Les défis de Laurent Gbagbo

Le parti de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo, Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI), vient de célébrer son premier anniversaire, le lundi dernier. Après un an d’existence, les militants du parti de gauche ont marqué une halte pour une autocritique sans complaisance des actions entreprises dans le but de conquérir le pouvoir d’Etat. Selon le secrétaire général du PPA-CI, Damana Adia Pickass, leur jeune parti a, en si peu de temps, abattu un travail formidable d’implantation sur le territoire national. A l’en croire, ce sont au total 131 580 militants qui ont effectivement adhéré au PPA-CI dont 34% de femmes et 21% de jeunes. Les responsables du parti se sont aussi réjouis d’avoir ravi la vedette à certaines « grosses pointures » politiques qui existent depuis belle lurette sur l’échiquier national. Aux élections législatives de 2021, le PPA-CI a obtenu dix-huit sièges de députés, ce qui fait de lui la troisième force politique du pays, après le RHDP au pouvoir et le PDCI d’Henri Konan Bédié. Et le parti ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. D’où l’invite du président du PPA-CI à ses militants à achever l’implantation du parti à travers le territoire d’ici la fin de l’année. En effet, Laurent Gbagbo et ses lieutenants se préparent d’ores et déjà aux élections locales de 2023, considérées comme un test grandeur nature pour annoncer la couleur à la présidentielle de 2025. Cependant, l’arbre ne doit pas cacher la forêt.

L’ancien président ivoirien pourrait-il signer son « come-back » comme le prétendent ses partisans? Il est vrai que celui qui a été définitivement acquitté par la CPI ne s’est pas encore prononcé sur sa candidature pour la présidentielle, mais les déclarations de ses proches qui soutiennent qu’il est leur candidat naturel en disent long sur les intentions du vieux briscard de la scène politique ivoirienne. Si tel est le cas, le candidat du PPA-CI devra vaincre plusieurs signes indiens. Le premier obstacle est l’actuel président ivoirien, Alassane Ouattara qui laisse aussi planer un doute sur sa candidature en 2025. Si d’aventure le président Ouattara venait à se représenter, son bilan, notamment sur le plan économique, jugé satisfaisant risque de faire ombrage aux autres prétendants. Les chances du fils de Mama de récupérer le fauteuil présidentiel qu’il a cédé contre son gré à son adversaire s’avèrent ainsi minimes dans ces conditions. Conscient de ce défi et en homme averti, il a commencé à placer ses pions. A la faveur du premier anniversaire de son parti, il a lancé un message à peine voilé à son rival avec le style dont il a le secret. « La Constitution dit que tu as deux mandats… y en a qui disent ‘’je n’ai pas fini mon programme’’, mais en politique on ne finit pas de programme !

Vouloir rester toute sa vie au pouvoir, c’est la dictature ! », a-t-il prévenu. Le chemin est encore périlleux car en plus de sa principale bête noire, il doit analyser l’autre adversaire politique. Il s’agit d’Henri Konan Bédié qui ne compte pas faire de la figuration à ce rendez-vous électoral. Aussi, Laurent Gbagbo doit également faire face à l’émiettement de l’électorat de gauche. En effet, ses alliés d’hier, Pascal Affi N’Guessan, son ex-épouse, Simone Gbagbo et son ancien ministre de la Jeunesse, Charles Blé Goudé, sont devenus aujourd’hui tous ses concurrents. Ce sont autant de défis sur lesquels le « Woody de Mama » doit se pencher sérieusement, s’il veut reconquérir sa « chose ». Aura-t-il les reins solides du haut de ses 77 ans ? Telle est la question que se posent les Ivoiriens.

Abdoulaye BALBONE

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