Fabrication de matériel contre la COVID-19 : des Ouagalais libèrent leur génie créateur

Des citoyens contribuent à la lutte contre la propagation de la maladie à coronavirus depuis son apparition en mars 2020 au Burkina Faso. A Ouagadougou, la capitale et épicentre de la pandémie, des jeunes mettent en exergue leur savoir-faire pour briser la chaine de transmission.

Georges Pitroipa, âgé de 36 ans, est un soudeur qui se préoccupait uniquement dans un passé récent, à livrer à bonne date, ses commandes de portes et de fenêtres. Mais depuis l’apparition de la COVID-19 en mars, le père de famille a ajouté une flèche dans son carquois : il s’attelle, dans son atelier de soudure, à fabriquer des lave-mains à pédales. « J’ai constaté que les populations pouvaient contracter la maladie avec les lave-mains sans pédales », lance l’habitant de Kourittenga dans l’arrondissement n°6 de la capitale, Ouagadougou, également épicentre de la pandémie. Le chaud soleil et la chaleur torride de ce vendredi 24 avril 2020 ne constituent aucunement des obstacles pour le jeune Pitroipa et ses employés. Sur son lieu de travail où sont parqués de nombreux lave-mains commandés et d’autres en fabrication, le sourire ne quitte pas les lèvres de ce « génie » de la lutte contre la COVID-19. « Je suis très fier d’avoir innové en libérant mon génie créateur », indique-t-il. Georges Pitroipa note que sa trouvaille est un franc succès, car jamais, il n’a accordé autant de temps à une activité comme la confection des lave-mains à pédales. «Personne ne peut acheter sur place puisque cela se fait sur commande», soutient-il. Les clients fréquentent l’atelier jour et nuit pour passer leur commande au regard de la particularité du dispositif qui permet de se laver les mains sans toucher le robinet, évoque Georges Pitroipa.

Des cache-nez en Faso dan fani exposés à l’atelier de Mme Masson

« Les autres lave-mains comportent uniquement le robinet qui peut être une source de contamination des usagers », relève-t-il. Ses clients sont, entre autres, les pharmacies, les lieux de décoration, et des établissements scolaires de Ouagadougou en plus d’autres venant de Bobo-Dioulasso, de Banfora, de Gaoua et de Tenkodogo. « A titre gracieux, j’ai offert un dispositif à Savane médias (Organe de presse, Ndlr) pour l’aider à lutter efficacement contre la COVID-19 », confie-t-il. M. Pitroipa dit proposer ses lave-mains d’une pédale pour une personne à des prix « abordables » de 40 000F CFA et de trois pédales pour deux personnes à 120 000F CFA. A l’entendre, son chiffre d’affaires s’élève à au moins 300 000 FCFA par jour à ces débuts et a, à son actif, près de douze personnes pour satisfaire ses clients. C’est le cas de Eric T. Bénao un client de Georges Pitroipa qui réside au secteur n°27 à Ouagadougou.

La cinquantaine bien sonnée et père de quatre enfants, il se confie en ces termes : « M. Pitroipa a libéré son génie créateur dans cette crise sanitaire et est à saluer. J’étais de passage devant une pharmacie de la capitale et je l’ai vu en train d’installer ses lave-mains et je me suis approché pour voir son initiative », se rappelle-t-il. Selon lui, la création de Georges Pitroipa est appropriée dans le cadre de la lutte contre la propagation de la maladie à coronavirus au pays des Hommes intègres.
Il pense que cette initiative est plus recommandée car les autres lave-mains sont moins rassurants du fait de leur système manuel qui peut être des sources de contamination. Eric Bénao invite, par ailleurs, la population à respecter les mesures-barrières éditées par le gouvernement pour bouter la pathologie hors des frontières du Burkina Faso. Le travail de Georges Pitroipa est beaucoup admiré par ses employés. Abdoul Samad Ilboudo est un jeune apprenti de 21 ans dans son atelier. Célibataire, il soutient qu’au quotidien, près de 15 lave-mains sont fabriqués pour contrer le mal.

Une fabricante de masques « moins chers »

Comme Georges Pitroipa, Césarine W. Massom, une étudiante, en fin d’études à l’université Joseph-Ki-Zerbo de Ouagadougou apporte sa touche à la lutte contre la maladie. Diplômée d’un master en audit-comptabilité et contrôle, la jeune fille de 32 ans s’active dans la fabrication des cache-nez. La demoiselle s’activait dans une ambiance bon enfant dans sa boutique dénommée ‘’Ange confection’’ sise aux 1200 Logements dans la capitale, quand elle nous a accueillis, le lundi 27 avril 2020. «Je suis sortie un jour en vue de payer des masques pour des tisseuses à la maison. Mais, j’ai constaté que les vendeurs avaient augmenté le prix qui passe de 200 à 500 FCFA », regrette-t-elle. C’est ce qui l’a motivée à fabriquer des masques moins chers, pour ses proches, qui attirent de nos jours de nombreuses personnes. L’étudiante, en fin d’études, dit fabriquer par jour au minimum 300 masques qui coûtaient au départ 150 F CFA et par la suite 200 FCFA.

Elle précise avoir fait recours à d’autres couturiers pour satisfaire la commande de ses clients. Selon Césarine Massom, trois personnes l’accompagnent dans la confection des maques dans ce contexte de COVID-19 pour donner le sourire à ses principaux clients qui sont, entre autres, les expatriés, la coopération suisse, les pharmacies et les banques. Elle précise que son initiative consiste à venir en aide aux populations dans cette crise sanitaire avec une production journalière de 50 masques. Le coronavirus est une réalité et les Burkinabè doivent se protéger davantage avec ce matériel de protection pour éviter la propagation de la maladie au Burkina, conseille Césarine Massom.

Les revendeurs se frottent les mains

Ousmane Taonsa est un vendeur de lave-mains à « Tanghin-barrage » dans l’arrondissement n°4 de Ouagadougou. Agé de 43 ans, marié et père de trois enfants, son métier principal demeure la soudure des barriques à eau. Il s’est récemment lancé dans la vente de matériel de protection contre la pandémie de la COVID-19. Pour lui, les gouvernants seuls ne peuvent pas venir à bout de ce mal mondial si bien qu’il faut la contribution de tous. M. Taonsa dit vendre ses marchandises en fonction de la qualité, allant de 15 000F à 30 000 FCFA. « Je peux passer toute une journée sans écouler un seul de mes articles mais souvent, je peux vendre trois », raconte-t-il. Le jeune Abdoul Raouf Guiro de 18 ans est un vendeur « libre » qui propose ses masques aux Ouagalais. Selon M. Guiro, le marché était satisfaisant au début mais ne l’est plus actuellement. «J’avais comme recette journalière la somme de 50 000 F CFA à mes débuts », précise-t-il. Il note qu’avec la sensibilisation des Forces de défense et de sécurité (FDS) ces derniers temps sur le port obligatoire des masques, l’espoir renait sur son activité.

Mamadi Compaoré, la quarantaine bien sonnée et résidant au secteur n°28 de la capitale, est un usager du cache-nez. Il ne croît pas à l’existence de la maladie à coronavirus au Burkina. « J’ai l’habitude de porter le masque et avec la maladie, son port s’est renforcé », déclare-t-il pourtant. M. Compaoré dit avoir remarqué qu’avec la COVID-19, une certaine solidarité s’est manifestée pour combattre le « mal mondial ». De la même manière, il souhaite que les Burkinabè et leurs partenaires agissent pour lutter contre le terrorisme qui endeuille des familles.

Nida OUEDRAOGO

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