Tchad : Eviter l’incertitude

Mahamat Idriss Déby Itno est officiellement président de la Transition au Tchad. Le fils de l’ancien président qui s’est emparé du pouvoir à la suite du décès de son père Idriss Déby Itno en avril 2021 a été investi le dimanche 09 octobre dernier à la tête de l’Etat pour une durée de 24 mois par la Cour suprême.

Cette prestation de serment marque aussi la fin des 18 mois de règne du Comité militaire de transition composé essentiellement du groupe de 15 généraux de l’armée tchadienne qui ont pris la tête de l’Etat et dont Idriss Déby fils en était le président. Ainsi, le général 5 étoiles de 38 ans vient de troquer son treillis militaire pour le costume présidentiel. En effet, le Comité militaire de transition qui s’était fixé comme date butoir le 20 octobre 2022 pour organiser les élections présidentielles n’a pas été au rendez-vous.

De peur de tomber dans un vide juridique, des assises nationales seront organisées à la sauvette. Mais, les conclusions de ce conclave constituent de toute évidence un boulevard pour l’homme fort du Tchad si toutefois l’idée de rester au pouvoir lui passe par la tête. En effet, le général Déby, en plus de conduire la destinée du pays pour une période supplémentaire de 24 mois, a la possibilité d’être candidat aux élections présidentielles à venir.

Cette décision est perçue comme une pilule amère par une partie de l’Opposition et de la société civile. Dans un tel contexte, la question qui taraude l’esprit de bon nombre d’observateurs est de savoir si le président de la Transition parviendra-t-il à remettre son pays sur les rails d’un Etat de droit ? S’il a juré de remplir avec loyauté les hautes fonctions qui lui sont confiées, de préserver l’intégrité territoriale de son pays et de défendre les droits et libertés individuelles, le moins qu’on puisse dire est que la tâche ne sera pas de tout repos.

En effet, si à priori Mahamat Idriss Déby Itno a des leviers indispensables en sa possession pour atteindre son but, il n’en demeure pas moins que certains impairs le desservent. Le premier couac porte sur la question de la souveraineté du dialogue national. Soupçonnant les nouvelles autorités de manipulation, une bonne partie de l’Opposition et de la société se sont retirées des assisses. L’Eglise catholique qui prenait également part aux discussions a dû aussi renoncer à sa participation.

Et comme si cela ne suffisait pas, le lundi dernier, quarante personnalités ont signé et publié un communiqué évoquant « les risques d’un plan de succession dynastique au Tchad. » Les signataires du texte estiment que les recommandations issues de ce dialogue ne constituent pas une base solide pour la réconciliation nationale. Ils appellent par conséquent à un retour à l’ordre constitutionnel au plus vite.

L’autre défi à relever est de convaincre la communauté internationale, notamment l’Union africaine, à laquelle le général avait promis de respecter une durée de 18 mois de transition. Ce qui n’a pas été le cas. Dans un tel contexte, nul besoin de dire que M. Déby est en train de jouer sur un terrain glissant et la moindre erreur pourrait être fatale pour son pays qui se trouve dans le collimateur des groupes armés. Vivement que le général parvienne à mettre en branle son savoir-faire pour éviter à son pays de sombrer.

Abdoulaye BALBONE

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