Albert Lombo Dayo, chef de canton de Dédougou : « Il faut qu’on revienne à nos valeurs et traditions »

Militaire de formation, Albert Lombo Dayo, est depuis le 5 juin 2004, le chef de canton de Dédougou, chef-lieu de la région de la Boucle du Mouhoun. Après 39 ans de service dans l’armée burkinabè, du haut de ses 20 ans de règne à la destinée de Dédougou, cet ancien militaire (il est à la retraite depuis 2020), œuvre pour la conservation de la culture bwa dans son cantonnât. Une équipe du journal de tous les Burkinabè s’est entretenue avec ce garant des us et coutumes dans le cadre de la rubrique du journal : L’invité de la Rédaction. Pendant environ une heure, dans un langage franc, le 12e chef de canton de Dédougou s’est prêté aux questions de l’équipe du quotidien Sidwaya.

Sidwaya (S) : Quel est le ressort territorial du canton de Dédougou ?

Chef de canton de Dédougou : (C.C.D) : Le canton de Dédougou a vu le jour dans les années 1898. Il y a eu le premier chef de canton de Dédougou du nom de Yimali, celui qui a accueilli les Blancs. Le canton de Dédougou, de nos jours, compte 39 villages. Le découpage administratif a fait qu’on parle de 37 villages. Mais en réalité, Moundasso et Tionkuy sont des villages à part entière, mais conformément au découpage administratif, ils sont rattachés à des secteurs. Je suis le douzième chef de canton, intronisé le 5 juin 2004.

S : En tant que chef de canton, quels sont vos rôles et responsabilités envers la communauté ?

C.C.D : Mes rôles et responsabilités envers les communautés, c’est d’abord d’œuvrer à leur bien-être, notamment social, économique et culturel.

S : Vous êtes un militaire à la retraite après 39 ans de service. Comment arriviez-vous à concilier cette fonction de militaire et la casquette de gérant des us et coutumes, quand vous étiez en activité ?

C.C.D : Il y a lieu ici de remercier la hiérarchie militaire qui m’a permis en son temps d’être en activité tout en exerçant mes obligations de chef de canton. Ce n’était pas évident. Connaissant le règlement militaire, il y avait certaines activités que l’on ne pouvait pas mener compte tenu du statut de militaire. Mais grâce à la compréhension de mes chefs, j’ai pu tirer mon épingle du jeu en alliant responsabilités de militaire et de chef coutumier. Pour me faciliter la tâche, j’ai bénéficié d’une affectation, après mon intronisation en 2005, au camp Nazi-Boni de Dédougou où j’ai été nommé chef de service.

S : Vous êtes le président d’une association de chefs coutumiers appelé Massathon. Qu’est-ce qui a prévalu à sa création ?

C.C.D : Le Massathon est né du fait qu’il fallait que les chefs coutumiers de la région de la Boucle du Mouhoun se connaissent pour mieux régler les différents problèmes qui se posent à eux. En se mettant ensemble, nous pouvions faire beaucoup de choses. C’est ce qui a prévalu à la mise en place de cette association qui compte 42 cantons.

S : Comment gérez-vous les tensions interethniques et intercommunautaires dans votre canton ?

C.C.D : Nous n’avons pas encore connu de conflits interethniques. Il y a eu la crise à Passakongo qui est un cas isolé, mais on ne peut pas généraliser. La langue et les dents sont ensemble dans la bouche, mais il arrive des fois qu’il y ait des malentendus. Les Peulhs de Passakongo sont dans ce village depuis longtemps. Leurs grands-parents sont nés là-bas et sont enterrés là-bas. Moi, je ne considère pas cela comme un conflit interethnique. Le calme est revenu et ils vivent toujours ensemble à Passakongo. Même entre nous, dans la communauté bwa, il y a des malentendus, même dans la famille, cela ne peut pas manquer. Le cas de Passakongo auquel vous faites certainement allusion, pour moi, n’est donc pas un conflit que l’on peut considérer comme un conflit ethnique.

S : Quelle est la place de la femme dans la gouvernance de votre canton ?

C.C.D : La femme est la maman, la sœur et l’épouse. Elle a une place dans le développement économique. Dans nos sociétés, elle doit pourvoir aux besoins de la famille. L’homme donne le mil et le reste est à la charge de la femme pour que la nourriture soit faite. De ce fait, elle joue un grand rôle.

S : Il y a quelques années, vous avez donné le surnom « Hadouba » à une ancienne ministre de la Femme. Pourquoi ce nom de baptême ?

C.C.D : C’est au ministre Laurence Marshall Ilboudo que nous avons donné ce surnom. Hadouba est la sœur du fondateur de Dédougou qui est Koué. Elle est restée aux côtés de son frère Koué et a œuvré avec lui pour que le village de Bankuy puisse exister. C’est moi qui ai donné ce surnom à Laurence Marshall Ilboudo au regard des actions qu’elle posait en son temps pour l’épanouissement de la femme et pour sa combativité à l’image de la sœur du père fondateur de Dédougou.

S : Quelles relations entretenez-vous avec les autres chefs coutumiers concernant les questions d’intérêt national ?

C.C.D : Nous avons au Burkina Faso le Conseil supérieur de la chefferie coutumière présidé par le Mogho-Naaba. Pour les questions d’intérêt national, nous sommes consultés et nous donnons notre point de vue sur ce qui peut être bénéfique pour la Nation.

S : Certains chefs coutumiers sont aussi des acteurs politiques. Quelle analyse en faites-vous ?

C.C.D : La fonction du chef par essence est politique. Il y a des choses qui allaient passer inaperçues à l’Assemblée nationale s’il n’y avait pas de chefs coutumiers là-bas. On ne peut pas décider pour le bonheur des populations en oubliant les chefs traditionnels. Je pense qu’à l’avenir, il faut songer à désigner des chefs coutumiers à l’Assemblée nationale sans passer par des élections. Il suffit de demander au Conseil supérieur de la chefferie qui pourra désigner des gens à cet effet. Sur les questions de grande importance, ils doivent donner leur avis. Par exemple, l’homosexualité n’existe pas dans nos valeurs traditionnelles.

S : Les cantons de Banfora et Fada N’Gourma connaissent des situations de bicéphalisme. Quelle appréciation en faites-vous ?

C.C.D : Généralement, il s’agit de personnes qui pensent qu’avec l’argent, on peut tout faire. Nous avons vu des gens qui ont dit que s’ils aident le chef et après il devient fort, on pourra le contrôler. C’est une injure à la chefferie. Souvent il faut préserver l’essentiel et cet essentiel c’est ce que nos ancêtres nous ont légué. Tout le monde connait les voies par lesquelles un chef traditionnel peut être intronisé. Mais si on outrepasse ces voies pour regarder le pouvoir financier de l’individu pour l’introniser, cela ne peut jamais marcher. Le cas de Fada est regrettable, mais il y a quelque chose en vue au niveau du Conseil supérieur de la chefferie coutumière pour palier ce dysfonctionnement.

S : Vous êtes intervenu, en collaboration avec le chef de Canton de Gaoua, dans l’apaisement de la crise de chefferie à Banfora qui n’a toujours pas eu de dénouement heureux. Qu’est-ce qui coince ?

C.C.D : Il y a eu un problème de succession à la suite du décès de Héma Fadougo que j’ai connu très bien, car nous avons travaillé ensemble dans les activités du Conseil supérieur de la chefferie. Quand la crise de succession est survenue, ils sont allés voir le président du Faso qui les a orientés vers la chefferie coutumière. Ils sont allés voir le Mogho Naaba qui les a instruits de voir le chef de canton de Bobo-Dioulasso. C’est ainsi que le chef de canton de Bobo-Dioulasso a fait appel aux chefs de l’Ouest, notamment ceux de la Boucle du Mouhoun, des Hauts-Bassins, du Sud-Ouest et des Cascades. Nous avons envoyé une délégation à Banfora pour mieux comprendre les choses. Après, nous sommes allés rencontrer les protagonistes. A l’issue de tout ce que nous avons pu collecter comme informations, nous avons désigné le chef légitime. Nous avons écrit et apposé nos signatures pour le reconnaitre. Quand il y a des rencontres, nous collaborons avec ce dernier.

S : Le gouvernement a institué la journée des coutumes et traditions pour le 15 mai de chaque année. Que pensez-vous d’une telle initiative ?

C.C.D : C’est une très belle chose. Pourquoi les autres communautés et pas nous. Le 15 mai, vous allez voir ce qu’on va faire concrètement dans le canton de Dédougou. Il y a beaucoup de rites que nous avons abandonnés. Il faut que l’on revienne à nos racines. Si vous voyez que les jeunes sont dans la déperdition, c’est surtout lié à l’abandon de ces valeurs.

S : Le Burkina Faso est frappé depuis 2015 par une crise terroriste. Certains pointent du doigt l’abandon des valeurs traditionnelles. Etes-vous de cet avis ?

C.C.D : C’est vrai. C’est parce que nous avons abandonné nos traditions. Autrefois, deux à six personnes ne pouvaient pas venir dans un village et dire aux gens de déguerpir. Le village est fondé sur quelque chose de solide. Et si cette chose est négligée, elle vous néglige aussi. Il faut qu’on revienne à nos valeurs. Avant, il suffisait de quelques incantations, et vous verrez des abeilles qui viendront faire leur travail. Aujourd’hui, qui peut le faire encore ? Nous avons tellement vilipendé nos traditions et voilà la conséquence aujourd’hui. Autrefois, cela ne pouvait pas se faire. Les ennemis, s’ils boivent même l’eau du village ou mangent un grain de maïs, ils ne vont pas s’en sortir. Je ne dis pas que les autres communautés religieuses sont mauvaises. Elles sont même très utiles au pays aussi. Mais nos valeurs et nos traditions sont très importantes aussi. Même le prénom d’un enfant n’était pas donné au hasard.

S : On vous dit impliqué dans les actions de lutte contre le terrorisme. Que faites-vous concrètement dans ce sens ?

C.C.D : Lutter contre le terrorisme, c’est trop dit. Mais nous sensibilisons surtout les jeunes à ne pas se laisser aller dans la facilité. Un jeune qui s’enrôle comme terroriste, même s’il a l’argent, il le dépense où ? Parce qu’il est tous les jours en brousse. Il est mieux de revenir pour que nous vivions ensemble. Les milliers de vies perdues dans l’Alliance des Etats du Sahel profitent à qui ? Il faut que les jeunes reviennent à la raison. Et cette raison, c’est revenir vivre en famille. Nous pouvons toujours nous pardonner et reprendre la vie.

S : Au regard de votre engagement, ne craignez-vous pas pour votre vie ?

C.C.D : Je suis un citoyen comme les autres. Si c’est le terrorisme qui doit me faire partir, les ancêtres sont là. Je crois fortement au spirituel, et chaque matin il faut demander à Dieu et aux mânes de nos ancêtres de veiller sur nous. Le terrorisme nous est imposé. Ce qui fait qu’on ne peut pas dormir, on n’a pas la quiétude, on ne peut même plus voyager comme l’on souhaite.

S : Quels rapports entretenez-vous avec les FDS et les VDP dans cette lutte contre le terrorisme ?

C.C.D : Nous avons de bons rapports avec les Forces combattantes. Leur combat est le nôtre. En tant que responsable coutumier, nous travaillons pour la quiétude et l’épanouissement des populations de notre ressort. Et nous soutenons ce combat que les FDS et les VDP mènent en cette situation d’insécurité. Tant que nous pouvons apporter un plus pour gagner cette lutte, nous n’allons pas hésiter. Nous n’avons pas d’autres choix parce que nous ne pouvons pas tous fuir à la recherche de refuges à l’intérieur ou à l’extérieur du pays. Notre souhait est que la sécurité revienne dans notre pays le plus tôt possible afin que les populations puissent vaquer librement à leurs occupations.

S : Vous vous êtes beaucoup impliqué dans la réinstallation et la promotion de l’emploi au profit des Personnes déplacées internes (PDI) …

Assisté de son porte-parole, le chef coutumier bwa s’est prêté à toutes les questions de l’actualité nationale, internationale et sportive de l’équipe de Sidwaya.

C.C.D : Effectivement, pour les PDI qui sont habituées au travail de la terre, nous avons pu trouver des lopins de terre à cet effet. Je profite remercier les chefs de village du canton de Dédougou qui nous ont facilité cette tâche en mettant à notre disposition ces lopins de terre pour les PDI. En tous les cas, les PDI qui ont manifesté le besoin de terre en ont eu.

S : Dans la dynamique de reconquête progressive du territoire national, de nombreux PDI sont reparties dans leur village dans le canton de Dédougou. Comment appréciez-vous cette action des FDS et des VDP ?

C.C.D : C’est à saluer et à encourager. Nous devons même nous impliquer fortement pour cette reconquête du territoire parce que chaque jour que Dieu fait nous avons les PDI à nos portes avec leurs doléances parce qu’elles n’ont pas trouvé à manger, ou elles ont des enfants malades qu’elles n’arrivent pas à soigner. Si les FDS, avec le concours de tout le monde arrivent donc à reconquérir le territoire, toutes ces personnes pourront regagner leurs localités. Et on sera tous soulagés.

S : Que peut-on faire pour davantage accélérer cette reconquête ?

C.C.D : C’est un problème de moyens sinon les solutions ne manquent pas. Par exemple, de nombreuses personnes déplacées sont disposées à se faire former pour l’auto-emploi. Mais encore faut-il qu’on puisse les réinsérer après leur formation. Aussi d’autres sont prêtes à aller au front si on leur trouvait les armes pour combattre. Mais vous convenez avec moi qu’on ne peut avoir les moyens pour donner des armes à tout le monde.

S : En 2022, le Burkina Faso a enregistré deux coups d’Etat. Aujourd’hui, c’est le capitaine Ibrahim Traoré qui est au pouvoir …

C.C.D : En tant que militaire, il y a des moments où il faut faire un choix. La manière dont le colonel Damiba menait le combat était trop lente de mon point de vue. Les terroristes gagnaient plus de terrain. Avec le chef de l’Etat actuel qui était au front, c’est un homme de terrain qui sait comment les choses s’y passent. Il a donc une autre vision de la lutte, et aujourd’hui, cette lutte a pris d’autres tournures. Et nous voyons les retombées. Le combat que le capitaine a engagé porte ses fruits aujourd’hui. Il y a souvent des erreurs d’appréciation, mais à mon humble avis, le combat engagé pour la reconquête du territoire est à apprécier à sa juste valeur. A un moment donné donc de sa vie, même si l’on doit mourir pour une cause juste, je crois qu’il ne faut pas hésiter. Ce ne serait pas une mort inutile. Ceux qui sont morts en défendant le pays en ces moments difficiles ne sont pas morts pour rien. Ce sont eux nos héros nationaux. Ils ont fait le sacrifice suprême pour leur pays. Et c’est cela un homme à mon avis. Mourir pour les autres, mourir pour que les autres puissent exister, c’est une mort noble.

S : Comment appréciez-vous les réformes politiques et institutionnelles entreprises par les nouvelles autorités de la Transition ?

C.C.D : Toutes ces réformes sont louables. Par exemple, si vous prenez le phénomène de la corruption, pour un minimum de service, il faut faire un geste comme on le dit, pour faire avancer les choses. Et nous sommes en partie responsables parce que ‘’je veux que mon travail soit vite et bien fait’’. C’est le fait d’être pressé qui nous amène à corrompre les agents de l’Etat. Si quelqu’un vient déposer son dossier et on lui donne rendez-vous dans deux ou trois jours après pour le traitement ; si toi tu soudoies l’agent et tu as ton dossier le même jour, les autres seront ainsi tentés de faire comme toi. Et c’est la porte ouverte à la corruption.

S : Quel commentaire faites-vous des velléités d’actes de déstabilisation de la Transition ?

C.C.D : Il faut simplement les démasquer et les combattre. Nous aspirons à un retour de la paix et de la quiétude. On ne peut plus permettre que ces personnes sapent les efforts qui sont faits dans ce sens. Je ne vois pas ce qu’on peut encore faire si cette transition n’aboutit pas. Si on rate ce virage-là, c’est fini ! Et si des gens n’ont pas compris cela, et ils continuent à saper les efforts, il faut les mettre hors d’état de nuire. Il faut que l’ancien colon comprenne que l’Africain d’aujourd’hui est différent de celui d’hier.

S : Dans le cadre de la souveraineté alimentaire, les autorités de la Transition ont lancé l’Offensive sylvo-agro-pastorale et halieutique 2023-2025. Quelle peut être la contribution du chef de canton de Dédougou à ce vaste programme ?

C.C.D : Notre contribution, c’est de mettre l’espace nécessaire à la disposition des acteurs pour la réussite de ce programme. Vous savez que certaines zones de la Boucle du Mouhoun, bien arrosées, ne sont pas accessibles pour raison d’insécurité. La réussite de ce programme est donc aussi tributaire de la libération de ces zones. C’est un bon signal que le président de la Transition a donné par cette Offensive pour atteindre l’autosuffisance alimentaire.

S : La Transition a également initié l’entreprenariat communautaire par actionnariat populaire. Comment appréciez-vous cette initiative de développement endogène ?

C.C.D : C’est un modèle économique louable. Et c’est pourquoi j’ai souhaité une séance de travail avec les initiateurs de ce programme afin d’expliquer aux différents chefs de village du canton cet actionnariat communautaire. Une fois compris, vous verrez qu’il y aura une adhésion massive. Personnellement, je n’ai pas encore souscrit. J’attendais de le faire avec les 39 chefs de village après la séance de travail avec le responsable de l’Agence pour la promotion de l’actionnariat communautaire (APEC) de Dédougou, porteuse de ce programme.

S : Comment avez-vous accueilli la création de l’AES ?

C.C.D : Quand vous êtes dans une organisation et à un moment donné vos intérêts ne sont plus sa priorité, c’est à vous de prendre vos responsabilités. Ici, les trois chefs d’Etat ont décidé de s’assumer en créant l’Alliance des Etats du Sahel (AES). Il faut aussi que les gens se souviennent que la CEDEAO (ndlr, Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest) a été créée par des militaires. L’AES pour moi va donner à réfléchir à ceux qui se servent de la CEDEAO pour manipuler nos chefs d’Etat. Il faut des décisions et actions courageuses comme celle de la création de l’AES. On va en souffrir, mais nous acceptons cette souffrance, pas pour nous, mais pour nos enfants et nos arrières enfants. C’est parce que nous aimons la facilité que nous avons été depuis des décennies maintenus dans la précarité.

S : Pensez-vous que cette Alliance a des chances de succès ?

C.C.D : Ces trois pays ont intérêt à ce que l’AES survive. Ils doivent être solidaires. Même si un des membres venait à quitter, les autres membres doivent tenir mordicus.

S : Le 28 janvier dernier, ces trois pays ont claqué la porte à la CEDEAO. D’aucuns pensent qu’une telle décision aggraverait la souffrance des populations de ces pays. Etes-vous de cet avis ?

C.C.D : On va souffrir, mais on va s’en sortir. Ces pays dits développés aujourd’hui ont dû souffrir à un moment de leur existence pour être ce qu’ils sont aujourd’hui. Pendant la seconde Guerre mondiale, ce ne sont pas les Africains qui ont sauvé la France ? Nous avons fait la guerre pour ce pays qui ne nous le reconnait pas aujourd’hui. Pire, c’est cette même France qui passe par la CEDEAO pour nous asservir. Comment pouvez-vous comprendre qu’après plus 60 ans d’indépendance notre monnaie soit toujours fabriquée hors de nos Etats ? Même pour acquérir des armes pour notre propre sécurité, il faut l’accord de la France. Vous pensez qu’on doit toujours rester dans cette servitude ?

S : Le dernier sommet de la CEDEAO tenu à Abuja au Nigeria, le 24 février dernier, a décidé de la levée des sanctions infligées au Niger. Comment avez-vous accueilli cette nouvelle ?

C.C.D : La CEDEAO était obligée, contrainte parce qu’en infligeant ces sanctions, cette organisation croyait maintenir de force le Niger. Les pays membres se sont rendu compte que plus cela dure, plus les conséquences devenaient catastrophiques. Dans le cadre de ces sanctions, le Bénin a fermé son port au Niger. Mais ceux qui vivent du port ont souffert de cette fermeture. Ce n’est pas le Niger seul qui a été sanctionné, mais les milliers des personnes qui vivent des activités du port. Le Niger ne transite pas ses marchandises gratuitement au port. Il paye pour ces transactions, et dès que le port a été fermé, c’est de l’argent qui était perdu pour le Bénin.

S : Pensez-vous qu’avec cette levée de sanctions, ces pays doivent réintégrer la CEDEAO ?

C.C.D : Quand un homme crache, il ne ramasse pas. Quand on dit qu’on ne veut pas quelque chose, on l’assume jusqu’au bout. Pour moi, quoi qu’il en soit, ces trois pays ne doivent donc plus faire machine arrière.

S : Quelle discipline sportive aimez-vous le plus ?

C.D.D : J’aime le football.

S : Les clubs de Dédougou peinent à jouer la 1re et la 2e division du championnat national de football du Burkina Faso. Comment pourriez-vous l’expliquer ?

C.C.D : C’est regrettable. Je les reçois chaque fois au palais pour leur dire de se mettre ensemble. C’est bon d’avoir plusieurs équipes dans une ville, mais si vous devez défendre les couleurs de la ville, mettez-vous ensemble. On prend les meilleurs, on forme une équipe et on joue. Mais les gens ne comprennent pas cela. Au contraire, ils se combattent. Cela ne peut pas marcher.

S : Les Etalons du Burkina Faso ont été éliminés en 8es de finale de la Coupe d’Afrique des nations. Comment avez-vous trouvé la prestation de notre onze national ?

C.C.D : J’ai difficilement digéré cette élimination. J’ai mal dormi ce jour. Je voyais le Burkina Faso en finale contre la Côte d’Ivoire.

S : Avez-vous de l’espoir avec le nouvel entraineur qui vient d’être nommé à la tête de la sélection ?

C.C.D : Brama Traoré ? Je le connais bien. J’ai de l’espoir. Nous avons des potentialités ici. Il faut les essayer. Ce n’est pas tout ce qui vient d’ailleurs qui est bon. Le choix de Brama Traoré est un très bon choix. Mais il faut l’unanimité autour des dirigeants de notre football. J’aime bien notre 11 national. Les éditions à venir, il faut que nous gagnions la coupe.

S : Quel message avez-vous à lancer aux Burkinabè ?

La photo de famille qui a sanctionné la fin de l’entretien avec le responsable des coutumes de Dédougou.

C.C.D : Je vais leur dire de garder espoir. Le combat qui est engagé, c’est sûr que nous allons le gagner. Il faut également accepter perdre par moment, car ceux qui sont en face aussi sont déterminés. Rien que la semaine dernière, j’ai perdu mon petit fils dans les combats, et j’ai encore un autre petit fils en formation pour être, les jours à venir, sur le front. On ne peut pas refuser d’y aller parce qu’on a perdu un fils. On va toujours y aller. Ceux qui sont au front se battent pour nous, nos enfants et nos arrières petits fils. Nous prions les mânes de nos ancêtres d’extirper des rangs de nos vaillants combattants tous ceux qui ont des agendas cachés et qui viennent se faire enrôler au titre des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP).

Entretien réalisé par La Rédaction de Sidwaya/Bobo

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