Le Réseau des médias africains pour la promotion de la santé et de l’environnement (REPMASEN-Burkina), a organisé, un forum sur l’avortement sécurisé, le jeudi 25 mars 2021 à Ouagadougou.
Au Burkina Faso, la question de l’avortement sécurisé relève toujours du tabou, malgré les drames causés par les milliers d’avortements clandestins. C’est ainsi que le Réseau des médias africains pour la promotion de la santé et de l’environnement (REPMASEN-Burkina), en partenariat avec l’ONG IPAS, a organisé, un forum le jeudi 25 mars 2021 à Ouagadougou, pour interpeller l’opinion nationale et les décideurs sur la nécessité d’en parler. Placé sous le thème : «rompre le silence sur les avortements non sécurisés», la rencontre a regroupé des professionnels de santé, des leaders d’OSC et des journalistes.
On retiendra que l’avortement sécurisé est celui autorisé par la loi à la demande de l’intéressée et pratiqué par des agents de santé dans des conditions appropriées. Le premier communicateur Dr Souleymane Kaboré de Engender Health, a rappelé qu’au Burkina Faso, l’avortement est autorisé jusqu’à 12 semaines, quand la vie de l’enfant ou de celle de la mère est en danger, lorsque la grossesse résulte d’un inceste ou d’un viol et si le fœtus est atteint d’une grave malformation. Selon Dr Kaboré, ces conditions ne sont pas connues par la grande majorité de la population et de nombreux facteurs font que les demandeuses n’obtiennent pas à temps, les papiers nécessaires pour se faire avorter légalement. A l’en croire, cela pousse beaucoup d’entre elles à recourir à l’avortement clandestin dans des conditions insalubres, causant souvent des décès. Dr Souleymane Kaboré a indiqué que les hôpitaux comme Yalgado Ouédraogo, reçoivent beaucoup de cas par semaine, pour cause de complications d’avortement. Citant l’annuaire statistique 2018 du ministère de la Santé, il a affirmé que près 11% des décès maternels sont liés aux avortements compliqués et que 87 200 femmes ont pratiqué un avortement clandestin au moins une fois dans leur vie.
La coordonnatrice de la Communauté d’action pour la promotion de la santé sexuelle et reproductive au Burkina Faso (CAPSSR/BF), Awa Yanogo, a reconnu que l’avortement n’est jamais sans conséquence qu’il soit légal ou clandestin. Elle a souhaité que le Burkina Faso respecte les lois et textes juridiques nationaux, régionaux et internationaux qu’il a entièrement adhérés, notamment le protocole de Maputo. L’article 14 du protocole de Maputo autorise l’avortement médicalisé en cas d’agression sexuelle, de viol, d’inceste et lorsque la grossesse met en danger la santé mentale et physique de la mère ou la vie de la mère ou du fœtus. Awa Yanogo s’est réjouie parce que selon la loi santé sexuelle et reproductive, l’Interruption volontaire de grossesse (IVG) passe de 10 à 14 semaines, lorsqu’il s’agit d’un inceste ou d’un viol et est possible à tout moment pour les cas de malformations.
« Jamais guérie »
D’après M. Yanogo, l’article 513-14 du nouveau code pénal, stipule que « si la matérialité de la détresse est établie par le ministère public, les intéressées peuvent légalement avorter ». Pour Bélélé Joseph Ido, expert en clarification des valeurs, l’avortement est fortement condamné au Burkina Faso. Pourtant selon M. Yanogo, dans les temps anciens comme de nos jours, les Burkinabè recourent à l’avortement pour éviter principalement les situations jugées honteuses, c’est-à-dire, les grossesses issues de l’inceste, de l’adultère et du viol. De son avis, il faut avoir le courage de parler de l’avortement sécurisé parce qu’il y a trop de femmes qui meurent à cause des avortements clandestins. Le maïeuticien Charles Joseph Kisito Ouédraogo a abordé le thème des Soins après avortements (SAA) qui selon lui, est différent de l’avortement sécurisé. Les SAA visent à sauver les patientes admises après un avortement clandestin, foi de M. Ouédraogo. Selon lui, les SAA comprennent cinq composantes dont le traitement en urgence, le counseling et la contraception. De son avis, quelque soit le type d’avortement, la patiente n’est jamais guérie du point de vue psychologique, d’où la nécessité d’un suivi psychologique. Pour la coordonnatrice du REPMASEN/Burkina, Bénédicte Zouré, le forum vise à faire un plaidoyer auprès des décideurs pour mieux protéger les femmes et les enfants. Mme Zouré a également souhaité que les hommes et femmes des medias fassent des productions pour interpeller les Burkinabè sur les cas «dramatiques» des avortements non sécurisés au Burkina Faso.
Tilado Apollinaire ABGA