Sécurisation foncière en milieu rural : L’étudiant Daniel Zongo dévoile les obstacles à Pabré

Le jury a apprécié l’actualité et la pertinence du thème abordé par l’étudiant

L’étudiant Daniel Zongo, du département de Sociologie de l’Université Joseph KI-Zerbo, a brillamment soutenu son mémoire de master de recherche, le mardi 4 février 2025 à Ouagadougou. Intitulé « Sécurisation foncière formelle à l’épreuve des réalités locales dans la commune rurale de Pabré au Burkina Faso»,

Le Jury composé du Pr Ramané Kabore, du Dr Siaka Ouattara et du Dr Abdoulaye Sawadogo a déclaré recevable le travail de l’étudiant Daniel Zongo après environ deux heures d’entretien. Il a obtenu la mention « Bien » avec une note de 15 sur 20 et est désormais Maître en Sociologie.

L’étude de M. Zongo s’est concentrée sur les perceptions de la population locale, notamment les autochtones, à l’égard de la loi 034 portant sécurisation foncière, un instrument juridique destiné à sécuriser les terres. Les résultats de l’étude ont révélé que, bien que la loi ait pour objectif de protéger les terres des populations locales à des fins économiques, agricoles et d’élevage, son appropriation par les populations locales autochtones reste encore limitée. Selon l’impétrant, les résultats du terrain ont revelé que sur les APFR (Attestation de Possession Foncière Rurale) déjà établi dans la commune jusqu’en 2024, seulement 10 % des APFR délivrées appartenaient aux autochtones.

Il a également mis en lumière plusieurs obstacles pratiques rencontrés par les populations locales autochtones. Le coût de la sécurisation foncière formelle, compris entre 100 000 et 250 000 francs CFA par hectare, est souvent hors de porté pour des autochtones – agriculteurs qui dépendent exclusivement de leurs terres. De plus, les démarches administratives complexes, nécessitant de nombreux déplacements et le problème d’accès aux informations représentent un frein supplémentaire.

L’étudiant Daniel Zongo a décortique avec brio la problématique de la sécurisation foncière en milieu rurale.

Face à ces difficultés, M. Zongo a observé que les populations avaient développé des stratégies alternatives pour sécuriser leurs terres, comme planter des arbres ou ériger des repères visibles pour signaler leur propriété foncière. Il a également souligné la dimension culturelle comme un frein majeur à l’adoption de la loi 034. En effet, dans une société où la propriété collective prime sur la propriété individuelle, obtenir un consensus familial pour formaliser une possession foncière individuelle ou collective reste un défi.

L’étudiant a également mentionné que de nombreuses personnes enquêtées percevaient cette loi comme une menace pour la cohesion familiale, redoutant aussi une éventuelle expropriation par l’État sans compensation. Cette crainte a poussé certains à vendre précipitamment leurs terres et se retrouve aujord’hui dans le désarroi.

Le directeur de mémoire, Dr Siaka Ouattara, ancien DG de la Cohesion Sociale et Maître- Assistant en Sociologie à l’Université Joseph KI-Zerbo, a affirmé que la question foncière, abordée par son étudiant, reste d’actualité, notamment à cause de l’émergence de nouveaux acteurs et du phénomène d’accaparement des terres. Il a précisé que cette étude permettait d’évaluer la mise en œuvre effective de la loi 034, relative à la sécurisation et à la gestion foncière en milieu rural, dans diverses localités, particulièrement en périphérie des grands centres urbains. L’objectif était de comprendre dans quelle mesure les populations s’approprient cette loi et les difficultés qu’elles rencontrent.

Selon Dr. Ouattara, le travail de l’étudiant a mis en évidence, à travers l’exemple de la commune de Pabré, la difficulté d’appropriation de la loi par les populations locales. Il a noté qu’environ 90 % des bénéficiaires des APFR n’étaient pas des autochtones. Cette situation indique soit un manque de compréhension de la loi, soit des obstacles pratiques rencontrés.

Dr. Ouattara a conclu en soulignant que cette recherche pourrait servir de base pour les décideurs afin d’envisager des ajustements visant à mieux sensibiliser les populations locales. Il a rappelé que la loi avait été adoptée dans l’intérêt des populations concernées, afin de sécuriser leurs terres et attirer des investissements dans l’agriculture et l’élevage tout en garantissant leur sécurité foncière.

Cette étude permettra de mieux comprendre les enjeux fonciers et de contribuer à la réduction des conflits liés à la terre.

 

Crédit photo: Wamini Micheline OUEDRAOGO

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