
Figure très connue du monde sportif burkinabè, Annick Pikbougoum née Zingué a marqué les esprits depuis son jeune âge. Athlète, encadreur puis dirigeante, elle s’investit depuis plusieurs décennies maintenant avec la même énergie aussi bien dans ses obligations professionnelles que sportives ou associatives.
Elle est le visage de Special Olympics Burkina Faso, une association qui œuvre pour l’inclusion totale de la personne déficiente intellectuelle par la pratique du sport. Annick Pikbougoum, puisque c’est d’elle qu’il s’agit en est la directrice exécutive depuis 2002, quatre ans après l’avoir intégré, preuve de son investissement pour la cause. Depuis 2021 elle est la seule représentante de l’Afrique francophone comme membre du Conseil de leadership africain de Special Olympics et est à son second mandat.
« J’essaie de faire entendre la voix des francophones autant que faire se peut dans un contexte purement anglais. Il y a des moments où le monde francophone est oublié et je suis contente que maintenant les choses aient beaucoup évolué par rapport au programme francophone, un travail entamé depuis quelques années par mon prédécesseur à ce poste », explique -t-elle. Une consécration ‘’naturelle’’ pour la fille de la Bougouriba, (région du Djôrô) qui a cette habitude de marquer de son empreinte indélébile tout ce qu’elle entreprend. Née de parents amoureux de sport, Annick s‘est passionnée pour le sport très jeune. Une passion qu’elle a vécue à travers plusieurs disciplines et ce, dès l’école primaire Centre B de Dédougou (Bankui).

De l’athlétisme au Volleyball en passant par le basket-ball, elle a expérimenté plusieurs sports. Mais, c’est au handball qu’elle s’est fait un nom. « C’est la dernière des disciplines que j’ai découverte par hasard à partir de la 6e entre, 12 et 13 ans dans une démonstration de garçons au Lycée Bafuji de Gaoua et j’en ai été séduite », témoigne-t-elle. A partir de la classe de seconde au Lycée Ouézzin-Coulibaly de Bobo-Dioulasso, les choses sont allées très vite. Elle est doublement surclassée en équipe nationale à moins de 18 ans et devra désormais jongler pour honorer les compétitions du championnat et de l’USSU-BF en handball et au basket-ball.
Plusieurs fois championne nationale, la latérale gauche burkinabè a également mis son talent au profit de l’Union sportive des enseignants de Bassam (USE Bassam), 2e meilleure équipe de handball ivoirien après l’Africa sport en 1992 et pour deux ans. Ceci, à la faveur de son séjour pour sa formation, suite à son admission au concours de recrutement des professeurs d’éducation physique de la CONFEJES. Elle évoluera ensuite avec le club ROMBO jusqu’à son retour au pays en 1996 où elle rejoint l’AS SONABHY. Avec les pétroliers, elle est restée comme joueuse mais aussi entraîneur pour pallier le manque d’encadreur. Même si elle n’a pas tout de suite raccroché, le coaching avait commencé à prendre le dessus sur le jeu.
C’est ainsi que désormais professeur d’éducation physique, elle postule et réussit au test de perfectionnement en handball à l’université de Leipzig en Allemagne d’où elle ressort en janvier 2003 nantie du diplôme d’entraîneur international en handball. Toujours dans le souci de se perfectionner, elle sera l’une des premiers impétrants pour le Master professionnel en management des organisations sportives lancé par le CIO. Sur le plan professionnel, Annick Pikbougoum a intégré la fonction publique, notamment le ministère en charge des sports dès son retour au pays après sa formation à Abidjan.
Aujourd’hui, chargée de mission au cabinet du ministre chargé de l’enseignement supérieur, elle a été la toute première directrice du sport de haut niveau entre 2006 et 2011. Chargée d’études au ministère des enseignements secondaire et supérieur de 2011 à 2017, elle a occupé le poste de directrice adjointe de l’Institut des sciences du sport et du développement humain (ISSDH) de 2017 à 2020. Après 2020 et avant ses fonctions actuelles qu’elle occupe depuis 2023, elle est nommée chargée d’études à l’université Joseph-Ki-Zerbo.
Une abnégation reconnue
Son engagement dans le monde associatif a été pratiquement au même moment que le début de sa carrière professionnelle. C’est en étant en formation sur le campus d’Abidjan qu’elle a fait la connaissance de Special Olympics. «.. et j’ai immédiatement trouvé la cause noble», se souvient-elle. Rentrée au pays, elle va honorer la promesse qu’elle s’était fait et rejoint la structure dirigée alors par l’actuel conseiller technique au ministère en charge des sports, Alexandre Yougbaré, en 1998.
« Annick Pikbougoum était pour moi comme une directrice technique. Comme anecdote, elle avait entre sept à huit mois de grossesse et elle continuait à venir aux entraînements alors qu’à l’époque, nous quittions Ouagadougou à moto pour aller nous entraîner à Saaba et revenir. Cela dénote de son courage, de sa volonté et de sa sportivité », confie l’ex-directeur exécutif. M. Yougbaré dit retenir d’elle une personne qui a le souci permanent de bien faire son travail et n’est donc pas surpris qu’elle réussisse avec Special Olympics.
« Si j’ai un conseil pour elle, c’est que sa rigueur et son caractère strict dans tout ce qu’elle fait parfois lui joue des tours. Elle ne tourne pas autour du pot, elle dit ce qu’elle pense et cela ne plaît pas toujours à tout le monde.
Ce n’est pas un défaut mais dans le monde actuel, cela peut être mal pris », souligne Alexandre Yougbaré. Paulin Somé est l’actuel secrétaire général de Special Olympics Burkina. Il retient de sa collaboratrice qu’elle connaît depuis plus de vingt ans, une énergie positive. « Puisqu’elle est toujours sur pied, elle amène les autres collaborateurs à en faire autant. Elle bouscule beaucoup et elle se décourage rarement. Même quand c’est dur, elle y croit jusqu’à preuve du contraire. Souvent, pour l’organisation des activités, l’argent fait défaut.
Mais, même quand des propositions de report sont formulées, elle insiste pour maintenir et arrive à contaminer le bureau exécutif de son optimisme et généralement, on finit par s’en sortir », affirme le secrétaire général. A l’aise sur plusieurs fronts comme elle l’a été sur les terrains autrefois, Annick Pikbougoum a ajouté à ses obligations, celles de secrétaire exécutive de la ligue de football féminin, à la Fédération burkinabè de football (FBF) depuis 2020. Elle est chargée à ce propos d’organiser les championnats des différents niveaux du football féminin, de la coupe du Faso ainsi que les compétitions de petites catégories.
Des défis encore à relever
Elle a pu et continue de relever ces multiples défis dont elle en raffole grâce à l’accompagnement de son époux, tout aussi passionné de sport et la compréhension de ses quatre enfants. « Je suis fière d’eux car, ils ont su s’adapter à mon rythme et devenir des enfants modèles. Mes journées sont souvent très chargées. Et comme ce sont des filles qui sont les ainées, elles m’ont été d’un grand soutien côté cuisine et continue de l’être », reconnait Annick Pikbougoum. Et à écouter les concernés, cette situation les a très peu affectés. « C’est vrai que lorsqu’elle est partie en Allemagne, nous étions encore petites, je ne m’en rappelle que vaguement mais elle nous a manqués.
Après les voyages se sont multipliés. La partie intéressante, c’est que nous étions, tout le temps, impatients de voir ce qu’elle allait nous rapporter de tel ou tel voyage. Mais, nous avons eu l’encadrement nécessaire pour les études si bien que personne n’a redoublé une classe. Nous avons aussi expérimenté beaucoup de sports. Donc, nous avons eu une enfance normale, équilibrée en fin de compte et n’avons manqué de rien parce que, dès qu’elle est là, elle se rattrape », raconte Elsa l’ainée de la fratrie. Chevalier de l’Ordre du mérite de la jeunesse et des sports avec agrafe sportive, Officier de l’Ordre du mérite de la jeunesse et des sports avec agrafe dirigeant et Chevalier de l’Ordre national.
Annick Pikbougoum, par ailleurs personnalité AJSB en 2022, est toujours très active sur ses différents chantiers. Ses projets ont pour dénomination : la promotion du sport féminin et la reconversion d’anciens sportifs, personnes handicapées intellectuelles en vue de leur inclusion dans la société. Et pour cela, ce n’est pas l’énergie qui lui fera défaut, elle qui a su garder son allure et sa prestance d’athlète. « J’essaie de rester active en faisant des activités physiques, du fitness, du yoga. J’ai été aussi arrangée par la nature peut-être », répond-t-elle.
Voro KORAHIRE
