Jean-Paul Thiombiano, Secrétaire général de la CRA de l’Est : «On s’active pour se conformer à l’acte uniforme OHADA»

Dans le cadre d’un reportage sur le thème de l’édition 2019 de la Journée nationale du Paysan (JNP), Carrefour Africain a rencontré le secrétaire général de la Chambre régional d’agriculture (CRA), Monsieur Jean-Paul Thiombiano, conseiller principal d’agriculture pour en savoir d’avantage sur cette faîtière des organisations de producteurs.

Combien de groupements et associations de producteurs compte la région de l’Est ?
Il y a dans la région entre 700 et 800 groupements et organisations professionnelles agricoles dans la région de l’Est. Il s’agit de toutes organisations confondues, que ce soit des organisations qui relèvent de la production végétale, animale comme de l’environnement. De ces organisations il y en a qui sont réellement fonctionnelles tout comme on en trouve dont la tenue des organes n’est plus régulières. Donc ces dernières ont des difficultés de fonctionnement. D’ailleurs avec la loi concernant l’acte uniforme OHADA (NDLR : Organisation pour l’harmonisation africaine du droit des affaires) toutes les organisations sont appelées à se conformer à cette acte-là. C’est dire que dorénavant on ne parlera même plus de groupements villageois ou d’organisations professionnelles en tant que tel mais de coopératives, d’unions de coopératives. Sur le terrain, que ce soit au niveau des services techniques ou de la chambre régionale d’agriculture, on s’active pour que l’ensemble de ces organisations puissent se conformer à l’acte uniforme OHADA.

On vous a donné jusqu’à quand pour le faire ?
Il y a eu plusieurs dates qui avaient été données à l’ensemble des pays de la sous-région de la CEDEAO (NDLR : Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) mais au regard des difficultés que les organisations ont sur le terrain à s’y conformer finalement la date butoir c’est dans deux ans, autour de 2021.

Quels sont les domaines d’intervention de la CRA ?
Le premier domaine est celui de l’information et de la formation. La CRA en tant que structure représentative des acteurs de la profession agricole a pour mission de donner l’information opérationnelle aux acteurs agricoles. Deuxième mission, la CRA représente l’ensemble des agriculteurs et défend leurs intérêts. La CRA intervient enfin dans le domaine de l’appui à la structuration et de la recherche de financements en faveur du monde rural.

Parlez-nous de la recherche de financements
La recherche de financements est un domaine très important. Par exemple, avant Neer-tamba nous avons été accompagné par le PADAB II (Projet de développement de l’agriculture au Burkina Faso) ; un projet danois. Ce projet avait deux guichets de financement : le guichet privé et le guichet public. La CRA était alors responsable du guichet privé. Il s’agissait ici d’accompagner et d’appuyer tous les producteurs qui ont des besoins de financements en termes de microprojets. Nous avons le Projet de sécurité alimentaire à l’Est (PSAE). Il y a le programme VALPAPE (Valorisation du potentiel agro-pastoral dans l’Est), l’ex-programme ADEL (Appui au développement de l’Est). Actuellement VALPAPE est en train de réécrire un nouveau programme. Ce sont autant d’initiatives que nous avons développées au niveau de la CRA pour avoir l’accompagnement de ces partenaires-là. Comparaison n’est pas raison, si vous prenez les autres Chambres, elles n’ont pas ces appuis. Le PADAB II mettait à la disposition de la CRA les ressources financières nécessaires qui à son tour les mettaient à la disposition de ces producteurs afin qu’ils réalisent leurs microprojets. De même au niveau du projet Neer-tamba nous avons eu ce volet mais il a été rapidement épuisé. Nous avons bénéficié aussi du même type de soutiens avec d’autres projets comme le PAFASP (Programme d’appui aux filières agro-sylvo-pastorales), le PASPRU (Programme d’appui et de promotion du secteur privé en milieu rural). Ce sont tous ces appuis financiers qui nous mettent à l’aise au niveau de la CRA de l’Est.

Pouvez-vous nous donner un montant sur ces appuis financiers ?
Si je prends le PTBA (Projet du travail budget annuel) pour 2019 il se chiffre en termes de milliard parce que c’est essentiellement des aménagements de bas-fonds, des sites antiérosifs et de renforcement de capacités. Par exemple en ce qui concerne les petits aménagements du foncier villageois, l’intensification des petites exploitations et la valorisation leurs productions et l’association des acteurs et mise en réseau donnent un budget total d’un milliard cent quarante-trois millions (1 143 000 000) pour cette année. Vous constatez que c’est un montant assez élevé. C’est pourquoi Neer-tamba a mis à la disposition de la CRA tout ce qui concerne la logistique, le personnel afin d’accompagner la CRA dans la mise en œuvre de ses activités.

Quelles sont les principales difficultés que rencontre la CRA de l’Est ?
La CRA est une institution consulaire qui est l’interface entre l’ensemble des acteurs de la production agricole et les partenaires au développement tels que les projets et programmes, les services techniques, etc. Comme toute organisation à ses débuts éprouve des difficultés la CRA en a connu notamment lors de la première mandature dans les années 2003-2004. Elle n’était pas tellement connue car ne disposant pas de suffisamment de ressources non seulement au plan humain mais aussi au plans matériel et financier pour se faire connaitre au niveau régional.

Mais depuis lors, avec l’accompagnement et de l’Etat et des projets et programmes, la visibilité de la Chambre d’agriculture a commencé à être une réalité dans l’ensemble des provinces de la région. Mais cette visibilité est encore timide au niveau des villages, car comme vous devez le savoir la chambre d’agriculture est l’une des rares organisations qui est structurée du village en remontant jusqu’au niveau national. Mais aujourd’hui on peut dire que ces problèmes ont trouvé des solutions avec l’appui-accompagnement de l’Etat et des projets et programmes dans la mise en œuvre du plan pluriannuel de la CRA. Certaines compétences manquent au niveau de la CRA pour lui permettre de jouer pleinement son rôle. C’est le cas d’un spécialiste du foncier et d’un spécialiste dans la passation des marchés.

Aujourd’hui la question des ressources pérennes des chambres d’agriculture est une question d’actualité. En effet chaque chambre régionale d’agriculture est autonome et il revient à chacune d’elles de développer des initiatives pour se faire accompagner dans le cadre de la mise en œuvre de ses plans pluriannuels. Nous menons la réflexion sur les ressources propres de chaque chambre d’agriculture depuis la première mandature. Ainsi la CRA de l’Est bénéficie de l’appui de Neer-tamba, VALPAP (programme de valorisation du potentiel agropastoral dans l’Est), PSSA (sécurité alimentaire) qui s’élève à plusieurs milliards de francs CFA.

Entretien réalisé par
Alassane NEYA