Mali : Compter sur ses propres forces

Le Premier ministre malien, Choguel Maïga, a « craché ses vérités » le samedi dernier à la France, à la tribune de l’ONU, en l’accusant d’abandonner « en plein vol » son pays en proie aux groupes terroristes. Comme si cela ne suffisait pas, M. Maïga a enfoncé le clou sur les ondes de RFI en affirmant avoir appris par la presse la fin de l’opération Barkhane. Ces annonces qui tranchent avec les enrobés diplomatiques ont suscité le courroux du Quai d’Orsay dont la réaction ne s’est pas faite attendre.

Dans la soirée du 27 septembre, le ministère français des Affaires étrangères est monté au créneau pour apporter une réponse aux propos du chef du gouvernement malien. L’Hexagone réfute toute idée d’abandon de son ex-colonie et trouve même « indécentes » les déclarations de Choguel Maïga. Au-delà des guerres de tranchées que se livrent les deux pays liés par l’histoire, il y a lieu de se poser les bonnes questions afin de mieux cerner pourquoi en est-on arrivé à une telle situation. En huit ans de présence militaire de la France au Mali, quel bilan peut-on tirer dans la lutte contre le terrorisme ? La réponse à cette interrogation semble être évidente pour bon nombre de citoyens maliens. Le désamour des Maliens de la présence des militaires français sur leur sol n’est plus un secret. Plusieurs manifestations ont été organisées aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du Mali pour réclamer le départ des troupes françaises.

Certaines voix dénoncent le « double jeu de la France » qui aurait des connexions avec certains groupes terroristes. En tant qu’Etat souverain, les dirigeants maliens comme tout autre pays se doivent d’écouter la voix de leur peuple. Si tel est le cas, nul ne peut empêcher une Nation de se défaire d’un partenaire dont il juge les résultats mitigés. Dans ce sens, le Mali n’est pas le premier ni le dernier pays à remettre en cause ses relations avec des partenaires. A propos de la crise des sous-marins, la France ne s’est-elle pas dit trahie par l’Australie ? Pour cette déconvenue, l’Hexagone a rappelé immédiatement ses ambassadeurs aux USA et en Australie. Dans la logique, autant la France peut exprimer son mécontentement face à ses pays amis, autant le Mali en a le droit. Néanmoins, le choix du futur partenaire doit être suffisamment muri pour ne pas tomber dans les travers du passé. Le gouvernement malien semble avoir le regard tourné vers la Russie à travers le groupe russe Wagner pour éteindre les foyers terroristes sur son territoire. Quelle sera la contrepartie de l’Etat malien ?

Difficile d’y répondre. Mais plusieurs langues s’accordent à dire que le rapprochement du Mali à la Russie au détriment de la France n’est rien d’autre que se décharger d’un fardeau pour transporter un autre. L’exemple de la Centrafrique est à leurs yeux une parfaite illustration. Ce pays n’a toujours pas renoué avec la paix malgré la présence des forces russes sur son territoire. Comme pour paraphraser Joseph Ki-Zerbo, « on ne développe pas, on se développe ». Il sied de compter d’abord sur ses propres forces pour assurer son intégrité territoriale. Le partenariat avec les pays amis pourrait se faire dans le renforcement de capacités et l’équipement des forces de défense et de sécurité.

Abdoulaye BALBONE

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