La France rend hommage, cet après-midi, aux 13 soldats de la force Barkhane, morts au Mali dans un accident d’hélicoptère, le 25 novembre 2019. 2 500 personnes sont attendues à cet effet à la Place des Invalides dont le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta. La cérémonie est particulière, selon l’Elysée, car l’incident a enregistré le bilan humain le plus lourd depuis l’attentat du Drakkar à Beyrouth, en 1983, qui avait fait 299 morts dont 58 soldats français.
La présence du chef de l’Etat malien et de nombreux autres officiels ouest-africains à cet évènement traduit, sans nul doute, la compassion et la solidarité de l’Afrique de l’Ouest au peuple français. Car, il faut le reconnaître, en dépit des critiques formulées çà et là, les partenaires étrangers et les forces françaises en particulier, abattent un travail remarquable dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, dans cette partie du continent.
Ces efforts méritent une reconnaissance sans complexe au-delà des allégations et insinuations qui accablent l’ancienne puissance coloniale. Alors que les
4500 hommes de Barkhane attendent depuis 2014, «l’opérationnalisation complète » de la force conjointe du G5 Sahel pour passer le relais. Il ne faudrait donc pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Les relations entre le pays de Emmanuel Macron et ses ex-colonies ne sont pas exemptes de tout reproche.
Mais il faut admettre que dans cette lutte contre l’hydre terroriste au Sahel, les soldats français ne partagent pas seulement les mêmes risques que leurs frères d’arme du Mali, du Burkina Faso, du Niger, du Tchad… Ils doivent aussi faire face à des récriminations plus ou moins ouvertes d’une certaine opinion publique. Les jeunes générations en particulier, doivent faire preuve de recul face à ce vent de populisme, car la guerre dite de 4e génération, inaugurée en Syrie, ignore les questions de souveraineté. Cette guerre globalisante, asymétrique, combine commandement à distance, révolution de l’information en temps réel, armes High Tech et mobilise des populations dans les domaines politique, économique, social et culturel.
Pour cause de terrorisme, une instabilité au Mali, au Burkina, au Niger ou dans un autre pays va, à coup sûr, avoir des répercussions sur l’Europe. Le flux migratoire clandestin, engendré par la crise libyenne, en est un exemple.
Les relations entre la France et ses anciennes colonies sont établies sur des accords et conventions avec des clauses clairement définies. De ce fait, les réalités d’hier n’étant pas forcément celles d’aujourd’hui, ces textes peuvent être retouchés pour répondre aux exigences du moment.
Mais la décision doit venir du plus haut sommet des Etats. Il revient aux premières autorités des pays concernés de prendre les devants en lieu et place des experts autoproclamés en relations internationales. Ces derniers ignorent le plus souvent les subtilités qui lient leur pays à l’Hexagone. A tel point que les déclarations et autres allusions ont fini par créer une polémique inutile sur la présence militaire au Sahel.
La coopération avec l’armée française ne devrait pourtant pas être source d’éventuelles brouilles entre Paris et Ouagadougou.
Mais la sortie médiatique d’hier du ministre des Affaires étrangères, Alpha Barry sur cette question, semble procéder de cette nécessaire reprise en main d’une préoccupation oh combien sensible…La réalité est que le terrorisme est là et le plus important est d’unir toutes les forces, d’où qu’elles viennent, pour le combattre. Ce n’est pas au moment où le pays a besoin de ses partenaires qu’il faut jeter l’opprobre sur eux. A moins de vouloir se livrer pieds et mains liés à l’ennemi.
Par Mahamadi TIEGNA