Oumar Yabré, artiste-musicien, devin et guérisseur : « J’ai prédit les inondations du 1er septembre 2009, sept mois avant »

Doté de pouvoirs de guérison et de prédiction, l’artiste-musicien burkinabè, Dominateur et Oumar Yabré à l’état civil, affirme, dans cette interview, que des rites et sacrifices doivent être obligatoirement exécutés pour éviter au Burkina Faso, des « temps difficiles ».

Sidwaya (S) : Vous avez récemment fait le tour de certaines régions du Burkina Faso pour rencontrer les chefs coutumiers. Quel était l’objet de cette tournée ?
Oumar Yabré (O.Y.) : Des temps difficiles guettent le Burkina Faso. Cette tournée avait donc pour but d’alerter les chefs coutumiers, dans un premier temps, étant donné qu’ils sont les gardiens de la tradition et ensuite de trouver une solution. Ce malheur n’est pas d’origine divine. C’est, plutôt, la conséquence de tout ce qui s’est passé depuis la Révolution du 4 août 1983 jusqu’à nos jours, en passant par les événements du 15 octobre 1987 et la Rectification. Il y a eu de nombreux morts et rien n’a été fait coutumièrement pour le repos de leurs âmes. C’est pour cela que le sang continue de couler dans notre pays. Car, leurs esprits réclament justice.

S : Qu’est-ce qui doit être fait pour éviter au Burkina Faso des jours sombres?
O.Y. : Cela reste un secret entre le Moogho Naaba, le Baloum Naaba, l’ensemble des chefs coutumiers des 13 régions du Burkina, des 45 provinces et moi. Il s’agit d’un certain nombre de sacrifices et de rites à faire. Mais, je ne peux pas donner plus de détails.

S : Que se passera-t-il, véritablement, si ce que vous demandez aux chefs coutumiers n’est pas fait ?
O.Y. : Il y aura malheureusement beaucoup de confrontations, avec en toile de fond une recrudescence inédite du grand banditisme, des conflits fonciers, etc. Sur le plan social, nous assisterons au développement ou du moins à une banalisation sans précédent de l’inceste, de l’homosexualité. Des animaux sauvages feront, bien avant, leur apparition en pleine ville. Etant en contact avec la nature, ils sentent toujours l’approche d’un malheur. Leur sortie en milieu urbain est donc toujours annonciatrice d’un malheur imminent.

S : Comment avez-vous été averti sur les évènements qui vont se passer au Burkina ?
O.Y. : Cela se passe généralement à travers un rêve ou une vision. Je suis né avec ce don. Lorsque j’étais enfant, il m’arrivait de voir en rêve ou dans une vision, la mort de quelqu’un. Le matin, à mon réveil, j’en parlais à ma mère. J’étais capable de lui dire s’il s’agissait d’une mort naturelle ou non. Dans le second cas, je donnais le nom du ou des victimes. Très tôt orphelin de père et de mère, j’ai été élevé, éduqué et conseillé par la nature. A cause de ce don, j’ai l’impression de vivre dans deux mondes différents.

S : Aviez-vous déjà prédit des événements qui se sont effectivement produits?
O.Y. : Oui, j’ai vu les inondations du 1er septembre 2009, sept mois avant leur survenue. J’en ai également parlé, à l’époque, avec les chefs coutumiers. Mes voisins m’ont traité de fou. Malgré mes avertissements, plusieurs personnes voulaient voir avant de croire. J’ai également vu le crash d’Air Algérie. L’avion devait, en réalité, s’écraser au Burkina Faso sur l’avenue Kwame N’Krumah. Le crash était inévitable, mais les chefs coutumiers et moi sommes parvenus à le « repousser » jusqu’au désert malien. Comme pour le cas des inondations du 1er septembre, j’ai dû faire face au rejet ou à l’incrédulité pour les cas du drame de Yirgou, les attaques de Splendid Hôtel, d’Aziz Istanbul, etc.

S : Ne craignez-vous pas d’être considéré comme un prophète de malheur au moment où le Burkina a plutôt besoin de solutions ?
O.Y. : L’être humain a toujours été ce qu’il est. En ce qui me concerne, je ne suis pas un prophète de malheur. J’annonce, certes des événements moins réjouissants, mais je propose aussi leurs solutions. Nos contempteurs doivent plutôt se réjouir d’avoir quelqu’un qui les prévient et donne par la même occasion les solutions. Si le nécessaire, sur le coutumier, est fait tous les trois ans, le Burkina Faso se transformera en un havre de paix, et deviendra le jardin public de Dieu.

S : En plus du don de prédire les évènements, vous avez aussi un pouvoir de guérison…
O.Y. : Oui, je l’ai depuis mon enfance. Il y a des maladies que je soigne avec des plantes, de la terre ou par imposition des mains. Certaines maladies nécessitent, cependant, uniquement des prières. L’apparition des maladies sont le fait de l’homme lui-même. Prenons par exemple le cas du cancer du cerveau, les problèmes cardiaques, respiratoires ou la pneumonie, etc. Ce sont généralement des maladies provoquées par l’homme. Par exemple, celui qui a régulièrement son ventilateur allumé au-dessus ou à côté de la tête court le risque d’avoir un cancer de cerveau ou des problèmes de cœur ou la pneumonie ou encore des soucis avec sa colonne vertébrale. Il y a une espèce de « poche respiratoire » dans le cerveau humain. Quand le vent ou l’air y pénètre régulièrement, il finit par endommager le corps. Aussi, il y a des maladies qui sont d’origine spirituelle. Le guérisseur ou le médecin doit donc être « en contact » avec son travail. Le médecin, le guérisseur et même le juge doivent être des individus «spéciaux», qui ont un 3e œil, pour voir de quoi « souffre » le malade ou le justiciable.

S : Dites-nous un mot sur votre carrière musicale.
O.Y. : Je fais de la musique tradimoderne pour essentiellement sensibiliser les populations. Je ne chante pas dans un but lucratif. C’est pourquoi je ne vends jamais mes CD. Ils sont distribués gratuitement. Mon premier album est sorti en 2009 et le deuxième en 2013. Mon troisième opus vient de sortir et il est intitulé «2040-2060». En 2040, nos enfants et petits-enfants devront opérer un retour aux sources. Ce sont nos traditions, nos valeurs et nos racines qui feront leur richesse. «2040-2060», c’est le temps de la connaissance et du savoir. Nos enfants devront impérativement les rechercher pendant cette période.

 Interview réalisée par
W. Aubin NANA

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