La touche sankariste du régime Kaboré

Les images ont fait le tour du monde. Les poings levés et scandant « la patrie ou la mort », à la mémoire du père de la Révolution, Thomas Sankara, les Burkinabè ont fait tomber le régime Compaoré, en octobre 2014. Depuis, promesse leur avait été faite que « plus rien ne sera comme avant ». Le pays est certes loin des comptes de cette promesse, mais au fil des ans, des faits, signes et actes montrent de plus en plus que l’orientation sankariste refait surface dans notre pays. En effet, au-delà des « avancées » judiciaires dans le dossier Sankara, de la réalisation du Mémorial Sankara et de la construction de plusieurs statues à son effigie dans de nombreuses villes du pays, le gouvernement burkinabè vient de baptiser l’université Ouaga II « Université Thomas-Sankara », par décision prise en conseil des ministres, le mercredi 22 juillet 2020. Cet acte courageux, plein de noblesse et de reconnaissance envers le père de la révolution d’août 1983 est d’une grande importance dans la réhabilitation de sa mémoire. Dans le fond et contrairement à la Rectification et la démocratie qui s’en est suivie, effaçant toutes les traces de l’œuvre de Sankara, l’après-insurrection crée progressivement les conditions de « résurrection » de l’homme. Ce printemps des idéaux du président Sankara est à mettre à l’actif de trois principales entités. D’abord, le peuple burkinabè. « Tuez Sankara et des milliers de Sankara naîtront », avait prédit le père de la Révolution. Sans risque de se tromper, des milliers, voire des millions de Sankara sont nés et ont même grandi au Burkina Faso, en Afrique et à travers le monde. De plus en plus, les T-shirts à l’effigie du panafricaniste se rencontrent dans tous les pays du monde, en plus des salles de conférence, de cinéma et de monuments qui portent son nom. Peut-on dissocier le goût de plus en plus prononcé du Burkinabè pour les mets locaux et le Faso dan fani du « Produisons ce que nous consommons et consommons ce que nous produisons », cher au révolutionnaire ? A l’évidence, non !
Il faut ensuite reconnaitre que depuis son arrivée au pouvoir, l’administration du président Roch Marc Christian Kaboré a su intégrer dans son action politique, une vision sankariste. A titre d’exemple, le chef de l’Etat qui s’habille quasi-quotidiennement en Faso dan fani, a « enchaîné » avec l’habitude qu’avait son prédécesseur, Yacouba Isaac Zida puisque le pagne traditionnel burkinabè avait été surnommé « Qui n’est pas Yacouba Isaac Zida ?». L’instauration de la Journée de l’arbre et du Salon de l’élevage du Burkina Faso (SABEL) et bien d’autres actions ont fini de convaincre que 30 ans plus tard, les orientations du révolutionnaire prennent de plus en plus forme.
La troisième entité est l’œuvre des Sankaristes et surtout celle de l’Union pour la renaissance/Parti sankariste (UNIR/PS). A défaut d’avoir conquis lui-même le pouvoir d’Etat, le parti de « l’œuf » qui a rejoint la majorité présidentielle en 2016 pousse subtilement ses pions. Et pour cause, même si le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) du président Kaboré est le parti au pouvoir, il faut reconnaître que des actions comme la conception des statues de Sankara, la promotion des mets locaux et du Faso dan fani, l’initiative et l’organisation de la Journée de l’arbre et du SABEL, sont pilotés par des départements ministériels gérés par l’UNIR/PS, notamment le ministère en charge de l’élevage, et celui de l’environnement. Il s’agit là d’actions fortes qui étaient partie intégrante de l’orientation politique de la révolution que l’UNIR/PS contribue à mettre en œuvre avec la « bénédiction » du régime Kaboré.
Loin de circonscrire cette percée de l’idéologie sankariste à ces trois entités (parce qu’elle est à mettre à l’actif de tous), il faut reconnaître que d’importantes victoires d’étape ont été engrangées en cinq ans. Il reste à espérer plusieurs autres pour faire briller encore plus les idéaux du président Thomas Sankara au profit de la jeune génération et du développement harmonieux du Burkina Faso.

Jean-Marie TOE

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