Un coup de massue

La question du franc CFA continue d’alimenter le débat dans bien de milieux sur le continent africain. Des acteurs de la société civile aux gouvernants en passant par des experts en économie, les positions sont souvent tranchées sur le sujet. Dans un entretien avec la presse, début avril dernier, le Président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye, est revenu sur la question en rappelant les trois principes dont dispose un pays pour financer son économie.

Ainsi, dans cet ordre d’idée, il a cité la fiscalité, l’endettement et la monnaie. Pour le dernier principe, le président sénégalais est convaincu que sans une monnaie propre et souveraine, tout pays engagé dans la compétition économique, se trouverait handicapé d’un levier essentiel.

« Si tu ne possèdes pas ta propre monnaie, tu ne peux pas avoir d’impact sur cet élément essentiel », a-t-il déclaré. Une vision qui, disons-le, rejoint celle des pays de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) qui, depuis leur retrait de la CEDEAO, se sont inscrits dans une dynamique de souveraineté et de développement endogène. Toute chose qui passe nécessairement par le contrôle de la politique monétaire, si tant est qu’ils veuillent un meilleur financement des projets de développement dans leur espace.

La sortie du président sénégalais sonne ainsi comme un coup de massue pour le franc CFA mais bien plus une relance du projet de la création de la monnaie commune de la CEDEAO, l’Eco, dont le processus d’opérationnalisation traine, au grand dam de nombreux panafricanistes. Le natif de Ndiaganiao montre clairement son impatience de voir ce projet se concrétiser pour permettre aux pays membres de l’espace d’être plus souverains et d’avoir leur mot à dire sur l’échiquier économique mondial.

« Si l’UEMOA tarde à obtenir l’aval de la CEDEAO, elle peut prendre l’initiative de créer une monnaie souveraine avec un nom, un symbole et des billets distincts », a-t-il proposé, n’excluant pas l’idée de se retirer du franc CFA pour créer sa propre monnaie afin d’affirmer sa souveraineté monétaire.

Même si le franc CFA, utilisé dans l’espace UEMOA et, au-delà, est arrimé à l’Euro tout en garantissant sa stabilité monétaire grâce au Trésor français, des voix s’élèvent, de plus en plus, pour le dénoncer, car étant perçue comme un héritage colonial et limitant, par ricochet, la souveraineté économique et politique des pays africains. Des critiques qui valent leur pesant d’or, ce d’autant plus que le franc CFA dépend essentiellement de la France avec cette obligation historique pour les pays ouest-africains de déposer leurs réserves de change auprès du Trésor français.

C’est pour couper ce cordon ombilical avec l’ancienne colonie que les pays de l’espace CEDEAO ont pris l’initiative de créer leur propre monnaie. Malheureusement, tel un serpent de mer, ce projet tarde à voir le jour. Espérons que cette sortie de Bassirou Diomaye Faye donnera un coup de grâce au franc CFA.

Kamélé FAYAMA

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