Moumouni Ilboudo, promoteur du PRIBAFRIZ : Le sens d’un engagement social

Grâce au PRIBAFRIZ, les producteurs reçoivent un soutien pour plus de rentabilité dans les bas-fonds

Ingénieur en génie civil au ministère des infrastructures et du désenclavement, Moumouni Ilboudo est le promoteur du Prix du meilleur bas-fond rizicole (PRIBAFRIZ), dans la commune de Tanghin-Dassouri. L’initiative lancée en 2018 a suscité une saine émulation parmi les producteurs au point que le visage des bas-fonds a considérablement changé dans la localité et ses environs. Zoom sur un engagement social qui impacte le développement socioéconomique local.

Moumouni Ilboudo est de ceux qui pensent que soutenir le monde rural, c’est contribuer à l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire. Originaire de Kouzoughin dans la commune de Tanghin-Dassouri, à une dizaine de Km à l’ouest de Ouagadougou, l’ingénieur en génie civil, marié et père de quatre enfants, a lancé en 2018 une initiative de développement local dénommé Prix du meilleur bas-fond rizicole (PRIBAFRIZ). C’est au détour d’une visite du gouverneur de la région du Centre en 2017 chez les producteurs de riz dans le bas-fond de son village dont il était conseiller municipal qu’il a eu un déclic. Suite au échanges avec les riziculteurs, M. Ilboudo a compris qu’un accompagnement était nécessaire pour soutenir leurs efforts. Il s’entretient par la suite avec un encadreur technique sur la possibilité de répondre aux sollicitations des producteurs. C’est ainsi que l’idée d’initier un concours mettant en compétition les parcelles du bas-fond de Kouzoughin a été retenue. En 2018, la première édition d’un concours dénommé « Prix Etienne Ilboudo de la meilleure parcelle rizicole de Kouzoughin » est organisée. Etienne Ilboudo est le défunt père du promoteur. En effet, de son vivant, celui-ci s’est investi dans le social, entre autres, à travers la scolarisation des enfants et la réalisation de forages à Kouzoughin. D’ailleurs, le prix spécial « Etienne Ilboudo » est décerné à chaque édition du PRIBAFRIZ. Le coup d’essai est favorablement accueilli par les riziculteurs d’autant qu’il a permis aux lauréats du bas-fond de Kouzoughin de bénéficier d’intrants et de moyens de déplacement. Après deux éditions, le promoteur est sollicité par les producteurs des autres localités de la commune de Tanghin-Dassouri pour prendre part à la compétition. Moumouni Ilboudo répond positivement aux doléances en élargissant la compétition à tous les bas-fonds rizicoles de la commune. Du coup, le prix prend la dénomination PRIBAFRIZ. D’un au départ, le nombre de bas-fonds en compétition passe à 15.  A la 5e édition qui est intervenue le 31 octobre 2022, à Tanghin-Dassouri, le PRIBAFRIZ a connu une innovation majeure avec l’association des producteurs de riz de la commune voisine de Komki-Ipala. A ce rendez-vous, ce sont 19 bas-fonds rizicoles qui ont été en compétition. Un constat qui dénote de l’intérêt accordé par les paysans à l’initiative de Moumouni Ilboudo. Après cinq années d’existence, le PRIBAFRIZ a littéralement changé la physionomie des bas-fonds. « Le premier impact que nous avons constaté est que sur l’ensemble des bas-fonds en compétition, le taux d’exploitation des superficies aménagées a considérablement augmenté. Ainsi des bas-fonds qui étaient quasiment abandonnés ont été réinvestis par les producteurs améliorant par la même occasion la production au niveau de la commune », confie l’ingénieur en génie civil.

Une production en hausse

 A Kouzoughin où tout a commencé, la production de riz est en hausse considérable au fil des ans depuis l’instauration du prix. De 156,15 tonnes en 2016 pour un rendement de 3,47 tonnes/ha, la production est passée à 225,9 tonnes en 2018 avec un rendement de 5,02 tonnes/ha et une production de 247,5 tonnes en 2021 avec un rendement de 5,5 tonnes/ha.

Depuis 2018, Moumouni Ilboudo compte sur ses fonds propres et sur le soutien de certains de ses amis pour organiser le PRIBAFRIZ. Mais depuis les deux dernières éditions, son initiative bénéficie du soutien du ministère de l’agriculture en intrants et en matériel pour renforcer les prix remis aux lauréats. Qu’à cela ne tienne, le natif de Kouzoughin entend consolider son engagement auprès du monde paysan où il a vu le jour. Pour lui, l’important est que la petite graine semée fait déjà parler d’elle en dépit de la modicité des moyens. « Comme vous pouvez le deviner aisément, les moyens font défaut et les sponsors ne se bousculent pas pour l’activité. Une telle activité mobilise beaucoup de moyens aussi bien humain, matériel que financier. Nous nous efforçons de mettre l’accent sur les conseils et l’accompagnement technique à travers les cadres de partage d’expérience entre producteurs afin de susciter l’intérêt des producteurs », assure celui qui est amateur de golf et de pétanque.

Trouver des solutions avec les producteurs

Le promoteur du PRIBAFRIZ, Moumouni Ilboudo, à propos du développement rural : « La seule approche qui vaille la peine d’être adoptée est une approche endogène à la base.»

Le promoteur du PRIBAFRIZ est convaincu que la meilleure façon d’être utile à l’autre, c’est de l’aider à mieux raffermir sa conviction dans ce qu’il fait. En dépit des difficultés, il nourrit l’ambition d’étendre la compétition à toutes les six communes de la province du Kadiogo pour les prochaines années. « En tant qu’enfant de paysan, l’aide le plus efficace que nous pouvons apporter à nos parents est de les accompagner dans ce qu’ils savent et ont choisi de faire. Aussi, au regard du nombre que constituent les paysans au sein de la population, il apparait clairement que le développement de notre pays passera nécessairement par le développement du monde rural et la seule approche qui vaille la peine d’être adoptée est une approche endogène à la base. Trouver des solutions avec et pour les populations à la base », argue M. Ilboudou qui souhaite à long terme que les bas-fonds soient dotés en eau pour réaliser les cultures de contre-saison. Le pari de l’ingénieur en génie civil pour un monde rural actif se résume à ce que disait François Bayrou en ces termes : « Le citoyen n’est pas un consommateur. C’est un producteur d’idées, de convictions, d’engagement, de solidarité. » C’est pourquoi il entend traduire « la solidarité et l’humanisme dans la sincérité », valeurs qui lui sont chères, dans l’organisation régulière du PRIBAFRIZ.

Karim BADOLO

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