Intrusions pastorales en aires protégées au Nahouri: La problématique  au cœur des débats

Le consortium Nitidae, Anges gardiens de la Nature et Naturama a organisé, le mercredi 17 juin 2020, un atelier de concertation et de sensibilisation au profit des éleveurs de la province du Nahouri sur les enjeux de conservation des espaces protégés.

La préservation des espaces de conservation requiert le respect des interdictions liées aux activités humaines nuisibles tel l’élevage transhumant sur ces périmètres. Fort de cette nécessité et pour s’assurer de l’implication effective des éleveurs dans la protection des aires de conservation de la province du Nahouri, le consortium Nitidae, Anges gardiens de la Nature et Naturama a organisé, le mercredi 17 juin 2020, un atelier de concertation et de sensibilisation autour de la question. La séance qui a réuni les éleveurs de la province s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre du projet d’appui à l’amélioration du capital naturel du paysage PONASI et à l’accroissement de la résilience des populations riveraines (PONASI), financé par l’Union européenne. Elle a été marquée par deux communications, dont l’une, autour de la thématique des espaces de conservation notamment ceux sujets à des conflits récurrents entre éleveurs et service forestier. Dans cet exposé, le directeur provincial (DP) de l’Environnement, de l’Economie verte et du Changement climatique du Nahouri, Ali Coulibaly, a rappelé que la province du Nahouri possède un fort potentiel en termes d’espaces protégés qui comprend, entre autres, le parc national Kaboré Tambi (PNKT), le Ranch de gibier de Nazinga, deux (2) corridors, des zones tampons, des zones villageoises d’intérêt cynégétique (ZOVIC), des forêts communales et des bosquets villageois. Pour Ali Coulibaly, le non-respect de la loi portant interdiction de pratiques pastorales dans les aires protégées est le motif principal des conflits entre son service et les éleveurs. Cette situation, selon lui, est due à la réduction des zones de pâturage à cause de l’augmentation de la population et des périmètres de culture.

Dans la seconde communication qui s’est articulée autour du thème « Stratégies et pratiques pour une meilleure gestion des aires protégées », le directeur provincial des Ressources animales et halieutiques (DPRAH) du Nahouri, Ablassé Ouango, a invité les éleveurs à « oser le changement » pour s’adapter aux  impératifs actuels. Il a rappelé, en effet, que contrairement au passé, l’élevage aujourd’hui est confronté au manque d’espaces, de pistes à bétail et d’eau. Des problèmes liés, a-t-il dit, non seulement au changement climatique mais aussi à la forte pression humaine et qui entrainent des conflits d’une part avec les services forestiers et d’autre part avec les agriculteurs.

Vers la création de coopératives d’éleveurs

 Aussi, pour venir à bout des difficultés et éviter les annexions des aires protégées, le DPRAH du Nahouri a conseillé les acteurs du secteur à « aller vers un mode d’élevage intensif et moderne ». Lequel, selon lui, commande un déstockage du bétail par la vente des animaux improductifs. « En un terme, il s’agit de réduire les effectifs pour pouvoir mieux s’en occuper à travers certaines pratiques qui consisteraient en la fauche et la conservation de l’herbe », a-t-il expliqué.

Par ailleurs, Ablassé Ouango a exhorté les éleveurs à s’impliquer dans la gestion des terroirs au niveau décisionnel et à tisser de bonnes relations avec l’administration et les partenaires.

Cependant, il a souligné que cela reste possible à la condition que les éleveurs s’organisent mieux et ce, depuis le niveau villageois et communal.

Une observation jugée pertinente par le président de l’Union provinciale des éleveurs du Nahouri, El Hadj Bassirou Sana qui annonce, séance tenante, des actions futures à cet effet.

« Dans les jours qui viennent, nous allons prendre attache avec le directeur provincial en charge des ressources animales pour engager la création des structures. Mais nous allons aussi revoir notre mode d’élevage parce que cela s’impose à nous et nous y gagnerons encore plus », a-t-il laissé entendre.

Dans la perspective de la création des coopératives d’éleveurs, le représentant pays de Nitidae au Burkina Faso, Jules Gaye, a laissé entendre que les acteurs pourront bénéficier de l’accompagnement du projet PONASI, pour peu qu’il y’ait, à la base, « une vraie entente communautaire ». « Nous sommes convaincus que si les acteurs sont bien organisés, ils seront conviés à des rencontres de discussions autour de la conservation des espaces et, par la même occasion, leurs préoccupations seront prises en compte dans l’aménagement des terroirs », a-t-il noté.

Se félicitant de l’intérêt que les participants à la rencontre ont manifesté vis-à-vis des sujets évoqués et des solutions pérennes envisagées pour sauvegarder le potentiel forestier provincial et booster le secteur de l’élevage, le DPRAH du Nahouri a remercié Nitidae et l’Union européenne pour l’initiative ainsi que les différents appuis annoncés. Ablassé Ouango s’est particulièrement réjoui de savoir que les éleveurs pourront compter sur le projet PONASI pour la redéfinition des pistes à bétail et des zones tampons qui sont des espaces situés à la lisière des aires protégées et dans lesquels la pratique de l’élevage est possible.

« Quand on demande aux éleveurs de ne pas annexer le corridor ou le parc national Tambi Kaboré où se retrouvent les ressources sans pour autant proposer des conditions qui leur permettent de se retenir, il est certain qu’il y’aura toujours des convoitises », a-t-il signifié.

Mamady ZANGO

mzango18@gmail.com

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