Dans cet entretien, un Volontaire pour la défense de la patrie (VDP) du Centre-Nord, qui a requis l’anonymat, revient sur le sens de son engagement pour la nation, l’engouement grandissant des populations à s’enrôler pour défendre la patrie. Il appelle les Burkinabè des villes et des campagnes, sans distinction aucune, à la solidarité, à l’union sacrée autour du combat pour la restauration de l’intégrité du territoire national !
Sidwaya (S) : Qu’est-ce qui vous a motivé à vous engager dans la défense de la patrie ? Zeus : Je me suis engagé comme Volontaire pour la défense de la patrie (VDP) depuis trois ans. Cet engagement s’explique par notre farouche volonté de s’opposer à toute velléité d’occupation de notre territoire par des terroristes. Depuis le temps de nos ancêtres jusqu’à aujourd’hui, nous n’avons jamais vu cela ! Nous n’accepterons aucune tentative d’occupation de notre pays, d’où qu’elle vienne ! Personnellement, j’ai déjà été victime d’une attaque terroriste. Ils ont brûlé mes quatre voitures, mes six maisons avec tout leur contenu. S : Sur le terrain, avez-vous les moyens nécessaires pour assurer cette défense de la patrie ? Zeus : Nous avons reçu des formations de la part de l’armée. Nous avons aussi des équipements, des armes pour mener les opérations sur le terrain ; mais nous en avons encore besoin pour être plus efficaces. Malgré ces limites, l’esprit patriotique qui nous abrite fait que nous ne nous désarmons pas. Nous sommes toujours engagés, déterminés à défendre notre pays !
S : Quelles sont les principales difficultés que vous rencontrez sur le terrain ?
Zeus : La principale difficulté est liée à l’insuffisance du soutien au niveau des équipements et des moyens de subsistance. Nous recevons des soutiens çà et là mais ce n’est pas suffisant. Les VDP sont des agriculteurs, des commerçants, des artisans, etc. Ils ont abandonné leurs activités pour se consacrer entièrement à la défense de la patrie. Ils n’ont plus autres sources de revenus pour se prendre en charge et nourrir leurs familles. Tenir un fusil devient difficile quand on a le ventre vide. Je suis un artisan, chaque année, je partais au moins deux fois en Europe pour vendre mes objets d’art. Depuis l’avènement de la crise, je n’y vais plus ; les expatriés ne viennent plus non plus ! Certains VDP font des demandes d’autorisation pour aller travailler afin d’avoir de quoi nourrir leurs familles et se prendre en charge pour pouvoir poursuivre le combat. Rien que ce matin, j’ai reçu l’appel d’un VDP qui est en pleine patrouille en brousse et qui pense à sa femme et ses enfants qu’il a laissés à la maison et qui n’ont pratiquement rien à manger ! Si ce problème alimentaire n’est pas résolu le plus rapidement possible, je crains qu’il n’entame profondément le moral des VDP qui, malgré tout, ont à cœur de défendre leur patrie !
S : Face à ces problèmes, y-a-t-il encore de l’engouement, au sein des populations, pour la défense de la nation ?
Zeus : Les gens sont plus que motivés pour défendre l’intégrité du territoire national. Chaque jour que Dieu fait, il y a des citoyens qui demandent à s’enrôler comme VDP pour se battre pour sauver le pays. Ils ne demandent que de la formation et des armes pour aller au front. Aujourd’hui, j’ai plus de 1000 personnes qui veulent s’enrôler pour contribuer à libérer notre pays de l’hydre terroriste.
S : Peut-on dire que le temps de la peur est révolu ?
Zeus : C’est bien cela ! Les populations n’ont plus peur ! Elles ont simplement besoin de soutien et de moyens pour être efficaces sur le terrain de combat !
S : Il se susurre souvent que des VDP blessés au front manquent de soins. Qu’en est-il dans votre zone ?
Zeus : Pour ce qui est de la région du Centre-Nord, nous n’avons pas ce problème. Tous les blessés dont nous sommes au courant ont toujours été pris en charge par l’infirmerie du détachement militaire. Je ne peux pas dire que le problème n’est pas réel ailleurs. J’entends parler, mais je n’ai pas de preuve.
S : Mais qu’en est-il des rétributions financières forfaitaires des VDP ?
Zeus : A ce niveau, nous accusons souvent des retards de paiements de trois à quatre mois ; alors que nous ne pouvons pas rester assis sans faire des patrouilles sous prétexte que nous ne sommes pas payés ! Les retards de paiements constituent un vrai souci pour nous !
S : Vous avez rencontré le Président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré. Que peut-on retenir de cette rencontre ?
Zeus : Nous sommes sortis de cette audience très réconfortés, plus que jamais galvanisés pour poursuivre le combat pour la défense de la mère-patrie. A son contact, nous avons vu un Burkinabè patriote, très préoccupé par la situation sécuritaire que vit son pays, contrairement aux allégations entendues çà et là. Il a besoin du soutien franc, sincère et sans calcul de tous les fils et filles de notre pays. Nous avons son total soutien !
S : Quel message avez-vous à lancer aux Burkinabè ?
Zeus : Le message que nous avons à lancer aux Burkinabè des villes et des campagnes, est celui de l’appel à la solidarité, à l’union sacrée pour débarrasser notre pays de ses ennemis. Nous les invitons à s’engager avec honneur et intégrité dans la défense de la nation. Car, il est vrai que tout le monde ne peut pas aller au front, mais quel que soit son statut social ou son niveau de responsabilité, tout un chacun peut, à sa manière, contribuer efficacement à la lutte contre le terrorisme dans notre pays. Je demande aux plus hautes autorités de solliciter l’implication totale des chefs coutumiers et religieux, qui de par le passé ont aidé notre pays à sortir de situations difficiles.
Interview réalisée par Sidgomdé