Depuis que le gouvernement a donné un coup de peigne sur la tête de la relève, certains de nos élèves en colère ont tiré le glaive, pendant que d’autres se sont arrachés les cheveux en signe de désapprobation. Comment la féline tigresse à l’en-tête de la première table va-t-elle se mettre en valeur sans sa tête de fête même si elle n’est pas bien faite ? C’est la défaite ! Que voulez-vous que la star de 6 de moyenne sur 20 fasse de sa tête sans ses dreadlocks de diablesse, teintés aux couleurs nationales, si elle ne peut plus faire balancer ses tentacules volant à sa guise ?
Comment la flexible sirène aux contours plastiques de la dernière table va-t-elle faire pour encore épater la classe avec ses têtues tresses de classe qui « clashent » ? Oublions la ronde poupée ronfleuse des cours de math dont les mèches comptent plus que son rang en classe. Il y a même des parents qui ont piqué une crise de nerfs, parce qu’ils ne verront plus leur coquette fille arborer les mèches de fée qui attisent le feu de l’amour maternel ou paternel. Mais pour un arrêté qui coupe les cheveux des garçons à ras, il n’y a vraiment pas péril en la demeure, puisqu’aucune tête ne sera coupée. Et puis, pour les filles, les tresses et les nattes de cheveux naturels et assimilés sont autorisées.
Finalement, le plus important semble ne plus se trouver dans les cheveux mais plutôt dans le contenu du crâne. Désormais, les coiffures aux allures de tignasse ou de broussaille ne pousseront plus dans la cour de l’école et dans les salles de classe. Fini, les crinières de mèche qui empêchent les voisins de voir au tableau ! Fini, les touffes de fardeaux poilus aux cliquetis de perles rares ! Désormais, la seule originalité à avoir en tête n’est plus sur la tête mais dans la tête. Dorénavant, la seule qualité à mettre en avant, c’est la beauté intellectuelle.
D’ailleurs, on ne va pas à l’école comme on va au marché ou comme on monte sur un podium de miss ; on ne va pas à l’école pour exhiber son bosquet sacré de mèches nacrées… Bref, l’école est le sanctuaire du savoir, le lieu-dit de la connaissance et de l’apprentissage. On n’a pas besoin d’encombrer sa tête de crête à perpette, de menus fretins cosmétiques pour paraître le plus chic là où on attend l’authentique, le plus doué. Il suffit parfois de regarder de près les meilleurs élèves pour se rendre compte qu’ils ne sont pas forcément des mannequins ou des miss. Ils sont simples et naturels, parce qu’être naturel, c’est aller à l’essentiel.
En prenant cet arrêté, le gouvernement n’a aucune dent contre nos élèves. Il veut juste rappeler aux apprenants qu’on ne peut apprendre dans la rigueur qu’en étant concentré. On ne peut pas savoir tracer un bon cercle quand l’attention ne dépasse pas le champ des tresses qui pressent l’ego. On ne peut pas suivre les cours en admirant ou en convoitant la beauté de la « tête en duplex » de la camarade de classe qui ne cesse de brandir son trophée de torsadés dorés. On ne peut pas se sentir heureuse et en paix avec soi-même quand la tête de la voisine porte des mèches naturelles brésiliennes pendant que la caboche à soi-même porte la coiffure de la résilience et de l’austérité. Non, cet arrêté n’est pas celui de la jalousie ou de la répression gratuite !
Elle veut juste niveler les têtes pour toucher les esprits, afin qu’aucun élève ne se sente complexé pour le futile qui prend la forme de l’utile. Et si nous voulons vraiment valoriser l’essentiel, il faut commencer à inculquer à nos enfants le sens de l’humilité qui grandit. Il faut que chaque parent éduque son enfant avec comme référence des valeurs qui le bâtissent de l’intérieur plutôt qu’avec des fioritures qui embellissent l’extérieur sans meubler le fond du futur homme intègre. Oui, les enfants apprennent par l’exemple. La meilleure approche serait que nous les parents, éducateurs, enseignants ou surveillants, soyons de bons exemples.
Clément ZONGO
clmentzongo@yahoo.fr