Assainissement du milieu associatif au Burkina Faso: « Les associations doivent s’inscrire dans les priorités du gouvernement », Jean Pierre Vogna, DG de l’administration du territoire

Le directeur général de l’administration du territoire, Jean Pierre Vogna : « les services techniques du ministère en charge des libertés publiques restent disponibles pour accompagner les associations dans leur mise en conformité ».

Depuis quelques jours, 10 associations ont été suspendues et 21 ONG et Associations étrangères ont été révoquées par le ministère de l’Administration territoriale et de la Mobilité. Face aux interrogations suscitées par ces décisions, le Directeur général de l’administration du territoire, Jean Pierre Vogna, apporte des éclaircissements. Dans cet entretien, il explique les fondements juridiques des mesures prises, précise les obligations légales auxquelles sont soumises les associations et insiste sur la nécessité pour ces structures de s’aligner sur les priorités nationales définies par les autorités burkinabè.

Sidwaya (S) : Depuis quelques jours, une série de révocations et de suspensions ont été prises à l’encontre de certaines associations et Organisations non gouvernementales (ONG). Peut-on connaître les raisons qui ont conduit à ces décisions ?

Jean-Pierre Vogna (J.P.V.) : Les sanctions administratives qui ont été prises récemment à l’encontre de certaines organisations associatives sont conformes à la législation en vigueur au Burkina Faso. Il faut savoir qu’il existe deux types de sanctions administratives prévues par la loi sur la liberté d’association. La suspension est une sanction administrative qui peut viser toute association, qu’elle soit de droit national ou de droit étranger au Burkina Faso. Elle est régie par l’article 62 de la loi portant liberté d’association. Il y a également la révocation qui est aussi une sanction administrative qui s’applique spécifiquement aux associations étrangères autorisées à intervenir sur le territoire burkinabè. Elle est prévue par l’article 31 de cette même loi.

Ces mesures ont été prises en application des textes en vigueur, mais également dans le cadre de la volonté du gouvernement d’assainir le milieu associatif. Cela se traduit par la mise en place ou le renforcement des dispositifs de suivi et de contrôle des activités associatives. Ces dispositifs ont permis de constater un certain nombre de manquements qui, confrontés aux exigences légales, justifient l’adoption de sanctions comme la suspension ou la révocation. Un des impératifs qu’il faut ajouter est le fait que les associations doivent s’inscrire dans les priorités du gouvernement.

En ce qui concerne la révocation, régie par l’article 31, elle est la conséquence d’un manque d’application d’une disposition essentielle de la loi portant liberté d’association. Notamment l’article 28 qui dispose que toute association étrangère ayant obtenu l’autorisation d’intervenir au Burkina Faso, doit obligatoirement signer une convention d’établissement avec le gouvernement burkinabè à travers le ministère de l’Economie et des Finances. Dans les activités de contrôle, nous avons constaté qu’un certain nombre d’associations étrangères qui ont le statut d’ONG, devant signer la convention ne l’ont pas fait. Ces ONG ont commencé leurs activités sans avoir respecté cette disposition. Cette signature de convention est une obligation que nous faisons même dans l’acte autorisant l’association à intervenir. Et cette convention doit être établie par l’association bénéficiaire dans un délai de trois mois.  C’est en réponse à ces manquements qu’ont été prises les décisions de suspension ou de révocation que vous avez constatées.

S : Y a-t-il des voies de recours pour les associations suspendues ou révoquées ?

J.P.V. : Tout acte administratif peut faire l’objet d’un recours. Concernant les associations suspendues, si le motif de suspension disparaît (par exemple si elles régularisent leur situation), la levée de la suspension peut être envisagée. La suspension est une mesure préventive pour inviter l’association suspendue à se conformer à la législation en vigueur.

Pour les associations révoquées, notamment celles de statut étranger, la révocation a un effet immédiat : elles doivent cesser toutes leurs activités. Cela dit, elles peuvent introduire un recours pour demander la révision de la décision. Si elles corrigent les manquements à l’origine de la révocation, leurs dossiers peuvent être réexaminés. Il appartient aux services compétents chargés des libertés publiques d’étudier ces recours dans le respect de la réglementation en vigueur.

S : Quel est le message que vous souhaitez transmettre à travers ces mesures de suspension et de révocation ?

J.P.V. : Le message principal est celui de l’assainissement du milieu associatif. Toute association, qu’elle soit nationale ou étrangère, doit impérativement se conformer aux lois du Burkina Faso qui ont permis son autorisation ou sa reconnaissance.

Il est également impératif que toute association ou ONG inscrive ses actions sur les priorités du gouvernement, conformément à la vision portée par le chef de l’Etat, le capitaine Ibrahim Traoré. Cette vision est traduite dans les référentiels nationaux de développement. Il ne s’agit pas simplement de mener des activités, mais de s’assurer qu’elles répondent aux besoins stratégiques du pays, dans un contexte sécuritaire et socio-politique particulier.

Enfin, j’ajoute que les services techniques du ministère en charge des libertés publiques restent disponibles pour accompagner les associations dans leur fonctionnement, leur mise en conformité, ou pour toute information utile.

S : Certaines des ONG concernées par ces décisions sont des partenaires de projets de développement financés par des bailleurs de fonds. Quelles dispositions sont prises pour éviter des répercussions négatives sur la diplomatie ou les relations de coopération ?

J.P.V. : C’est une préoccupation légitime. Toutefois, il est important de rappeler que toute organisation, qu’elle soit partenaire technique ou bailleur de fonds, doit s’inscrire dans la vision de développement définie par l’Etat burkinabè.

Propos recueillis par : Wamini Micheline OUEDRAOGO 

 

 

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