rassembleur, promettant de gouverner pour les démocrates et les républicains. Mais encore faut-il qu’il ait les coudées franches, notamment le contrôle total du Congrès américain (la majorité au Sénat et à la Chambre des représentants) pour gouverner en toute sérénité. Son ambition de ramener l’Amérique à sa valeur première, la défense de la démocratie et des droits de l’homme, est tellement noble que Biden mérite toutes les bénédictions.
Kader Patrick KARANTAO