Au-delà des divergences

Les femmes du Burkina Faso, à l’instar de celles des autres pays, ont célébré le 8 mars, la Journée internationale de la femme, en tenant compte du contexte sécuritaire très préoccupant. Pour l’une des rares fois, depuis que cette journée a été décrétée chômée et payée sur le territoire national, les femmes burkinabè ont fêté dans la sobriété, pour ne pas dire dans un esprit de recueillement. En commémorant ainsi le 8-Mars, elles ont répondu à l’appel des plus hautes autorités qui voulaient que cette journée reflète la situation de guerre dans laquelle se trouve le pays. Elles ont montré ainsi que l’insécurité dans laquelle le Burkina est plongé les interpelle. Cette attitude a alors pris à contrepied tous ceux qui pensaient que le 8 mars était une journée du tout permis. Qu’elle ne pouvait être célébrée autrement que dans la pure tradition festive, avec le fameux pagne, source de discorde dans des couples.

Pour certaines femmes, commémorer le 8-Mars sans le pagne qui va avec n’est que mépris et inconsidération de la part de leur époux, au point de s’endetter parfois pour ressembler aux autres. Et la fête, pour certaines femmes burkinabè, consistait aussi à abandonner matinalement le foyer pour n’y retourner que tardivement, souvent dans un état d’ébriété qui ne les valorisait pas. Pour ce 8-Mars 2023, il y a bel et bien eu commémoration, mais dans une option soft, marquée par des actions de solidarité, des activités de réflexion et de soutien à la lutte contre le terrorisme. C’était du reste la vision du père de la Révolution burkinabè, Thomas Sankara, dont l’objectif est de permettre aux femmes de prendre conscience de leur rôle en tant que actrices de développement, le côté festif n’étant en fait qu’un agrément. Ainsi, les femmes, en célébrant sans faste cette 166e journée à elles dédiée, montrent encore que les Burkinabè peuvent s’entendre sur l’essentiel. Cette logique peut s’appliquer à bien de domaines.

Le contexte de guerre imposé au pays et qui endeuille des familles au quotidien, commande la sobriété dans nos faits et gestes. Au-delà des journées commémoratives, ne pouvons-nous pas définir un autre modèle de vivre-ensemble qui appelle à une solidarité agissante, véritable fondement de la Nation ? A situation exceptionnelle, mesures exceptionnels, dit-on. Et si dans cette suite de la fête du 8-Mars 2023, le gouvernement demandait à chacun sur un jour « consensuel » de rester focus sur le front en soutien aux vaillantes Forces de défense et de sécurité ? Des forces pour qui il va falloir d’ailleurs absolument trouver une autre appellation que les Boys, nos langues pouvant trouver un équivalent fort qui, comme un froment, les galvaniserait face à tout ennemi. Nous sommes en guerre et nous ne devons pas l’oublier. Cette guerre n’est pas seulement celle du gouvernement, ni de zones agressées, mais de tous les Burkinabè et nécessite qu’on se donne la main pour sortir du gouffre.

Quand de l’extérieur, des gens ont peint sans gloire la carte de notre pays en rouge comme pour dire qu’il est infréquentable, ils ignorent en réalité que le « rouge » de la détermination et de l’engagement a toujours été dans le quotidien des Burkinabè depuis belle lurette. Quand ils étaient gaulois, ils partageaient le « rouge » du drapeau français. Quand ils sont devenus Voltaïques, le rouge a été gardé comme un symbole de souveraineté et devenus Burkinabè, ils ont fièrement intégré le « rouge » dans leur emblème national. C’est tout dire. Alors, Burkinabè de tous les horizons, taisons nos divergences futiles dans ce contexte où l’existence de la Nation est menacée et unissons-nous pour vaincre l’adversité. Le crédo reste le même : bâtir le Faso aujourd’hui pour le léguer avec honneur et dignité aux futures générations. Nous ne devons pas faillir à cette noble et indispensable mission. Et la femme, mère de l’humanité, devrait y être attendue.

Par Assetou BADOH

badohassetou@yahoo.fr

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