Des Forces vives en vie…

Mon voisin m’a demandé ce que veut dire « Forces vives de la Nation », qui sont-elles et pourquoi lui, il n’en fait pas partie ? Quelle est leur véritable force et en quoi sont-elles vives et plus vives que nous ? J’ai dit à mon voisin que depuis qu’on a dit d’aller vite, j’évite de perdre mon temps avec les gens. Justement, répliqua mon voisin, quand on veut aller vite, est-ce qu’on y va debout ou en position assise dans de somptueuses salles d’assises qui climatisent les hantises et attisent les convoitises ?

Pour mon voisin, nous n’avons vraiment pas de temps à perdre dans des fioritures politiques à consonance cacophonique. Nous n’avons pas besoin de faire semblant pour contenter une démocratie qui simule. Il n’y a point de scrupule à se faire quand on n’a plus de recul à faire face à l’enfer qui s’affaire à nous faire. Il n’y a plus de débat qui vaille dans cette pagaille de taille que nous entretenons au nom de la Constitution ou de la démocratie. C’est quand la Nation vit en sécurité que les passions politiciennes se déchainent en toute liberté.

Il suffit de suivre ces débats sans abats sur les questions de légalité, de légitimité, de représentativité ou de constitutionnalité pour se rendre compte qu’il y a des Burkinabè qui n’ont pas encore pris la mesure de la situation. Il y en a même qui sont prêts à profiter de la crise sécuritaire pour arracher un strapontin démérité à l’assemblée ou un portefeuille à butin au gouvernement. La fin justifie les moyens ! Ces assises qui réunissent les forces vives de la Nation ne sont pas une mauvaise chose en elles-mêmes.

C’est leur opportunité avec le contexte qui frise quelque peu le superflu. C’est un rituel aux formalités républicaines juste pour faire de la forme un critère de respect des normes. Le hic, c’est parfois la qualité des acteurs qui constituent ces forces dites vives. Sans jouer l’oiseau de mauvais augure qui attire le malheur, regardez tout ce beau monde et jauger les qualités morales de certains. Il y en a dont la représentativité se limite à leur titre, fonction ou rang social.

Leur présence physique sonne l’absence d’éthique et de bon sens, mais depuis que la honte est devenue une spécialité dans ce pays, on s’en sert à la pelle et on circule sans scrupule. Ce sont les mêmes icônes à scandales qui arpentent toujours l’espace politique de notre « démocratie » pour annoncer la bonne nouvelle avec une langue de bois. Ce sont parfois des dignitaires aux parures extraordinaires qui flirtent avec tous les régimes politiques sans avoir le courage de mettre le sens de leur dignité au service de la vérité.

Ce sont des arrivistes fougueux aux allures de têtes brûlées qui parviennent au sommet de la tour, sur un coup de piston et qui profanent la bienséance et la bienveillance avec des pratiques anachroniques. Bref, les forces vives ne sont pas toujours et toutes des forces en vie. Il y en a qui agonisent sous les gravats d’un honneur effondré, piétiné ou ignoré par dépit. Les forces vives ne sont pas toujours des forces vivantes ; il y en a qui ont sombré depuis des lustres dans leurs propres faiblesses avec comme seule gloriole un nom sans renom. Pour mon voisin, les vraies assises se tiendront après la crise.

Et c’est notre capacité à nous asseoir ensemble dans nos hameaux de cultures qui fera de nous des forces véritablement vives pour la Nation. Pour lui, les problèmes sont connus, les défis sont à nos pieds, les enjeux sont clairs ; notre survie n’a pas besoin de mi-temps ; notre destin ne doit pas souffrir de discussions ou de contradictions entre quatre murs de salons feutrés, il doit se jouer sur le terrain et non sur la terrasse et le terrain nous appelle tous à nous mobiliser malgré nos différences et nos divergences.

Parce que « le Faso » signifie la terre des pères, nous devons le sauver à tout prix, dans la sueur et le sang, dans le sacrifice ultime mais ô combien sublime et grandissime. On peut être un homme digne et audacieux et rivaliser de grandeur avec une diversité de forces dites vives sans véritable raison d’unité et de fierté nationale.

Clément ZONGO

clmentzongo@yahoo.fr

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