Situation sécuritaire dans la Boucle du Mouhoun : des déplacements massifs vers Dédougou

Depuis une dizaine de jours, la situation sécuritaire dans certaines localités de la région de la Boucle du Mouhoun s’est encore dégradée. Des populations ayant reçu des ultimatums des Hommes armés non identifiés (HANI) de déguerpir, elles affluent chaque jour vers la ville de Dédougou à la recherche de refuge.

Chaque jour, la ville de Dédougou assiste à un ballet interminable de populations à la recherche de lieux sécurisés. Par vagues, en tricycles, en camions, ou en charrettes à traction animale, ce sont des personnes, fuyant les zones à fort risque sécuritaire de la région de la Boucle du Mouhoun qui convergent dans la cité de Bankuy. Depuis mi-janvier 2023, des localités comme Sanaba dans la province des Banwa, Gassan et Kassan dans le Nayala et certains villages de la province du Sourou sont la cible des attaques des Groupes armés terroristes (GAT).

En plus de ces attaques, des populations de certains villages ont été sommées par ces GAT de déguerpir. Selon le témoignage d’un habitant d’un village situé sur l’axe Dédougou-Nouna, les GAT, un soir les ont rencontrés et leur ont donné un ultimatum de 48 heures pour quitter le village. « Ils ont promis de revenir à la fin de l’ultimatum pour éliminer ceux ou celles qui refuseraient de partir. C’est difficile pour nous mais nous sommes obligés de partir », explique-t-il les larmes aux yeux à son arrivée à Dédougou. Dès l’arrivée des GAT, a ajouté une femme d’une cinquantaine d’années, les hommes sont sortis par le mur pour se sauver dans la brousse. « Ce n’est qu’au petit matin qu’ils sont revenus. Nous avons pris ce que nous pouvons prendre pour commencer à marcher en direction de Dédougou. Nous avons fait trois jours de marche et par la prière, nous sommes arrivés sans provisions. Nos maris ont cherché à nous loger avant d’aller vider nos greniers pour notre alimentation », renchérit-elle, toute déprimée. Le constat fait dans la ville de Dédougou est désolant. Des populations arrivent mais ne savent pas où se loger. Les maisons dans les zones non loties de la ville sont toutes occupées. A titre d’exemple, une famille de 18 personnes loge dans une maison de 16 tôles (chambre-salon), en laissant les bagages dehors.

Le malheur des uns …

S’il y a des acteurs qui se frottent les mains dans cette crise humanitaire désolante, ce sont les conducteurs de tricycles et les propriétaires de maisons dans les zones non loties. Pour le transport des personnes en fuite, les conducteurs de tricycles sont sollicités à longueur de journée. Un conducteur de tricycle nous laisse entendre que depuis le début de la situation, il peut faire trois à cinq aller-retour par jour pour ramasser des bagages. « C’est une situation qui n’est pas facile.

Nous avons pitié des populations qui quittent leur localité pour une autre. Nous sommes obligés de les soutenir pour le ramassage de leurs bagages et vivres. Tout se passe bien mais notre grande difficulté est le ravitaillement en carburant. Dans les stations-service, nous sommes contraints à des mesures sécuritaires qui limitent notre ravitaillement », fait-il savoir. Un propriétaire d’une maison dans la zone non lotie du secteur 5 de la ville de Dédougou raconte que la situation sécuritaire l’a amené à terminer son chantier et entamer un autre afin de les mettre en location. « Ma première maison, dès qu’elle est finie, j’ai immédiatement eu un preneur. A peine les travaux de la deuxième entamés, des preneurs se bousculent », indique-t-il. Selon un PDI, le problème de logement est crucial. « Avec l’année scolaire en cours, nous ne pouvons pas être accueillis dans les écoles. Aussi, les autorités compétentes n’ont pas prévu de sites pour nous accueillir. C’est une situation qui dépasse tout le monde et nous comptons sur la grâce divine et les bonnes volontés. Je n’avais jamais imaginé qu’un jour, j’allais fuir mon village où je suis né pour errer ailleurs à la recherche d’un logement. Bref, c’est la volonté de Dieu et nous le prions pour que notre pays retrouve la paix », a-t-il dit, écrasant une larme.

Stanislas BADO

(AIB/Mouhoun)

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