Autonomisation économique des femmes : des PDI du Centre-Ouest affranchies de l’assistanat

Les femmes PDI en pleine formation avec Assane Diall sur la confection des différents articles, au siège de l’association Woumtaaba à Koudougou.

Bénéficiaires d’une formation sur la confection d’accessoires féminins qui a eu lieu à Koudougou, province du Boulkiemdé, des femmes déplacées internes comptent tourner définitivement le dos à l’assistanat. Actuellement en activité, certaines arrivent à s’en sortir grâce à la fabrication et à la vente des coiffes, des pochettes, des chaussures, des boucles d’oreilles, des bracelets…

A Koudougou, dans le Centre-Ouest, des femmes déplacées internes font des merveilles. Grâce à une formation qu’elles ont reçue, elles fabriquent des accessoires féminins qui leur permettent de gagner leur pain.

Parmi elles, figurent des étudiantes de l’Université Norbert- Zongo (UNZ). En effet, celles-ci sont devenues des Personnes déplacées internes (PDI) par la force des choses. Après leur inscription, ces étudiantes ont appris les attaques de leurs villages par des groupes armés terroristes. Ne pouvant plus y retourner, elles sont obligées de rester à Koudougou et d’apprendre de petits métiers en attendant des lendemains meilleurs.

Kamadi Lompo est une étudiante en philosophie à l’UNZ. Originaire de Kantchari, dans la province de la Tapoa, elle est arrivée à Koudougou depuis 2020 après l’obtention de son BAC en 2019. Selon elle, elle devrait être inscrite à Fada N’Gourma mais l’insécurité lui a

Un échantillon des articles confectionnés par les femmes PDI.

fait changer d’avis. Kamadi devient ainsi une étudiante avec le statut de PDI.

Les difficultés financières pour bien poursuivre ses études ne manquent pas. Répertoriée auprès des services de l’action sociale de Koudougou, c’est avec ce statut qu’elle bénéficie d’une formation en confection d’accessoires pour femmes, organisée par l’association Woumtaaba au profit des femmes PDI.

« Avoir un métier est plus concret »

Durant la formation, elle dit avoir appris comment confectionner des coiffes, des couronnes, des pochettes, des chaussures, des boucles d’oreilles, des bracelets, etc. Seulement, le manque de matériel pour commencer cette activité porteuse d’espoir se pose pour elle.

Tout comme Kamadi, Fatimata Ouédraogo est étudiante à l’UNZ. Elle vient d’avoir sa licence en géographie. Originaire de Séguénega dans la province du Yatenga, elle est arrivée à Koudougou en 2018 à la suite des attaques terroristes dans son village.

Grâce à la formation reçue, elle espère joindre les deux bouts en attendant un travail bien rémunéré. « La confection des articles féminins est un boulot qui peut bien nourrir son homme », dit-elle. A son avis, il est bien d’avoir les diplômes, mais avoir un métier est encore plus concret. Rayangnewendé Safiéta Ouédraogo, elle, vient de Titao et est étudiante en 2e année d’histoire.

Bénéficiaire aussi de la formation, elle compte se donner à fond car, pour elle, la vie de PDI n’est pas facile à supporter. Déjà, elle a sa petite idée pour écouler facilement ses produits qu’elle va confectionner. Sakinatou Tondé est de Kokologho.

Mère de quatre enfants, elle indique avoir bien maitrisé la confection des différents articles et espère se tirer d’affaire. A l’écouter, elle compte évoluer pleinement dans ce domaine afin de pouvoir prendre en charge ses enfants.

Pour la présidente de l’association Woumtaaba, Ajourata Sawadogo/Congo, l’objectif de la formation est de permettre aux femmes d’avoir une activité rémunératrice.

« C’est une opportunité pour moi car, jusque-là, je n’exerçais pas d’activité qui puisse me rapporter quoi que ce soit », confie dame Sakinatou. Déjà, les articles qu’elle a fabriqués sont bien prisés et vendus sur le marché.

Amie Bagayoko, une jeune mère de 27 ans, est dans la même dynamique. Elle est déjà en activité de confection. Grâce à quelques articles écoulés, elle arrive à subvenir à ses besoins et à ceux de ses deux enfants.

Afin d’assurer une bonne formation aux femmes PDI, l’association Woumtaaba a eu recours à un acteur du secteur des cuirs et peaux qui officie au grand marché de Koudougou.

Il s’agit de Assane Diall de nationalité sénégalaise qui exerce dans la confection des accessoires pour femmes depuis de longues dates. Il se dit disposé à accompagner les femmes formées car, pour lui, le marché est bien porteur. « Les articles qui ont fait l’objet d’apprentissage sont des produits qui sortent beaucoup parce que prisés par les femmes elles-mêmes », assure M. Diall.

Si cette formation a pu se tenir, aux dires du Directeur régional (DR) en charge de la culture et du tourisme du Centre-Ouest, Fousseni Mien, c’est grâce à un appui financier du Fonds de développement culturel et touristique (FDCT). Il s’agit, pour lui, d’une activité

d’autonomisation économique de la frange féminine et particulièrement des personnes vulnérables. « Au regard du contexte sécuritaire du pays, il y a beaucoup de femmes PDI qui se sont retrouvées dans notre région.

L’association a initié ce projet pour contribuer à l’autonomisation financière de ces femmes afin qu’elles aient des revenus pour subvenir à leurs besoins », souligne le DR.

L’appui des partenaires sollicité

Etudiante avec un statut de PDI, Rayangnewendé Safiéta Ouédraogo dit avoir déjà trouvé son job et compte s’installer à Koudougou.

A l’écouter, le fonds existe depuis 2016 et a pour vocation d’accompagner les acteurs culturels et touristiques aux moyens limités dans la mise en œuvre de leurs activités.

Selon la présidente de l’association, Ajourata Sawadogo/Congo, l’objectif est de permettre aux femmes déplacées de pouvoir se prendre en charge à travers une activité génératrice de revenus.

Ces bénéficiaires ont été détectées par les services de l’action sociale de Koudougou mais aussi des communes rurales telles que Ramongo, Kokologho, Bingo, Pella et Siglé. Selon Mme Sawadogo, l’association a décidé de mettre ces femmes en contact avec les couturiers qui ont besoin de coiffes, de pochettes, de chaussures, de colliers, etc. pour leur clientèle.

Du côté de la direction régionale en charge du genre et de la famille, la première responsable Odette Bationo/Meda apprécie fortement l’initiative de la formation. A son avis, elle s’inscrit en droite ligne de la politique gouvernementale pour ce qui concerne la prise en charge et l’accompagnement des personnes vulnérables à l’image des PDI. « Au Centre-Ouest, environ 40 000 femmes et enfants sont des PDI dont le grand nombre se trouve dans le Boulkiemdé.

La prise en charge de ces femmes est un casse-tête parce qu’elles sont souvent sans le minimum », révèle Mme Bationo. Elle signale que les mesures d’accompagnement du gouvernement sont les vivres d’abord et les articles ménagers et les kits de dignité viennent ensuite. « Avec cette crise, l’Etat fait ce qu’il peut et nous comptons aussi sur les partenaires pour nous aider dans la prise en charge des PDI », plaide Mme Bationo.

François KABORE