Alors que les interrogations fusent à propos du retour à un ordre constitutionnel normal en Guinée, le Premier ministre, Amadou Oury Bah, lève les doutes. Il a annoncé l’organisation de la présidentielle en décembre prochain, dans un discours prononcé lundi 12 mai dernier à Abidjan, à l’Africa CEO Forum 2025, plateforme dédiée au dialogue secteur public-privé. Ce rendez-vous électoral très attendu en Guinée sera précédé par un referendum constitutionnel, prévu le 21 septembre prochain, en vue de statuer sur des questions relatives à l’exercice du pouvoir et à la gestion des institutions.
Comme il l’avait dit dans son message de nouvel an, le Président de la Transition, le général Mamady Doumbouya honore son engagement de convoquer ses compatriotes dans les urnes cette année. L’opposition et une partie de la société civile qui réclament bec et ongle le retour de la Guinée sur le chemin de la démocratie doivent logiquement se réjouir de ce pas en avant. Pour autant, ces entités ne vont pas sauter au plafond pour manifester leur joie, car des zones d’ombre et des points d’achoppement subsistent dans l’organisation des futures élections. L’annonce de la tenue de la présidentielle peut être sujette à caution, dans la mesure où aucun décret ne l’officialise pour le moment. Et si c’était juste une déclaration pour rassurer les investisseurs de la Guinée, l’Africa CEO Forum étant une tribune indiquée en la matière ? Il faut accorder tout de même du crédit aux propos du Premier ministre Bah, quitte à ce que la réalité nous conforte ou dissuade plus tard. Si l’organisation de la présidentielle venait à être confirmée par un décret, ce qui est attendu, deux sujets qui fâchent pourraient l’influencer négativement. Primo, la décision des autorités de la Transition de confier la conduite du processus électoral au ministère de l’Administration et non à la Commission électorale nationale indépendante ne rassure pas les opposants. Bien au contraire, cette mesure les inquiète et les amène à crier à la mascarade électorale avant l’heure. Secondo, la question de la candidature du général Doumbouya retient l’attention de l’opposition qui ne souhaite pas vivre ce scenario. Pour l’heure, le chef de l’Etat guinéen n’a pas affiché ouvertement son intention de solliciter le suffrage de ses compatriotes, mais certains de ses proches et ses partisans souhai
tent qu’il le fasse. Les appels à la candidature de Doumbouya sont-ils suscités à dessein, comme on le voit souvent dans les démocraties africaines ? C’est une possibilité.
Toujours est-il que le Gal Doumbouya reste muet sur le sujet et on attend d’avoir clairement sa position dans les semaines ou mois à venir.
En faisant un coup d’état en septembre 2021 à son prédécesseur, Alpha Condé, Doumbaya avait promis construire une nouvelle Guinée, avec ce que cela implique sur le plan de la démocratie et de la gouvernance. Certains de ses compatriotes s’attendent donc à ce qu’il fasse le ménage, remette le pouvoir dans de bonnes mains, avant de s’éclipser. Il reste à savoir si Doumbouya partage ce plan, lui qui a travaillé à asseoir son autorité sur le pays. Va-t-il être candidat à la présidentielle en vue ou quitter ses fonctions au profit des civils comme il s’était engagé ? Le temps nous le dira…
Kader Patrick KARANTAO